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La Bruyère: Portrait de Giton

Commentaire d'oeuvre : La Bruyère: Portrait de Giton. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  15 Novembre 2021  •  Commentaire d'oeuvre  •  1 748 Mots (7 Pages)  •  808 Vues

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Voici une *lecture linéaire* du portrait de « *Giton* » issu de la partie VI « Des Biens de fortune » des */Caractères/ *de la *La Bruyère*(VI, 83).

    Giton, introduction

Avec /*Les Caractères*/ (1688-1696), *Jean de La Bruyère* tend à la haute société un miroir *satirique* dépeignant ses vices : amour-propre, hypocrisie, fausseté, ambition personnelle…

Mais le moraliste du XVIIème siècle ne cherche pas à condamner sa société.

Bien qu’il porte un *regard pessimiste* sur la condition humaine, La Bruyère aspire à *corriger les mœurs* par ses maximes et ses portraits plaisants et mondains.

/Les Caractères/ s’inscrit en cela dans le mouvement du *classicisme* qui vise à plaire et instruire. (Voir ma fiche de lecture sur */Les caractères/ de La Bruyère

« *Giton* » (VI, 83) constitue l’avant-dernier portrait de la sixième partie, « *Des Biens de Fortune* » dans laquelle le satiriste dénonce le pouvoir de l’argent.

*Giton* est l’*allégorie des fortunés* se donnant tous les droits sur les autres.

Portrait de Giton, Les Caractères, VI, 83.

      Problématique

Comment le *portrait satirique de Giton*, homme riche et prétentieux, dénonce-t-il la *supériorité de l’argent sur la vertu *dans la société ?

      Annonce du plan linéaire

Dans un premier temps, du début de la remarque 83 à « "/ferme et délibérée/" », La Bruyère dresse le *portrait physique de Giton*, homme en pleine santé.

Puis, dans un deuxième mouvement, de « "/il parle/ » à « /qu’il débite/" », le portraitiste montre comment Giton *domine l’espace social*.

Enfin, dans un troisième mouvement, de « "/S’il s’assied /» à "/« il est riche. »///"//, le satiriste explique l’odieuse personnalité de Giton par sa *richesse*.//"

   I – Le portrait physique de Giton, homme en pleine santé

      (Du début à «"/ferme et délibérée/"»)

Ce caractère constitue en premier lieu un *portrait* au sens pictural du terme, puisque Jean de La Bruyère dépeint un *visage* et une *posture*, comme en témoigne le champ lexical de la *physionomie* ("/« teint », « visage », « joues », « oeil », épaules », estomac », « démarche »/") : « "/Giton a le teint frais, le visage plein et les joues pendantes, l’œil fixe et assuré, les épaules larges, l’estomac haut, la démarche ferme et délibérée. /"»

Les *adjectifs mélioratifs* témoignent d’une *pleine santé*. Il en découle pour Giton une assurance qui se manifeste dans la *solidité* de la posture.

La *parataxe* (juxtaposition de propositions sans mots de liaison) crée un effet d’accumulation qui souligne cette*vigueur*.

    II – L’impolie domination de l’espace social par Giton

      (De « "/il parle/ » à « /qu’il débite/" »)

 Le portrait physique glisse ensuite au *sociologique* quand La bruyère dépeint les *relations* de Giton avec les autres : « "/Il parle avec confiance ; il fait répéter celui qui l’entretient, et il ne goûte que médiocrement tout ce qu’il lui dit./" »

Le *dédain* de Giton à l’égard de ses interlocuteurs est la première remarque dépréciative du portrait. La répétition du *pronom personnel « il » *témoigne de l’*égocentrisme* de Giton, incapable d’un réel échange avec autrui.

Son excès de confiance le mène à une *impolitesse choquante* : «"/Il déploie un ample mouchoir et se mouche avec grand bruit ; il crache fort loin, et il éternue fort haut./"» La répétition de l’*adverbe intensif « fort »* insiste sur la *grossièreté* de cet homme qui répand aussi largement ses paroles que sa salive.

Giton domine donc l’espace social sans respecter la *bienséance* si importante au XVIIème siècle.

Le lecteur peut deviner que Giton est un homme très riche, l’argent étant au cœur de la partie « Des biens de Fortune » des /Caractères/. *L’argent* confèrerait donc aux individus une sorte de *passe-droit* (=privilège) permettant de ne pas respecter les règles de la bonne société.

La Bruyère, en moraliste, dénonce ainsi la corruption d’une société où la *fortune prévaut sur la vertu*.

De plus, la richesse de Giton ne semble *pas le fruit d’un travail* *abondant*, comme le souligne le *parallélisme* avec la répétition du verbe dormir : « "/Il dort le jour, il dort la nuit, et profondément/" ».

L’*antithèse « "/jour »/ « nuit/"« * a en effet *comique* et *animalise* Giton dont la durée du sommeil se rapproche de celle d’un animal.

Le long *adverbe « profondément »*, par ses quatre syllabes, s’oppose à la brièveté des monosyllabes qui le précèdent et restitue la *paresse* de Giton.

Le *présent de l’indicatif* a ici valeur de *vérité générale* : il dépeint un homme à la paresse exemplaire.

La Bruyère, attaché aux principes chrétiens de mérite par le travail, dénonce dans « Des Biens de Fortune » les *fortunes* qui s’érigent *sans efforts*, mais par l’habileté parfois malhonnête d’opérations fiscales et financières.

Et même lorsqu’il dort, Giton *dérange*, puisqu’"/il ronfle en compagnie./"» La société ne se repose donc jamais de lui.

La littérature associe généralement les outrances et l’impudeur aux classes populaires. Or La Bruyère dépeint une société qui détient *à sa tête* des individus d’une*impudeur choquante*.

Cette *domination de l’espace* se manifeste également en société comme en témoigne le*superlatif « plus…que » *: « "/Il occupe à table et à la promenade *plus *de place *qu*’un autre. /"». Par son *embonpoint* et sa *centralité*, Giton incarne une *aristocratie dominatrice*, voire étouffante : « "/Il tient le milieu en se promenant avec ses égaux/".  » Le terme « égaux » est *ironique* ici car Giton écrase ses interlocuteurs en occupant systématiquement le centre.

 Giton commande le*rythme* des promenades : « "/il s’arrête, et l’on s’arrête ; il continue de marcher, et l’on marche. /"» Les *parallélismes syntaxiques*, avec la *répétition des verbes* « arrêter » et « marcher », montrent le fonctionnement d’une société où *l’aristocratie dicte tout *: « "/tous se règlent sur lui/" ».

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