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Est-ce que les personnages de Juste la fin du monde parlent pour ne rien dire?

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Par   •  30 Mai 2022  •  Dissertation  •  1 400 Mots (6 Pages)  •  614 Vues

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1. Les personnages ne disent pas ce qui leur tient à cœur car ils ne savent pas s’exprimer

a. Les personnages s’expriment en banalités

Les paroles de Juste la fin du monde regorgent de banalités. Louis étant un étranger, il semble que les membres de la famille cherchent à compenser ses années d’absence en les lui narrant, ou alors restent dans la gêne et la politesse qu’on destine à un inconnu.

C’est ainsi que la première scène de la pièce (scène 1 partie 1) nous donne à voir une famille réunie, échangeant des platitudes sur le voyage de Louis et des formules de politesse. Louis déclare, en réponse à la question de sa mère, aller bien, et pose la même question à son frère. Antoine lui répond: “Je vais bien. Toi, tu vas bien?”, une question à laquelle Louis avait déjà répondu. Ce dernier lui répond tout de même “Je vais bien” une nouvelle fois. Dans cet échange et celui des présentations qui le précède, rien d’essentiel n’est dit et le sujet du départ de Louis est habilement évité.

De plus, dans la deuxième partie scène de la partie 1, Catherine amorce une longue description volubile de sa progéniture. Ce sujet peut nous sembler sans grand intérêt, et Antoine lui en fait la remarque “Laisse ça, ça ne l’intéresse pas” au sujet de Louis.

Enfin, la Mère évoque avec nostalgie les dimanches d’antan, dans la scène 4 de la partie 1. La famille avait en effet l’habitude de se réunir autour d’une promenade et d’un pique-nique, une tradition qui enchantait la Mère. Elle semble se perdre dans les détails de ce récit, comme la couleur de leur voiture ou les mets préparés (“une salade avec du thon” et des “œufs durs”).

Il apparaît donc que les personnages s’expriment, mais rarement pour dire ce qu’il leur tient réellement à cœur, et optent plutôt pour la facilité dans la banalité.

b. La parole se communique très mal

Mais si les paroles nous semblent vides de sens, c’est également car les personnages n’arrivent pas à les énoncer clairement. On les voit face à un échec du langage, car celui-ci ne leur permet pas de traduire leurs pensées les plus profondes. Chaque prise de parole, ponctuée par des épanorthoses et polyptotes, nous apparaît comme une micro-crise en elle-même. Catherine, par exemple, se reprend sans arrêt dans sa réplique de la scène 2 partie 1, ou elle ne fait pourtant que parler de ses enfants.

Même lorsque la parole est extériorisée, elle est souvent caractérisée par sa velléité: les personnages évoquent ce qu’ils devraient ou aimeraient dire, sans jamais oser le faire. Louis, notamment, prononce souvent des paroles en l’air: “Je souhaite, quant à moi, ce que je souhaitais..” à Catherine, dans la scène 6 de la partie 1.

Et de la velléité de la parole au mensonge, il n’y a d’ailleurs qu’un pas. La Mère incite Louis à mentir à son frère et sa sœur dans la scène 8 partie 1, affirmant que “qu’est-ce que ca fait un mensonge? juste une promesse qu’on fait en sachant par avance qu’on ne la tiendra pas”.

On assiste à une véritable crise de la communication.

c. L’enjeu principal de la pièce (la mort de Louis) n’est jamais prononcé

Enfin, l’enjeu principal de la pièce, la mort prochaine de Louis, ne sera jamais avoué.

La pièce débute avec un monologue de Louis, qui confie au public par le principe de la double énonciation son projet de “retourner les voir, revenir sur ses pas, aller sur ses traces et faire le voyage” dans le but de “dire, seulement dire, sa mort prochaine et irrémédiable”. Mais cette courageuse résolution ne sera jamais menée à bout, et la pièce se solde par le départ d’un Louis qui n’a toujours rien dit: “sans avoir rien dit de ce qui me tenait à cœur/sans avoir jamais osé faire tout ce mal/je repris la route”.

On peut donc affirmer que les paroles dans la pièce ne remplissent pas leur fonction: la pièce, une longue succession de soliloques, s’achève par la victoire du silence dans l’aphasie de Louis. Même si maintes occasions se présentent pour l’aveu de ce dernier, il ne prend jamais la parole.

L’épilogue nous montre donc le cri final, teinté de regret, d’un individu n’ayant jamais eu la force de s’exprimer. Ce “grand

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