La tortue et les deux canards
Commentaire de texte : La tortue et les deux canards. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar sanseverina • 29 Avril 2021 • Commentaire de texte • 1 488 Mots (6 Pages) • 712 Vues
• La présentation de la tortue
1-4 : Présentation en deux temps : distique sur la tortue, personnage du récit (imparfait de narration) / distique généralisant à partir de ce cas particulier au présent gnomique.
La fable s’ouvre sur le premier protagoniste. L’inversion de la structure habituelle « Il était une tortue », en imposant une pause à l’hémistiche, permet probablement d’accentuer l’adjectif final « à la tête légère » : cette tortue est mécontente de son sort « lasse de son trou », ce qui dénote une absence de sagesse, immédiatement associée à un désir de voyage « voulut voir le pays ». Le substantif dépréciatif « trou » figure dans toutes les fables mentionnant un logis abandonné, peut-être au discours indirect libre. Deux vers reprennent en anaphore « Volontiers », soulignant la banalité du désir de la tortue, d’où le passage à la tournure impersonnelle et au présent gnomique. Ces tournures évaluatives, axiologiques (« on », « gens boiteux ») sous-tendent un énoncé moral condamnant le peu de bon sens de ces êtres : comme les « gens boiteux », la tortue, lente par nature, est peu apte aux voyages, d’autant que sa carapace est une maison (v.23) à porter par nécessité : ne pouvant voyager léger, la tortue fait preuve d’esprit léger que de vouloir aller jusqu’en « terre étrangère ».
• La proposition des canards
5-7 : canards : LF ne joue pas des attentes du lecteur : on ne sait pas quelles sont leurs caractéristiques. Ni renard rusé, ni singe malfaisant, les canards sont un animal « neutre » dans le bestiaire, mais se révèlent ici flatteurs et joueurs. Contrairement à la fable de Pilpay, dans laquelle les canards agissaient ainsi parce que la sécheresse condamnait la tortue à la mort, La Fontaine rend compte de l’action des canards comme d’un pur caprice, voire d’un jeu. La « commère », dont on nous précise par anticipation de la chute (physique et littéraire) qu’elle est bavarde (sens attesté au XVIIe) est regardée avec ironie par le fabuliste : « ce beau dessein » est une antiphrase, et la bêtise de l’animal ne peut qu’être séduite par la proposition alléchante des canards, que LF rapporte au discours direct afin que nous en mesurions l’évidente flatterie.
8-14 : les canards vantent leur projet, font l’article de ce voyage qui leur semble un bon tour à jouer à cette tortue de peu de réflexion. « Large chemin » rime avec « beau dessein » : il s’agira donc d’un voyage aérien, les canards ayant la prétention de faire changer la tortue de continent. C’est toute la diversité du monde que ces flagorneurs promettent à leur proie, prise au vertige de leur parole anaphorique et énumérative (« mainte, maint »). Les canards connaissent L’Odyssée et la renommée d’Ulysse, celui qui « observa les villes et les mœurs de beaucoup d’hommes », d’après la traduction par Horace du 3ème vers de l’épopée : ils maîtrisent la rhétorique fallacieuse, un art de la parole menteuse et flatteuse. Nul fromage à récupérer, seulement le plaisir du jeu, quand bien même la vie de la tortue est en jeu.
La Fontaine s’amuse de cette parole hâbleuse des canards, passant de l’alexandrin à l’octosyllabe, soulignant la résonnance burlesque de cette référence, plus exactement, le registre héroï-comique de la comparaison d’une tortue « à la tête légère » avec le héros grec rusé, de « cette affaire » avec L’Odyssée.
• L’aventure de la tortue
15 : La plus grande sottise est d’abord d’avoir écouté (et non seulement entendu ou s’en être amusée) la proposition, la diérèse soulignant le danger, alors qu’à l’évidence, elle n’est que pure folie. Le corbeau s’est cru Phoenix, la tortue se prend pour Ulysse : elle n’a pas écouté la leçon du « corbeau et le renard », tant pis pour elle.
16-18 : de commère, voilà la tortue devenue pèlerine (sens double au XVIIe : voyageuse en pèlerinage, mais aussi « drôle de bonhomme »), voyageuse transportée dans les airs grâce à la « machine » forgée par les canards. L’on s’attend à une invention complexe et ingénieuse, mais là encore, l’emploi est héroï-comique : ce n’est qu’un bâton en travers de la gueule, « bâton » ne rimant pas avec « machine », comme pour signifier l’inadéquation des termes.
19 : L’avertissement répété des canards « serrez bien, gardez… » n’est pas entendu par l’animal à la tête légère, ou plutôt, ne fera pas le poids face aux exclamations des spectateurs.
23-24 : la tortue n’est nullement à sa
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