Des cannibales, Montaigne, chapitre XXXI, livre I, 1580
Commentaire de texte : Des cannibales, Montaigne, chapitre XXXI, livre I, 1580. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar dout ouli • 3 Juin 2017 • Commentaire de texte • 1 635 Mots (7 Pages) • 3 184 Vues
Lecture analytique 1 : Montaigne, « Des cannibales », chapitre XXXI, Livre I, 1580
La découverte du continent américain est considérée comme un tournant critique dans l’histoire de la littérature puisque cette découverte est devenue, au fil du temps, le sujet principal de nombreux écrits et la préoccupation phare des penseurs de la Renaissance ou humanistes.
Né dans le château de Montaigne en Dordogne, Michel Eyquem (1533-1592) prend le nom de son domaine quand il en hérite. Suite à la mort de son ami Etienne de la Boétie, il décide alors d’écrire Les Essais en guise de tombeau au valeureux défunt. Dans ce livre très volumineux, il peint le fond de sa pensée tout en décrivant « l’humaine condition » dans le but d’inviter le lecteur à s’essayer et changer ses conceptions du monde. Tout au long du premier livre des Essais paru en 1580, Montaigne, en digne humaniste, s’interroge sur le regard que porte l’Europe sur les indigènes du Nouveau Monde, condamnés par l’Homme blanc au rang de « sauvages » du fait de leur culture totalement différente.
Ainsi, nous verrons le regard que porte l’auteur sur les Amérindiens ainsi que les différents aspects mis en jeu dans son interrogation.
Pour ce faire, nous présenterons dans un premier temps les éléments qui révèlent l’attitude humaniste de l’auteur, puis nous aborderons l’opposition culturelle et morale des Européens aux Amérindiens, et enfin nous nous étalerons sur les différents moyens stylistiques et rhétoriques mis en œuvre par l’auteur pour défendre son point de vue.
I. L’attitude humaniste et la prise en compte de l’autre :
A l’instar de la plupart des humanistes de l’époque, Montaigne a revisité la notion d’altérité vis-à-vis des Amérindiens suite à la découverte du Nouveau Monde, véritable sujet de débat et de questionnements. Il s’interroge ainsi sur la raison pour laquelle les Amérindiens sont considérés comme « sauvages » ou encore « barbares » alors qu’ils sont tout à fait humains. Il reprend à cet effet la citation de Térence, dramaturge latin du deuxième siècle avant J-C : « Je suis homme, et rien de ce qui est humain ne m’est étranger ».
De même, Montaigne désigne le Nouveau Monde par des termes communs qui pourraient renvoyer au continent Européen, ce qui témoigne de son respect pour les terres Amérindiennes comme l’attestent: « cette nation », « nouvelles terres », « ces contrées-là », « monde ». Cette gradation des termes utilisés suggère un élargissement progressif du champ de vision dans la désignation du continent américain.
D’autre part, en digne penseur de la Renaissance, Montaigne jauge et critique le regard négateur et réificateur des Européens vis-à-vis des Amérindiens du fait de la différence de leur culture, religion et modes de vie comme le montrent les expressions: « chacun appelle barbarie, ce qui n’est pas de son usage », « il semble que nous n’avons autre mire de la vérité et de la raison que l’exemple et l’idée des opinions et usances du pays où nous sommes ». Cette vision néiliste est ainsi due au fait que les Européens jugent selon leurs us et coutumes : tout être qui ne partage pas la culture européenne n’est donc pas considéré comme humain.
Ainsi, afin de livrer son propos, Montaigne instaure un « colloque » avec le lecteur par le biais de son implication et de sa subjectivité comme en témoignent les marques de la première personne : « je », « m’ », « nous »… ce qui facilite la transmission de ses idées et l’exposition de son point de vue.
Enfin, le thème culturel représenté par les Européens s’oppose au thème de la nature représenté par les Amérindiens. Ainsi, les arts et la culture sont considérés en concurrence avec la nature comme le montre la métaphore optique « mire de la vérité ».
II. Opposition de la culture et la nature :
Dès le début du texte, Montaigne annonce clairement sa thèse « il n’y a rien de barbare et de sauvage en cette nation, à ce qu’on m’en a rapporté : sinon que chacun appelle barbarie, ce qui n’est pas de son usage ». A travers cette expression, il refuse d’établir une quelconque hiérarchie entre Européens et Amérindiens. Ainsi, l’auteur défend ces derniers des préjugés dont ils font l’objet et va jusqu’à remettre en cause la culture et les pensées de ses compatriotes.
Ceci témoigne de l’opposition de deux cultures résolument différentes à travers lesquelles l’auteur prend parti aux côtés des Amérindiens alors qu’il critique l’attitude violente et répressive des Européens.
Ainsi, Montaigne dresse d’une part un portrait mélioratif des Amérindiens par le biais de l’emploi de termes laudatifs à leur égard, et ce dans divers domaines : la nature subvient intégralement à leurs besoins et ils s’en contentent amplement comme l’attestent
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