L’Epitaphe Villon ou Ballade des pendus
Commentaire d'oeuvre : L’Epitaphe Villon ou Ballade des pendus. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Mathilde Just • 12 Mai 2019 • Commentaire d'oeuvre • 1 821 Mots (8 Pages) • 1 070 Vues
François VILLON, L’Epitaphe Villon ou Ballade des pendus (vers 1463, publiée en 1489)
Manuel p. 232-233
VILLON : biographie p. 516 du manuel. Beaucoup d’incertitudes sur ce poète. On s’accorde à penser qu’il s’agit de François de Montcorbier, né à Paris en 1431. On ignore le lieu et la date de sa mort, (après 1463). Né dans une famille modeste, orphelin de père très tôt, pris en charge par Guillaume de Villon, chapelain à Paris, qui s’occupe de son éducation. Etudes brillantes à l’université de la Sorbonne mais vie agitée : rixes, tue un prêtre, vol en bande… Il quitte Paris plusieurs fois, fait de la prison… Il finit par être condamné à être pendu pour avoir blessé le notaire Ferrebouc… Mais il fait appel, échappe à cette peine en échange du bannissement ; il disparaît définitivement.
Ses œuvres sont imprimées pour la 1ère fois en 1489 : succès. On le lit encore au début du XVIe siècle, puis il sombre dans l’oubli jusqu’au XIXe siècle où son originalité, son image de mauvais garçon bousculant la poésie courtoise de son temps plaît à nouveau. (Sa légende peut faire penser à celle de Rimbaud, autre trublion qui a brusquement « déserté » la poésie lui aussi).
NB : ce poème n’a pas de titre. Lors de sa publication au XVIe siècle, Clément Marot lui a donné le titre « Epitaphe en forme de ballade que fit Villon pour lui et ses compagnons, s’attendant à être pendu avec eux », abrégé en « Epitaphe Villon ». (Une épitaphe est un court texte inscrit sur une tombe à la mémoire du défunt, dont on parle à la 3e personne, en général). On l’appelle aussi couramment « Ballade des pendus », qui lui convient peut-être mieux en raison de l’énonciation.
Le genre de la BALLADE : vient de baller qui voulait dire « danser », inventé au XIIIe s. en France. Se pratiquait lors des fêtes de cour, à l’occasion de jeux poétiques qu’affectionnait Charles d’Orléans, prince poète (1394-1465), qui a rencontré Villon en 1458. Genre lyrique, thèmes religieux ou amoureux…
Genre fixe : trois strophes « carrées » (même nombre de syllabes dans chaque vers et de vers dans chaque strophes) suivies d’un envoi qui nomme le dédicataire du poème (svt un prince qui préside le tournoi de poésie). Chaque strophe se termine par un refrain répété. Les strophes sont construites sur le même schéma de rimes et l’envoi correspond à la 2e moitié d’une strophe.
La petite ballade => trois huitains d’octosyllabes suivis d’un quatrain.
La grande ballade => trois dizains de décasyllabes suivis d’un quintil.
NB : ce genre a été délaissé par les poètes de la Pléiade, et jamais remis à la mode. Parfois reprise de manière originale (sans respect des contraintes formelles) comme par Aragon : « Ballade de celui qui chanta dans les supplices » en 1943.
Analysons ce poème à travers trois questions qui pourraient être posées lors de l’épreuve orale.
Question 1/ En quoi ce poème reprend-il le genre de la ballade, mais de manière originale ?
I ●ce poème est conforme aux contraintes formelles de la grande ballade. Schéma des rimes dans les 3 strophes : ABABB/CCDCD (en miroir) et dans l’envoi : CCDCD. Multiplication des effets musicaux :
- le refrain est répété v. 10, 20, 30, 35,
- disposition des rimes en miroir avec la voyelle [i] présente dans les rimes féminines et masculines. Les sonorités à la rime [i] et [é] se retrouvent aussi souvent à l’intérieur des vers, surtout à la 1e et 3e strophe.
- répétition de mots comme « frères » v. 1 et 11 et « humains » / « hommes » v. 1 et 34
- NB : la césure est à la 4e ou à la 6e syllabe dans le décasyllabe. Rythme répété 4//6 (v. 1, 2) ou 6//4 (v. 3, 4). Parfois le rythme est plus irrégulier pour exprimer qqch (v. 8…)
II ● Mais on trouve une association étonnante et paradoxale entre la légèreté de la forme et la gravité du contenu (l’évocation macabre des pendus n’est pas spécialement considérée comme un divertissement) : Villon aime inverser les valeurs et provoquer.
=> cf. question 3 (I)
Question 2/ En quoi ce poème est-il une prière poétique ?
NB : bien tenir compte des deux mots clés de la question mais sans consacrer une partie à chaque.
I ● Un appel à la miséricorde des hommes et de Dieu
- Qui demande à qui ? l’énonciation : « nous » répété (v. 1, 2, 3, 5…) = le groupe des pendus. 1ère pers. du pl. qui donne plus de force au poème (le je n’apparaît pas)
« vous » (v. 4, 11, 13…) = tous les hommes qui leur survivent… même le lecteur du XXIe s ! 2e pers du pl. Apostrophe v.1 « Frères humains » : appel à la fraternité humaine, universalité de la condition humaine.
« Prince Jésus » v. 31 (annoncé par la périphrase du v. 16): le dernier destinataire est celui-là même qui a le pouvoir de pardonner. (cf. 2e partie du vers). Donc évolution de la prière dans l’envoi.
- Que demandent-ils ? Qu’on intercède pour eux auprès de Dieu (phrase exclamative répétée ds le refrain)
. impératifs (v. 2, 10 le refrain, 11, 15, 29) et subjonctifs d’ordre (v. 9, 17, 19)
. champ lexical de la miséricorde (terme à expliquer : c’est éprouver de la pitié qui pousse à pardonner à un coupable) : pitié v. 3, merci v. 4 qui rime avec un terme de sens contraire endurcis v. 2, absoudre ds le refrain, grâce v. 17
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