Commentaire acte I scène 5 Le Malade imaginaire
Commentaire de texte : Commentaire acte I scène 5 Le Malade imaginaire. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Stéphanie Legendre • 10 Janvier 2023 • Commentaire de texte • 3 927 Mots (16 Pages) • 684 Vues
Plan du commentaire littéraire :
I) Quelles sont les particularités des relations entre Angélique et son père ?
1) Des relations empreintes de distance
2) Une fille obéissante et soumise… en apparence
3) Un père “tout puissant” qui impose un mari à sa fille : le mariage arrangé
II) Le quiproquo
1) Une caractérisation imprécise des deux jeunes hommes, ce qui crée la confusion
2) Le cœur du quiproquo : un spectacle comique pour le public
3) Malgré une scène comique, la dimension pathétique de la situation d’Angélique ; effet d’attente.
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Représentée en 1673, Le Malade imaginaire est la dernière pièce de Molière ; elle met en scène Argan, un père de famille hypocondriaque et tyrannique. Dans le passage qui nous est proposé, extrait de la scène 5 du premier acte, Argan va annoncer à sa fille Angélique qu’il lui a choisi un mari, alors qu’elle, de son côté, est amoureuse de Cléante, et ce n’est pas le jeune homme choisi par son père ! Un malentendu va ainsi se mettre en place concernant l’identité du futur mari d’Angélique, pour donner naissance à une situation traditionnelle dans le théâtre comique : le quiproquo. Ce passage va se révéler particulièrement intense (on parle d’« intensité dramatique ») pour les personnages mais aussi pour le public, qui va savourer cette situation comique… Nous montrerons ainsi que l’intérêt du public est entretenu tout au long de ce passage, par la découverte tout d’abord des relations entre Angélique et son père, celui-ci se montrant particulièrement égoïste ; puis par le quiproquo qui naît du malentendu entre eux, source de comique.
Dans un premier temps, nous allons mettre en avant que les relations entre Argan et sa fille sont particulières et ne favorisent pas la confidence.
En effet, tout d’abord, on remarque que les relations entre Argan et sa fille sont faites de distance et de respect : on note le vouvoiement respectif : « je vais vous dire » (ligne 1, Argan) ; « tout ce qu’il vous plaira » (ligne 6, Angélique). Ce vouvoiement était courant à l’époque et n’était pas en usage uniquement parmi les classes les plus aisées de la société. De plus, on relève l’appellation « ma fille », et « mon père » (lignes 1 et 6 également), qui va dans le même sens et souligne encore davantage la distance entre sa fille et son père. Enfin, de tout l’extrait, jamais Argan n’appellera sa fille par son prénom, même s’il se met à la tutoyer plus loin dans la scène.
En plus de cela, Angélique apparaît totalement soumise à son père : elle accepte tout ce qu’il lui annonce car elle pense qu’il va lui proposer d’épouser Cléante, le jeune homme dont elle est amoureuse. Elle manifeste sa joie quand Argan lui parle de mariage : « On vous demande en mariage. Qu’est-ce que cela ? Vous riez ? » (Lignes 2 et 3) Elle force ainsi son obéissance dans la suite du passage, ce qui est source de comique pour le public, qui connaît la situation véritable ; et Argan ne se doute de rien, il apparaît ainsi naïf et crédule. Il se réjouit que « les choses soient de la sorte » (lignes 27). Angélique affiche son “obéissance” à plusieurs reprises : « Je dois faire tout ce qu’il vous plaira de m’ordonner » (ligne 6) ; « C’est à moi, mon père, de suivre aveuglément toutes vos volontés » (ligne 9). Quelqu’un de plus avisé qu’Argan aurait sans doute noté le côté exagéré de toutes ses protestations d’obéissance, mais il n’y voit que du feu, et se félicite « d’avoir une fille si obéissante » (ligne 7). Pourtant, la docilité apparente d’Angélique cache un projet qui va la confronter à son père.
De l’obéissance en effet, il en faudrait à Angélique pour accepter ce que son père va lui annoncer : il lui a trouvé un mari sans la mettre au courant. Il s’agit de « Thomas Diafoirus », fils de médecin, et lui-même futur médecin. Ce choix sert uniquement les intérêts d’Argan, qui est un personnage fortement égoïste : se croyant gravement malade, ce dernier souhaite avoir un gendre médecin pour économiser les frais de ses diverses consultations et bénéficier de soins constants. Cet extrait développe ainsi un thème très souvent présent chez Molière : le mariage arrangé. Au XVIIe siècle, il était fréquent que les mariages soient conclus par les parents des futurs époux, sans que ceux-ci soient consultés. L’affaire « est donc conclue, et je vous ai promise » (lignes 7 et 8) ; « mais je l’ai emporté, et ma parole est donnée » (lignes 13-14) ; « Je n’ai point encore vu la personne » (ligne 18). L’emploi du passé composé ou du présent passif met l’accent sur des actions de sens accompli, c’est-à-dire qu’elles sont achevées, elles ne sont pas en cours de réalisation : cela montre que c’est le projet qu’Argan a mené et fait aboutir, et il ne semble pas vouloir revenir sur sa décision : il apparaît ainsi comme un père de famille tyrannique.
[Conclusion partielle et transition :]
Les relations entre le père et sa fille sont empreintes de distance. L’obéissance d’Angélique est forcée et révèle en fait son enthousiasme d’épouser Cléante, qui n’est pas celui choisi par Argan, car celui-ci n’envisage que ses propres intérêts. Le moment de l’annonce de l’identité du futur époux va engendrer un malentendu. Ceci va donc créer un quiproquo, source de comique et moyen de maintenir l’intérêt du spectateur.
Nous allons maintenant analyser le fonctionnement du quiproquo, qui donne lieu à un véritable spectacle comique pour le public.
Rappel :
Définition d’un quiproquo : Situation de méprise, de malentendu, lors de laquelle les personnages pensent parler de la même chose/personne, alors qu’il n’en est rien. Très fréquent dans les comédies, le quiproquo est une forme de comique de situation.
On peut par ailleurs remarquer qu’Angélique donne elle-même la définition exacte du quiproquo à la fin du passage : « (…) vous avez parlé d’une personne, et j’ai entendu une autre. » (Lignes 57-58)
Argan et Angélique caractérisent respectivement Thomas Diafoirus et Cléante de façon très imprécise, ce qui facilite la confusion, l’incompréhension : « la personne » (ligne 18) ; « l’as-tu vu ? » (Ligne 21) ; « l’inclination que (…) nous avons prise l’un pour l’autre. » (Ligne 25) ; « Nous parlons de celui pour qui … » (ligne 49). On remarque l’emploi de termes indéfinis dans ces expressions. L’identité du jeune homme qu’Argan a choisi pour sa fille n’est donnée qu’à la ligne 52, ce qui vient mettre un terme au quiproquo. Le doute commence à poindre dans l’esprit d’Angélique à partir de la ligne 40, quand elle dit ignorer que Cléante (c’est à lui qu’elle pense) parle le latin et le grec.
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