L’EPITAPHE VILLON ou Ballade des pendus
Cours : L’EPITAPHE VILLON ou Ballade des pendus. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar jadebnk • 3 Novembre 2019 • Cours • 3 022 Mots (13 Pages) • 983 Vues
L’EPITAPHE VILLON ou Ballade des pendus
Les indications entre parenthèses sont des explications.
Introduction : la mienne est trop longue, mais cela vous permet de mieux comprendre la suite
Les corps se balançant au gibet sont un spectacle que chacun peut contempler au MA (= Moyen Âge). A Paris, le plus important gibet est celui de Montfaucon, sur la route de Pantin, où les pendus se comptent parfois par dizaines. On en trouve également aux sorties des quatre portes principales de la capitale. (= entrée en matière) Ainsi, ce sont des pendus, des suppliciés exposés devant la communauté, que décrit Villon dans son poème La Ballade des pendus, Villon, dont la vie aventureuse, les démêlés avec la justice, le génie et la mystérieuse disparition en 1463 font la première figure du poète maudit. Le poème, dont le titre complet est « L’Epitaphe en forme de ballade que fit Villon pour lui et ses compagnons, s’attendant à être pendu avec eux », est également connu sous le nom d’Epitaphe Villon (=l’épitaphe étant une inscription sur une tombe). Il est souvent dit que le poème, autobiographique, aurait été écrit à l’ombre de la potence, dans la prison du Châtelet alors que François Villon vient d’être condamné à mort pour avoir participé à une bagarre où a été tué le notaire pontifical. Le poète fait appel et le jugement est cassé par le Parlement de Paris. Sa peine est commuée en un bannissement de dix ans. Il s’agit d’un poème à forme fixe, la ballade, forme très prisée au MA. C’est une « grande ballade » (du verbe « ballare » = danser) en trois strophes dites « carrées » constituées de trois dizains de décasyllabes, suivies d’un quintil. L’envoi est particulier ici car il n’est pas adressé à un prince quelconque mais à Jésus. Le refrain condense le sens général du poème, puisqu’il s’agit d’une prière. (= présentation de l’auteur, du texte). Comment Françoise Villon exploite-t-il le genre traditionnel de la prière des défunts pour faire de sa ballade un discours délibératif à portée universelle ? (= question d’interprétation) Nous montrerons dans un premier temps en quoi ce texte est sous la forme d’une prière conventionnelle, puis nous démontrerons son efficacité, et enfin nous expliquerons en quoi ce texte formule une leçon adressée à l’humanité. (= annonce du plan)
I/ Une prière conventionnelle pour éviter l’Enfer et la damnation (= il faut rédiger, donc intégrer ce titre à une phrase ; évidemment, le jour de l’épreuve, il faudrait aller beaucoup plus vite à l’essentiel)
- Un champ lexical attendu (= idem, il faut faire des phrases avec des verbes et intégrer vos citations à vos propos)
- « grâce », « pitié », « mercis », « âme »
- « Dieu », « Vierge Marie », « Jésus »
- « Enfer », « infernale foudre »
- Verbes « priez », « absoudre »
- Ce champ lexical rappelle la domination de l’homme par l’Eglise au XIVème siècle, et la crainte qu’elle peut inspirer.
- On note également des références à la Bible avec la cendre (= passage de la Genèse : « car tu es poussière et tu retourneras à la poussière »)
- Les éléments constitutifs d’une prière
A/ Les demandeurs
- Pas de JE mais omniprésence du pronom NOUS dès le début du poème : « qui après nous vivez », « contre nous endurci », « de nous pauvres ». Qui est ce « nous » ? Le locuteur est surprenant et est dévoilé progressivement.
- Une identité originale : le titre nous indique qu’il s’agit des « pendus » et de leurs « os », donc de repris de justices, condamnés pour leurs crimes, et donc morts par pendaison : « fûmes occis / par justice », « sommes transis », « nous sommes morts », « et nous, les os » = PROSOPOPEE
- Mais ce NOUS pose problème : le poète (pendu) + les autres pendus ? Que désigne le NOUS dans le refrain « Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre » ? Ici, il s’agit des pendus mais peut-être aussi de l’ensemble des hommes (« tous nous ») = MOUVEMENT D’ELARGISSEMENT QUI REUNIT LES DEMANDEURS ET LES DESTINATAIRES
B/ Les destinataires, qui sont également des intercesseurs qui doivent à leur tour prier
- L’interlocuteur est présent dès le début :
- Apostrophe « Frères humains » + « Si frères vous clamons », repris par le pronom VOUS : « de vous mercis », « vous nous voyez », « vous savez »
- Apostrophe « Hommes » au vers 34
- Mais système énonciatif complexe car plusieurs destinataires sont clairement énoncés, qui ne sont finalement que des intercesseurs :
- Envoi « Prince Jésus […] / Garde qu’Enfer n’ait de nous seigneurie ». Jésus est déjà évoqué dans la deuxième strophe : « Envers le fils de la Vierge Marie / Que sa grâce ne soit pour nous tarie »
- C’est le refrain qui révèle le vrai destinataire :
- « priez Dieu que tous nous veuille absoudre »
- Au Moyen Age, c’est une habitude de multiplier les intercessions auprès de Dieu en priant le Christ, mais aussi la Vierge, les Saints… C’est ce que le protestantisme condamnera.
