Don Juan, l'homme du perpétuel présent

Dissertation 3

« Dom Juan, l’homme du perpétuel présent »

Dom Juan, en tant que libertin, a renoncé à Dieu et donc au paradis. L’unique chose qui lui reste est sa courte vie terrestre et il va donc tout faire pour la vivre intensément. Il ne vit que dans le présent et ne se concentre ni sur le passé ni sur l’avenir. De ce fait, il rejette l’ensemble de la société : la famille, l’Eglise… Les femmes qu’il séduit ne sont qu’un moyen pour lui d’exister aux yeux des autres. Après tout, on ne vit que par et à travers le regard des autres, il faut une immense force de caractère pour exister par soi-même.

Le séducteur compulsif qu’est Dom Juan ne s’intéresse qu’à la conquête pour la conquête, il ne désire qu’entendre une seule parole des dames qu’il séduit : « Je t’aime ». Cette courte phrase le fait vivre et repousse illusoirement l’échéance de la mort. D’ailleurs Dom Juan ne parle jamais de la pure satisfaction de l’instinct, on voit qu’il ne désire qu’exister à travers le regard des femmes qu’il séduit. Mais les attentes que ces amoureuses espèrent du séducteur ne pourront jamais se réaliser car elles sont liées au futur, Dom Juan, lui, ne vit que dans le présent, il ne s’intéresse pas à l’avenir.

Une des caractéristiques principales de la pièce est la vitesse d’action. Il improvise à une vitesse phénoménale : une fille apparaît, puis une autre et il les séduit l’une après l’autre jusque la déclaration finale du « je vous aime ». Il promet le mariage puis s’en va voir ailleurs. On aperçoit aussi cette rapidité lorsqu’il déclare à Charlotte « C’est un effet de votre grande beauté et l’on vous aime autant en un quart d’heure qu’on ferait une autre en six mois ». Cette vitesse donne à Dom Juan un sentiment illusoire de contrôle sur sa propre vie : il croit ainsi remettre en cause sa finitude.

Dom Juan apparaît comme un matérialiste issu de la philosophie des Lumières. Il est très terre à terre (« deux et deux sont quatre ») et remet en question la toute-puissance de Dieu et du domaine du surnaturel. Il mise sur l’impuissance divine (« le ciel n’est pas si exact que tu penses ») et défie Le Seigneur en permanence. Il ne se contente pas de séduire beaucoup de femmes mais il aggrave ses actes par le sacrilège : il sort Elvire du couvent et séduit Charlotte qui était alors fiancée. L’affrontement entre le héros et les forces devient donc dès lors inéluctable.

Le héros devra faire face à deux acteurs majeurs : les femmes qu’il a habilement trompées et qui réclament leur dû et la Mort qui vient mettre fin à l’inconstance du séducteur. Cet homme, ayant renié toute foi envers Dieu, est livré au seul présent, ne connaissant ni avenir ni passé. De ce fait, il n’y a strictement aucune chance qu’il tienne ses promesses car il les a déjà oubliées puisqu’elles font partie du passé. Le mode de vie du héros fait que tout ce qu’il peut offrir est du domaine de l’instantané. Il ne peut donc pas comprendre la demande de durée et de continuité implorée par celles qu’il a trompées. Elvire joue donc un rôle essentiel : elle est celle qui a le plus le droit de demander le maintien des engagements du séducteur. L’épouse demande le repentir, ce qui

...