Jean Jacques Rousseau
Cours : Jean Jacques Rousseau. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar saiddooh • 24 Octobre 2013 • Cours • 776 Mots (4 Pages) • 800 Vues
C'est à toi que je m'adresse, tendre et prévoyante mère *, qui sus t'écarter de la
grande route, et garantir l'arbrisseau naissant du choc des opinions humaines! Cultive,
arrose la jeune plante avant qu'elle meure : ses fruits feront un jour tes délices. Forme
de bonne heure une enceinte autour de l'âme de ton enfant ; un autre en peut marquer
le circuit, mais toi seule y dois poser la barrière †.
On façonne les plantes par la culture, et les hommes par l'éducation. Si l'homme
naissait grand et fort, sa taille et sa force lui seraient inutiles jusqu'à ce qu'il eût appris
à s'en servir ; elles lui seraient préjudiciables, en empêchant les autres de songer à
l'assister ‡ ; et, abandonné à lui-même, il mourrait de misère avant d'avoir connu ses
besoins. On se plaint de l'état de l'enfance ; on ne voit pas que la race humaine eût
péri, si l'homme n'eût commencé par être enfant.
Nous naissons faibles, nous avons besoin de force ; nous naissons dépourvus de
tout, nous avons besoin d'assistance ; nous naissons stupides, nous avons besoin de
jugement. Tout ce que nous n'avons pas à notre naissance et dont nous avons besoin
étant grands, nous est donné par l'éducation.
Cette éducation nous vient de la nature, ou des hommes ou des choses. Le développement
interne de nos facultés et de nos organes est l'éducation de la nature ;
l'usage qu'on nous apprend à faire de ce développement est l'éducation des hommes ;
et l'acquis de notre propre expérience sur les objets qui nous affectent est l'éducation
des choses.
Chacun de nous est donc formé par trois sortes de maîtres. Le disciple dans lequel
leurs diverses leçons se contrarient est mal élevé, et ne sera jamais d'accord avec luimême
; celui dans lequel elles tombent toutes sur les mêmes points, et tendent aux
mêmes fins, va seul à son but et vit conséquemment. Celui-là seul est bien élevé.
* La première éducation est celle qui importe le plus, et cette première éducation appartient
incontestablement aux femmes - si l'Auteur de la nature eût voulu qu'elle appartînt aux hommes, il
leur eût donné du lait pour nourrir les enfants. Parlez donc toujours aux femmes par préférence
dans vos traités d'éducation ; car, outre qu'elles sont à portée d'y veiller de plus près que les
hommes, et qu'elles y influent
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