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Molière, Le Malade imaginaire, acte I, scène 5, 1673

Commentaire de texte : Molière, Le Malade imaginaire, acte I, scène 5, 1673. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  1 Octobre 2021  •  Commentaire de texte  •  2 015 Mots (9 Pages)  •  1 607 Vues

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Explication linéaire Texte 1 – Molière, Le Malade imaginaire, acte I, scène 5, 1673

                

Premier mouvement : du début à la ligne 26  : annonce du mariage

  • Lignes 1 et 2 : La scène s’ouvre sur une didascalie indiquant qu’Argan s’asseoit avant de parler à sa fille. C’est là la posture d’un homme qui se pense malade mais c’est aussi la posture d’un «dominant» qui s’entretient assis alors que ses interlocuteurs sont debout. L’inégalité des positions est donc tout de suite soulignée. Cette domination est également marquée par l’emploi du déterminant possessif «ma» qui suggère qu’Angélique appartient à son père. Celui-ci sait ménager ses effets et l’emploi du futur proche «je vais vous dire une nouvelle» pour retarder l’annonce de celle-ci ainsi que le fait que c’est une surprise «car peut-être ne (s)’y (attend)-(elle) pas» montre qu’il garde le contrôle de la conversation et entend la mener à son gré. Il finit par faire son annonce : sa fille a été demandée en mariage.
  • Lignes 2 à 5 : La question que pose alors Argan «qu’est-ce là ma fille» est une sorte de didascalie qui montre la réaction d’Angélique à cette annonce : elle rit.  Le lecteur/spectateur sait qu’elle ne peut retenir sa joie, persuadée que cette demande émane de Cléante qui lui avait fait savoir qu’il entreprendrait prochainement cette démarche. Mais son père est lui, sûr que cette joie est juste la manifestation du désir «naturel» d’avoir une relation amoureuse et de se sentir désirée. La répétition du mot «nature» qui suit l’interjection «ah» montre que le père de famille est persuadé que sa sagesse et sa connaissance des hommes lui permettent d’expliquer la réaction de sa fille. C’est un premier décalage comique qui intervient là : il se prend pour un sage mais en réalité il ne comprend rien. Il est déjà ridicule, sans le savoir. Mais il est heureux de la réaction de sa fille qui va dans son sens comme le montre la dernière phrase de sa réplique ; elle lui ôte une épine du pied et il n’aura pas à imposer son choix, pense-t-il.
  • Ligne 6 : la réponse d’Angélique montre qu’en apparence elle se plie à la volonté de son père comme l’y obligeait le jeu des rapports familiaux du XVIIème siècle. Elle est une fille de devoir qui se plie aux ordres de son père. Sa soumission apparente est marquée par l’apostrophe «mon père» et par sa position grammaticale d’objet (COI) dans la dernière proposition.
  • Lignes 7 et 8 : Les trois propositions coordonnées qui constituent la réplique suivante d’Argan sont comiques car la troisième, introduite par la conjonction «et», n’est logique qu’en apparence ; s’il est heureux de la réaction de sa fille et qu’il scelle ainsi son mariage «affaire conclue», il l’avait en réalité déjà promise et n’a donc rien à faire de son accord. La logique aurait voulu qu’il dise : je vais donc vous promettre mais l’emploi du passé composé avec valeur d’action achevée montre que c’est déjà fait. Argan montre ici son vrai visage et lève un voile sur sa personnalité : il est tyrannique et, on va le comprendre, égoïste. C’est déjà la satire sociale qui se construit : Molière dénonce les mariages arrangés et forcés qui sont monnaie courante à son époque.
  • Ligne 9 : Persuadée que son père parle de Cléante, Angélique ne relève pas cette tyrannie et au contraire affecte toujours d’être une bonne fille par les mêmes procédés qu’à sa réplique précédente :  lexique de la soumission et apostrophe en incise. Cette soumion est également suggérée par l’hyperbole «suivre aveuglément toutes vos volonté»
  • Lignes 10 à 12 : Argan fait ici mention d’un nouveau personnage, sa femme, d’un second mariage car elle est «la belle mère» de sa fille Angélique. Il dit qu’il s’est opposé à la volonté de celle-ci, qui voulait placer Angélique et sa sœur Louison au couvent. C’est une pièce du dispositif dramaturgique qui se met en place ici et si le lecteur ne  comprend pas encore ce que Béline a derrière la tête, Toinette, elle, sait déjà de quoi il en retourne comme le montre l’apparté où elle appelle familièrement celle-ci, sa maitresse, «la bonne bête». Le personnage de la servante typique du théâtre de Molière apparaît ici, clairvoyante et franche, tenant tête à ses maitres et leur disant leurs vérités. Cet apparté a aussi pour fonction de créer une connivence avec le public qui est ainsi associé de plus près au spectacle. C’est un procédé caractéristique de la Comédie.
  • Ligne 15 à 17 : Troisième réplique d’Angélique construite sur le même modèle que les deux premières avec l’apostrophe «mon père» en incise qui montre son respect mais ici c’est sa gratitude qu’elle exprime et non plus sa soumission. Même procédé de l’hyperbole avec le déterminant indéfini «toutes» qui exagère la bonté d’Argan.

