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Dissertation - Modernité poétique

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Par   •  21 Janvier 2021  •  Dissertation  •  1 652 Mots (7 Pages)  •  4 152 Vues

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Dissertation sur la modernité poétique :

« On ne peut transporter partout avec soi le cadavre de son père […] Mais nos pieds ne se détachent qu’en vain du sol qui contient les morts. »    Cette réflexion d’Apollinaire vous permet-elle de définir la modernité poétique ?

        Dans son essai sur Les Peintres cubistes, Apollinaire écrit qu’« on ne peut transporter partout avec soi le cadavre de son père », mais il ajoute que « nos pieds ne se détachent qu'en vain du sol qui contient les morts. » Il entend par là que l’artiste doit se démarquer des ses prédécesseurs, qu’il doit renouveler l’expression artistique ; mais, dans le même temps, il affirme aussi qu’un créateur s’inscrit toujours dans un héritage.

        Cette réflexion sur la peinture cubiste s’applique tout autant à la poésie moderne.

        Certes, cette poésie est un renouvellement des sujets, du travail sur le vers et de la forme du poème ; mais elle a aussi hérité de la poésie classique son lyrisme, bien des éléments de sa forme poétique et sa conception du poète.

        Les poètes, depuis le XIXème siècle, ont recherché la modernité poétique, que ce soit dans leurs sujets, leurs vers ou de nouvelles formes poétiques.

        Ils ont, en premier lieu, trouvé de nouveaux sujets, empruntés notamment au quotidien, jusqu’alors négligé par la poésie. Francis Ponge, par exemple, dans Le Parti pris des choses, s’intéresse aux aliments et consacre des poèmes à « l’huître », au « pain », à « la pomme de terre ». De même, le poème liminaire d’Alcools d’Apollinaire, « Zone » est une revendication de modernité qui évoque la « Tour Eiffel », les « automobiles » ou les « usines ». Rimbaud, quant à lui, situe son poème « Rêvé pour l’hiver » dans le wagon d’un train. Ainsi, en poésie comme en peinture, la vie moderne, la ville moderne, la banalité du quotidien deviennent des sujets pour les artistes.

        Les poètes modernes inventent aussi un vers nouveau, plus libre, dégagé du carcan métrique classique. Le vers n’est plus une unité contraignante. Déjà Victor Hugo avait cassé l’alexandrin classique ; à sa suite, les poètes de la fin du XIXème, du XXème et du XXIème recourent fréquemment aux enjambements et aux rejets, ce qui renouvelle la lecture du poème. C’est ainsi qu’Apollinaire, en écrivant dans « La Chanson du Mal-Aimé » : « Un voyou qui ressemblait à / Mon amour vint à ma rencontre », traduit bien l’illusion et la déception de la fausse rencontre. Par ailleurs, la longueur du vers peut être irrégulière, parfois en alexandrin, parfois en octosyllabe ou en décasyllabe, vers pair ou impair. La rime n’est plus une nécessité et les assonnances peuvent la remplacer, comme dans « Zone » où « sténo-dactylographes » rime avec « passent ». Dans certains poèmes, elle disparaît totalement, tout comme la ponctuation, qu’Apollinaire, par exemple, supprime au moment de publier son recueil Alcools, offrant, là encore, de nouvelles possibilités de lecture. Les poètes modernes ont donc aussi libéré le vers.

        De même, ils inventé de nouvelles formes poétiques. Le poème n’est plus nécessairement un ensemble de strophes. Certains poèmes ne sont constitués que d’une seule strophe, comme  « Vivante et morte séparée » d’Eluard. Cette strophe peut même se limiter à un seul vers, comme dans « Chantre » d’Apollinaire : « Et l'unique cordeau des trompettes marines ». Le vers peut aussi céder la place à la prose, comme c’est le cas dans Gaspard de la nuit d’Aloysius Bertrand ou dans Le Spleen de Paris de Baudelaire. La recherche poétique s’oriente alors vers une langue nouvelle où la prose devient poétique. Les artistes renouvellent également la mise en page de leur poème. C’est ainsi que Paul Eluard traduit l’éclatement de sa vie à la mort de sa femme par l’éclatement de trois vers décalés, au centre de son recueil Le Temps déborde :         « Nous ne vieillirons pas ensemble

                                                Voici le jour        

                                                        En trop : le temps déborde. »

La forme poétique peut aussi se rapprocher du dessin et se faire Calligrammes, comme chez Apollinaire. On peut ainsi mesurer à quel point les poètes modernes ont innové.

        Cependant, toute cette recherche de modernité poétique dans les sujets, le vers et la forme même du texte poétique ne signifie pas que les poètes ont totalement oublié leur héritage poétique. Comme l’écrit Apollinaire, ils ne sont pas des « destructeur(s) », mais des « bâtisseur(s) » et c’est sur le « sol qui contient les morts » qu’ils ont bâti la poésie moderne.

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