Antigone la peur de souffrir
Commentaire de texte : Antigone la peur de souffrir. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Florence Christienne • 11 Septembre 2021 • Commentaire de texte • 1 817 Mots (8 Pages) • 1 907 Vues
La peur de souffrir
1/ Ismène se présente au début du dialogue comme celle qui est raisonnable, qui a réfléchi toute la nuit et qui sait ce qu’il convient de faire. C’est elle qui mène au début de la scène le dialogue.
Elle fonde ses arguments sur la peur (il faudra souffrir,) et la raison.
Antigone refuse de dialoguer avec elle car elle a déjà donné une sépulture à Polynice durant la nuit. Son acte est désormais devenu irréversible, les arguments d’Ismène n’y changeront rien puisque l’acte a été accompli. Aux réflexions d’Ismène durant la nuit, Antigone a opposé l’action.
Ce n’est ni l’acte d’un esprit entêté ou irréfléchi ni l’acte d’une démente, contrairement à ce que suggérera Ismène à la fin de la scène en ignorant qu’Antigone est passé à l’acte, mais l’acte d’un être indépendant et libre qui ne reconnaît pas la loi des hommes et estime qu’au delà des lois contingentes existe des principes moraux qui l’emportent sur les lois humaines et que ce sont eux qui doivent être le fondement de l’action, qui doivent gouverner les actions des hommes.
Antigone met un terme au dialogue avec sa sœur car elle comprend que sa sœur ne la comprendra pas et que le dialogue est vain. Elle choisit cependant de ne pas lui dire qu’il est déjà trop tard et qu’elle a donné une sépulture à leur frère durant la nuit. Elle respecte la peur d’Ismène car elle ne veut pas la faire souffrir. Le silence d’Antigone est une preuve d’amour donnée à Ismène. En ne lui disant pas la vérité, Antigone protège Ismène et se montre bienveillante envers elle, contrairement à l’image qu’elle donne d’elle même.
Ismène, incapable de comprendre la décision d’Antigone, lui dit qu’elle est folle, ce qui signifie, pour elle, qu’elle a perdu la raison, seule explication à ses yeux de la détermination de sa sœur.
Antigone se résigne à ne pas être comprise par sa sœur, Ismène et elle ayant deux visions de la vie et de l’engagement diamétralement opposées.
2/ Ismène emploie le pronom personnel « ils » en opposition au pronom personnel « nous » pour mettre en scène la violence des scènes qui les attendra, Antigone et elle, si elles désobéissent à Créon et donnent une sépulture à Polynice.
Elles se retrouveront alors seules, ne faisant qu’un (« nous »), face à des milliers de personnes : "des milliers et des milliers [...] grouillant", une masse indissociable et terrible, semblable à un monstre tentaculaire et pour lequel Ismène a la plus grande répugnance, qui les conduira jusqu’au supplice.
Ismène en employant le « nous » s’associe à sa sœur pour mieux souligner le caractère terrifiant des scènes qui se dérouleront inexorablement. Elle essaie d’impressionner Antigone et de la dissuader d’agir en insistant sur le caractère implacable et hostile de la foule "mille bras", "mille visages", "unique regard". Thèbes ne sera plus qu’une seule entité hostile "dans toutes les rues de Thèbes", "dans la ville, une bête qui réclame vengeance.
Ismène emploie volontairement le « nous » pour montrer à Antigone qu’elle est proche d’elle et qu’elle a de l’empathie pour elle.
Les ennemis apparaissent comme une seule et même force guidée par la haine, monstre tentaculaire aux mille bras, mille visages et unique regard. C’est le regard de la haine et du châtiment infligé par des êtres stupides et totalement serviles qui domine.
3/ Ismène emploie le vocabulaire de la bestialité pour mieux insister sur la violence du peuple et des gardes « odeur » « leur regard de bœuf », leur incapacité à éprouver de la pitié.
Ismène les décrit comme des animaux qui ont la tête gonflée, qui ne réfléchissent pas : "regard de bœuf", "têtes d'imbéciles" et comme des êtres grossiers, patauds, qui manquent de délicatesse : "grosses mains lavées", "cols raides".
Ce chemin vers la mort sera d’autant plus terrible qu’il sera marqué par la présence d’une foule bête et hostile, qui ne comprendra pas le geste d’Antigone et sera d’autant plus violente envers elle.
Ismène se sent supérieure au peuple et aux gardes. Elle éprouve du mépris et du dédain pour eux, une véritable répugnance. Ismène incarne à ses yeux la beauté et la noblesse des sentiments alors que le peuple n’est que laideur et grossièreté.
C’est pour elle dès lors d’autant plus insupportable de devenir leur proie et d’être conduite à la mort par ces hommes qu’elle méprise.
4/ le temps dominant dans la deuxième réplique d’Ismène est le futur.
L’emploie du futur renforce l’idée de l’inexorabilité de ce qui va se passer.
Ismène se montre visionnaire.
La souffrance et la mort sont certaines et inéluctables.
La mort ne sera pas belle car elle sera précédée de l’incompréhension et de la haine du peuple « il faudra avancer (..) dans leur odeur et dans leurs rires jusqu’au supplice ».
5/ Pour Ismène, la décision d’Antigone est incompréhensible car elle est contraire à la raison.
Antigone devrait renoncer par peur de souffrir et par amour pour la vie.
Ismène pense qu’en énumérant les étapes qui vont précéder la mort et en ôtant toute beauté à cette mort, elle dissuadera Antigone d’agir.
Elle lui montre que son sacrifice ne sera pas sublimé mais tout au contraire méprisé et incompris car le peuple aura épousé la décision de Créon « ils nous cracheront à la figure ». « Leurs rires jusqu’au supplice »
Constatant que son discours n’a pas le retentissement qu’elle attendait, elle évoque alors l‘envie de vivre. Mais là encore cet argument n’a pas l’effet attendu alors même qu’Antigone est encore plus sensible à la vie qu’Ismène.
Antigone affirme son goût de vivre par des questions oratoires : "Qui se levait la première, le matin, rien que pour sentir l'air froid sur sa peau nue ? Qui se couchait la dernière seulement quand elle n'en pouvait plus de fatigue, pour vivre encore un peu de la nuit ? Qui pleurait déjà toute petite, en pensant qu'il y avait tant de petites bêtes, tant de brins d'herbe dans le pré et qu'on ne pouvait pas tous les prendre ? "
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