Toinette que l’on sait du côté d’Angélique dans l’affrontement qui s’annonce intervient dans cette conversation privée, on voit ici encore la place des personnages de servantes et valets chez Molière, en renchérissant sur les remerciements d’Angélique et en félicitant son maitre pour sa sagesse, comme si on lui avait demandé son avis. Chez Molière on ne le leur demande jamais et ils le donnent toujours : dans la sociologie du 17ème siècle, les serviteurs étaient considérés comme faisant partie de la famille, mais Molière leur donne un rôle particulier, un peu celui de fou du roi, et ils sont des pièces maitresses du dispositif dramaturgique. La liberté qu’il prennent, en décalage avec la réalité de leur rôle dans la société, crée une tension comique et participe à la satire : les serviteurs sont souvent bien plus sages que leurs maitres.

  • Les éléments sont en place pour que le quiproquo se développe, on va maintenant parler du mari.

Deuxième mouvement : lignes 18 à 38 : le quiproquo

  • Lignes 18 et 19 : La réplique d’Argan est comique car il avoue qu’il n’a pas rencontré le futur époux et qu’il se fie à des recommandations pour marier sa fille. Pour l’instant celles-ci semblent vagues puisqu’il ne cite pas leur auteur se contentant de l’emploi du pronom indéfini «on». On ne sait donc pas comment il a choisi le futur mari de sa fille et cette question participe de la tension qui trouvera une résolution comique quand il avouera ses critères de choix. Il est persuadé que ce mari conviendra à Angélique mais là encore il n’explique pas cette conviction ; on comprendra qu’en réalité il s’en soucie peu.  
  • Ligne 20 : Angélique toute à son bonheur ne relève pas toutes ces incohérences et perd toute prudence en avouant inconsciement qu’elle connaît ce jeune homme. Molière continue de dresser le portrait d’une jeune femme naïve, indispensable à l’économie de sa dramaturgie.
  • Ligne 21 : Argan laisse percer sa surprise à cet aveu, avec l’interjection « comment » et l’interrogation qui suit.
  • Lignes 22 à 25 : Dans une longue phrase  Angélique se justifie en continuant à jouer son rôle de fille modèle qui ne voudrait pas mentir à son père, et complète son aveu.
  • Lignes 27 et 28 : Avec la réplique suivante d’Argan commence à se faire jour, dans l’esprit du spectateur qu’il y a quelque chose qui ne colle pas. «Ils» ne l’avaient pas prévenu de cette rencontre» et sa surprise nous met la puce à l’oreille. Molière donne ainsi au spectateur sa place privilégiée dans le quiproquo qui s’installe ; celle de celui qui sait alors que les pesronnages sont encore dans la méprise. Le dispositif comique est maintenant en place, on commence à soupçonner qu’Argan et Angélique ne parlent pas de ma même personne.

L’emploi à deux reprises du pronom «ils» qui masque les personnes avec qui Argan s’est arrangé, joue ici son rôle d’écran pour Angélique. Molière sait ménager ses effets et ne dévoile pas trop vite la chute de ce quiproquo. Le père et la fille sont quant à eux encore ingénument sur la même longueur d’onde, Argan balayant même cette incohérence, tout au plaisir que ses projets aillent semble-t-il si bien. Molière insiste sur son contentement par une double locution : «j’en suis bien aise» et «c’est tant mieux».

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