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Lecture linéaire Le savetier et le financier

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Par   •  4 Mai 2022  •  Commentaire de texte  •  1 564 Mots (7 Pages)  •  340 Vues

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Questions préparatoires

  1. Établissez le schéma narratif de l'histoire.
  2. Quelle image avez-vous du Savetier ? Du Financier ? Relevez les groupes de mots qui les désignent. Qu'en concluez-vous ?
  3. Formulez une morale. Celle proposée par La Fontaine est-elle explicite ou implicite ?
  4. Quels sont les différents types de vers employés ?

Lecture linéaire

Dans l’« Avertissement » du deuxième recueil, La Fontaine annonce sa décision de lui « donner un air et un tour un peu différent […] à cause de la différence des sujets. » Nous y constatons, en effet, une présence accrue des humains, inscrits dans leur position sociale, comme dans « Le Savetier et le Financier », où le titre introduit deux catégories du Tiers-État, dans l’ordre de leur importance, le petit artisan, aujourd’hui nommé cordonnier, et le riche bourgeois.

Le portrait des deux protagonistes V.1 à 13

La situation initiale présente les deux personnages, en deux portraits antithétiques, les quatre premiers vers étant consacrés au « Savetier », les neuf suivants au « Financier », longueur qui s’explique à la fois par sa puissance sociale, et parce que c’est lui qui, subissant un manque, prendra ensuite l’initiative pour y remédier.

Le Savetier

Il n’est pas caractérisé par son métier, mais par son chant, avec la reprise lexicale, (« chantait », « en chantant » v.9), sur lequel insiste le narrateur à la fois sur sa durée, « du matin jusqu’au soir », et sur sa qualité, avec un éloge hyperbolique (répétition de « merveilles »v.2-3). Il est amplifié par le pluriel dans l’anaphore du mot qu’allonge la prononciation du [e muet] devant une consonne, et le parallélisme : « merveilles de le voir, / Merveilles de l’entendre ». Le chant induit le bonheur de ce personnage, mis en valeur par le comparatif de supériorité qui le hausse au niveau des « Sept Sages » de l’antiquité.

Le Financier

Le connecteur « au contraire » v.5 souligne d’emblée l’opposition. L’argent est mis en valeur dans son portrait par l’expression « tout cousu d’or », allusion aux broderies chamarrées au fil d’or sur les vêtements des plus riches. L’appellation par périphrase, « homme de finance », confirme cette importance. Même sa plainte,  rapportée au discours indirect, montre à quel point seul l’argent le définit : il ne pense que par rapport à ce qui peut se « vendre » et s’acheter « au marché ».  Son accusation de « la Providence » v.11 est particulièrement indue, car la religion n’a pas pour rôle de favoriser le bien-être du corps sur terre mais le salut de l’âme dans l’au-delà.

Mais, par le participe causal « étant » v.5, le rôle de cet « or » est présenté comme négatif, par les adverbes « Chantait peu, dormait moins encor », et par les trois verbes au cœur d’une rime embrassée : « « sommeillait », « l’éveillait », « se plaignait ». Pour lui, le temps a donc perdu son rythme normal, alternance du jour et de la nuit, et « l’or » l’a rendu acariâtre : il n’accepte aucune limite à sa toute-puissance.

L'enjeu de leur rencontre des vers 14 à 29

Deux conceptions de l'existence

Les deux questions posées par le financier, avec la répétition insistante de « Que gagnez-vous » v.16 et 23, confirment que le matérialisme est la seule valeur sur laquelle se fonde son existence. On le sent hiérarchiquement supérieur car c'est lui qui pose les questions et dirige donc le dialogue a priori. Mais il ne le tient pas finalement car c'est le Savetier qui parle le plus, sans répondre précisément aux questions posées. Cela agace le Financier, ce qu'on peut remarquer par l'interjection « Eh bien » v.23

Ces questions visent à sonder les gains du savetier afin d'acheter son silence.

Par opposition, le Savetier est à présent nommé « le Chanteur », ce qui confirme la volonté de La Fontaine de souligner sa joie : il parle d’« un ton de rieur », est qualifié de « gaillard », plein de force donc et de vigueur. Or, il se contente de « gains […] assez honnêtes », de « tantôt plus, tantôt moins » des réponses de Normand, de vivre simplement, heureux de sa vie, vécue au jour le jour comme le prouvent les indices temporels v.19 à 22. Il y parle d'ailleurs sous forme de dicton, de proverbe, ce qui souligne son bon sens et sa simplicité. V.22

La fable met donc en place un paradoxe : celui qui travaille dur et devrait se plaindre est heureux, contrairement à celui qui peut tout s’acheter, et est sans inquiétude sur son avenir. C’est déjà la leçon de la fable qui ressort, selon le proverbe bien connu : l’argent ne fait pas le bonheur.

Mais comme souvent dans les fables de La Fontaine, une critique de premier plan en masque une seconde, plus discrète, alors même qu’elle fait allusion à la société du temps de l’écriture. Pour la percevoir, il suffit d’observer la répétition qui l’introduit, « le mal »,V.26 accentuée par l’adverbe temporel, « toujours », d’abord à la rime du vers 24, puis repris au vers 29.

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