- Un mouvement ascendant anime le poème par le choix des dédicataires : les hommes, puis Marie et Jésus, sont les intercesseurs entre les morts et Dieu = dynamique verticale
C/Le contenu de la prière (= donc texte injonctif)
- Comme dans toute prière, on relève de fréquents impératifs et subjonctifs, qui indiquent le contenu de la prière :
- Obtenir la pitié des hommes : « n’ayez les cœurs contre nous endurcis », « si pitié de nous pauvres avez »
- Ne pas être un objet de moquerie : « De notre mal personne ne s’en rie »
- Ne pas être un objet de dédain : « pas n’en devez / Avoir dédain »
- Que les vivants n’intègrent pas le groupe des proscrits
- Finalement, c’est l’impératif du refrain « priez Dieu » qui nous dévoile la véritable requête, le destinataire doit prier Dieu ; la subordonnée conjonctive COD au subjonctif « que tous nous veuille absoudre » précise le contenu de cette prière = ainsi, les pendus prient les destinataires de prier pour eux, d’être leurs intercesseurs, afin que leur âme, sans doute au purgatoire, puissent obtenir leur salut et éviter l’enfer (= mise en abyme car prière qui demande de prier)
- Texte qui appartient au genre délibératif puisque les pendus exhortent les vivants à prier, et les dissuadent de les mépriser et de se moquer d’eux.
- Une prière qui prend en compte les croyances de l’époque afin d’être efficace
A/ La crainte de l’Enfer
- Cette crainte de l’Enfer scande toute la ballade : elle est d’abord présente dans le refrain « Mais priez Dieu que tous nous veuille absoudre ». L’enfer est également évoqué dans la seconde strophe par la métonymie (vers 15 à 18) : « Que sa grâce ns soit pour nous tarie, / Nous préservant de l’infernale foudre ». Dans le refrain, c’est la grâce de Dieu qui est souhaitée, ici, c’est celle du « fils de la Vierge Marie ». Le verbe « absoudre » est synonyme de « préserver de l’infernale foudre », et le choix de la rime en « oudre », rime rare mais privilégiée dans cette ballade, met en évidence cette répétition. Enfin, l’enfer est à nouveau évoqué dans l’envoi : « Garde qu’Enfer n’ait de nous seigneurie ; / A lui n’avons que faire ni que soudre ».
B/ Le Purgatoire, une étape intermédiaire :
- Le Purgatoire n’est pas nommé, mais il est sous-entendu. C’est un monde intermédiaire entre Enfer et Paradis, inventé par l’Eglise pour ceux qui ne sont ni tout à fait mauvais (qui vont directement en Enfer), ni tout à fait bons (qui vont directement au Paradis).
- Le Goff dans La Naissance du Purgatoire, pense que la notion est apparue en même temps que le mot, donc au XIIème siècle. Dès 1254, l’Eglise propose une définition de « ce lieu du milieu, où sont punis ceux qui n’ont pas fait pénitence ici-bas ». Devenu dogme en 1439, ce Purgatoire a donc une dimension expiatoire et permet d’éviter l’Enfer, donc de ne pas faire partie des damnés. Pour ceux qui n’ont pas eu une vie exemplaire, il représente l’espoir d’un accès au Paradis éternel.
C/ La nécessaire intercession des vivants
- Le temps passé au Purgatoire entre le premier jugement au moment de la mort et le jugement dernier peut être plus ou moins long, mais il peut être raccourci grâce aux prières des vivants.
- Dans notre poème, si les vivants n’ont pas pitié des pendus, si Dieu ne leur fait pas grâce, ils iront en Enfer. Le chiasme des vers 3 et 4 souligne que si les hommes montrent de la compassion envers les pendus, Dieu se montrera miséricordieux à leur égard quand le moment sera venu : DONC PRIER POUR AUTRUI, C’EST AUSSI PRIER POUR SOI, c’est travailler à son propre salut. La prière prend donc tout son sens et profitera à la fois aux pendus et aux « frères humains ».
Donc, cette prière, qui prie le destinataire de prier Dieu, repose sur une argumentation efficace et fait de cette ballade un texte appartenant au genre délibératif. A part la mise en abyme, quels sont les moyens de cette efficacité ?
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