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Explication linéaire : La Bruyère, Les Caractères, Livre VIII

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Par   •  1 Mai 2022  •  Commentaire de texte  •  1 919 Mots (8 Pages)  •  3 392 Vues

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Linéaire n°2

La Bruyère, Les Caractères, Livre VIII

Introduction :

        La Bruyère a 43 ans lorsque paraît la première édition des Caractères. L’ouvrage a tellement de succès, en particulier les portraits, que les rééditions se succèdent et que son livre compte pour finir 1120 remarques qui vont de la maxime la plus courte au portrait le plus détaillé.

        Le texte que nous allons étudier se situe dans la section VIII  des  Caractères qui s’intitule : « De la Cour »; il est consacré au règne de l’hypocrisie et des faux-semblants et montre des courtisans ambitieux et pleins d’amour propre.  

LECTURE EXPRESSIVE DE L’EXTRAIT

Problématique : Le fragment que nous allons étudier se livre à un portrait général des courtisans et l’on peut se demander : Comment La Bruyère se livre-t-il à une critique sévère des courtisans ?

Annonce des mouvements du texte : Pour répondre à cette question, nous allons procéder à l’analyse du texte à travers les mouvements qui nous avons pu mettre au jour :

- Lignes 77 à 85 : L’importance des courtisans pour les femmes

- Lignes 86 à 96 : Les courtisans au service d’eux-mêmes

- Lignes 97 à la fin : Les courtisans finalement sans conséquence

I. Les courtisans au service des femmes :

Les cours ne sauraient se passer d'une certaine espèce de courtisans, hommes flatteurs, complaisants, insinuants, dévoués aux femmes, dont ils ménagent les plaisirs, étudient les faibles et flattent toutes les passions ;  ils leur soufflent à l'oreille des grossièretés, leur parlent de leurs maris et de leurs amants dans les termes convenables, devinent leurs chagrins, leurs maladies, et fixent leurs couches : ils font les modes, raffinent sur le luxe et sur la dépense, et apprennent à ce sexe de prompts moyens de consumer de grandes sommes en habits, en meubles et en équipages ;

- Au début de cet extrait, La Bruyère tient un propos très général comme en témoigne l’utilisation du pluriel associé à l’article défini - qui fait référence à un univers connu de tous.

- De la même manière les courtisans sont représentés par le pronom « ils », repris dans tout le fragment.

- Le recours au présent de vérité général doit aussi être souligné.

- Et, dès le début,  la charge à laquelle se livre La Bruyère apparaît assez violente :

        > Le caractère indispensable de la présence de courtisans s’exprime grâce à une formulation négative « ne sauraient » qui s’associe à une désignation restrictive, voire péjorative des courtisans : « une certaine espèce ».

        > Cependant, cette désignation restrictive prend immédiatement une tournure négative dont le caractère ultime est la soumission aux femmes vues elles-mêmes comme l’ultime élément d’une gradation ascendante d’adjectifs péjoratifs : « Les cours ne sauraient se passer d'une certaine espèce de courtisans, hommes flatteurs, complaisants, insinuants, dévoués aux femmes ».

        > L’activité des courtisans est définie par une série de verbes d’action : « ménager », « étudier », « flatter » qui met en valeur une capacité à s’effacer, se conformer, voire servir sans juger. Les compléments associés aux verbes suivent eux-mêmes une gradation : « plaisirs », « faibles », « passions » qui indiquent la faiblesse des courtisans.

- Une dernière gradation « ils leur soufflent à l'oreille des grossièretés, leur parlent de leurs maris et de leurs amants dans les termes convenables, devinent leurs chagrins, leurs maladies, et fixent leurs couches » montrent de quelles manières les courtisans agissent auprès des femmes. Le terme de cette gradation est très exagéré (comment pourrait-on prévoir la date d’un accouchement?) et semble destiné à montrer à quel point ils ont une emprise sur les femmes. Ici, les courtisans apparaissent actifs dans le strict domaine de la vie privée.

- A la suite des deux points explicatifs, La Bruyère montre à quel point les buts poursuivis par les courtisans sont strictement futiles, tournés vers le paraître et strictement matériels et dispendieux. La démonstration est ici soutenue par des adjectifs : « prompts », « grandes », par la métaphore du feu : « consumer de grandes sommes » ainsi que par une nouvelle gradation qui débute par les dépenses les plus légères : »habits » pour aller jusqu’aux dépenses les plus importantes : « équipages ».

Transition : Après avoir montré l’aspect soumis et néfaste des courtisans auprès des femmes, La Bruyère les montre agissant pour eux-mêmes, dans un calcul constant de leur propre apparence, en quête d’importance.  

II. Les courtisans au service d’eux-mêmes :

ils ont eux-mêmes des habits où brillent l'invention et la richesse, et ils n'habitent d'anciens palais qu'après les avoir renouvelés et embellis; ils mangent délicatement et avec réflexion, il n'y a sorte de volupté qu'ils n'essayent, et dont ils ne puissent rendre compte: ils doivent à eux-mêmes leur fortune, et ils la soutiennent avec la même adresse qu'ils l'ont élevée: dédaigneux et fiers, ils n'abordent plus leurs pareils, ils ne les saluent plus; ils parlent où tous les autres se taisent, entrent, pénètrent en des endroits et à des heures où les Grands n'osent se faire voir; ceux-ci, avec de longs services, bien des plaies sur le corps, de beaux emplois ou de grandes dignités, ne montrent pas un visage si assuré, ni une contenance si libre.

- Dans un premier temps, La Bruyère montre leur attachement à ce qui est ostentatoire, tant dans leurs vêtements que dans les demeures qui sont supposées les représenter :

        > la métaphore souligne le goût de l’apparence pour leurs habits : « des habits où brillent l'invention et la richesse »

        > la tournure négative qui indique qu’il faut pour eux être absolument « au goût du jour » souligne elle aussi la recherche de l’ostentation: « ils n'habitent d'anciens palais qu'après les avoir renouvelés et embellis »

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