Fiche de lecture Livre « Les naufrages avec les clochards de Paris » Declerck, Patrick

Fiche de lecture Livre « Les naufrages avec les clochards de Paris » Declerck, Patrick

Patrick Declercq, né le 18 novembre 1953 en Belgique, a fait des études aux Etats Unis. Puis s’est installé à Paris en 1981. Philosophe de formation, docteur en anthropologie il est psychanalyste membre affilié de la Société Psychanalytique de Paris. Il a publié divers articles ethnologiques et psychanalytiques sur la désocialisation, l'errance et l'alcoolisme dans des revues telles que Les Temps modernes ou Esprit". Il a ouvert la première consultation d'écoute destinée aux SDF en France. Après l’écriture « les naufragés » l’auteur a écrit "Socrate dans la nuit" roman autobiographique en 2008, puis a publié "Démons me turlupinant" en 2012 chez Gallimard dans lequel il raconte son histoire familiale.

Le livre « les naufragés avec les clochards de Paris » nous livre 15 ans de travail d’observation, de consultations psychiatriques au Centre d’Accueil et de Soins Hospitaliers de Nanterre et d’immersions auprès des clochards « dans la rue, dans les centres d’hébergements, à l’hôpital » (p11). Patrick DECLERCK n’a pas seulement observé les clochards, il a expérimenté leur condition de vie en passant une nuit incognito au Centre de Nanterre avec un « déguisement » du clochard. Le langage est très cru « Puanteur, tentative de viol, violence et saleté indescriptible » pour décrire ce qu’est une nuit à Nanterre.

L’auteur nous livre les difficultés de la rencontre avec les clochards et ne cache pas ses sentiments à les côtoyer. Il évoque sa répulsion, son dégout. Il avoue sa trouille quand il s’est immergé pour se faire ramasser par la police (p44). Cet ouvrage a été écrit sur 8 ans et publié par Jean Malaurie dans la collection Terre Humaine en septembre 2001 et a reçu les prix France Télévision des Essais en 2002.

L’auteur intitule son livre les « naufragés - avec les clochards de Paris » pour résumer l’objet de son livre. Naufragés fait référence aux personnes ivres sur les bâteaux qui s’échouent et finissent par couler. Il utilise le mot « clochard » car il « faut bien leur donner un nom » dit-il (p12). « 60.000 à 135.000 personnes relèveraient pro ou pour des phénomènes de clochardisation » (p22).

L’auteur les qualifie de « noyau dur » autour duquel gravite une population plus instable comme les prostitués, les toxicomanes, les « jeunes en dérive ». Les clochards sont les personnes les plus désocialisées qui vivent dans la pauvreté et se sont dissociés de leurs corps.

Résumé de l’ouvrage en tant que tel (linéaire ou thématique chaque partie traite d’un grand thème)

L’ouvrage comprend deux parties, intitulées « Routes » (p 21 à 270) et « Cartes » (p285 à 319). Il est illustré grâce à des reproductions de documents et de tableaux ainsi que par des photos prises par l'auteur ou des croquis qu'il dessine également lui-même.

La première partie « Routes » donne des témoignages et des explications cliniques de la vie des clochards mais aussi le ressenti de l’auteur.

La deuxième partie « Cartes » est une analyse plus psychanalytique qui évoque la grande désocialisation de ces personnes qui s’auto-détruisent allant jusqu’à la négation d’elles-mêmes. Il y a aussi une réflexion critique sur la relation « aidant-soigné » dont l’objectif d’insertion est inadaptée pour ces personnes désocialisées.

A la suite, en annexes on trouve l’historique et l’organisation du Centre d’accueil et de soins hospitaliers de Nanterre. Des statistiques sur la pauvreté en France et en Europe (jusqu’en 2001). Puis, une enquête sur les pathologies médicales et psychanalytiques des personnes sans abri.

Les clochards ne constituent pas une société clairement et distinctement identifiable comme telle. Par ce terme, Patrick Declerck désigne "les plus gravement atteints parmi les SDF." p286

Comment l’auteur explique le processus de clochardisation ? « il est indéniable qua la pauvreté joue un grand rôle dans la vie des clochards ; l’immense majorité est issue du sous-prolétariat rural ou urbain » (p 286). Mais l’auteur ne retient pas que cette dimension socio-économique : il ajoute « la pauvreté et l’exclusion sociale sont insuffisantes à rendre compte de leur existence ».  

Parmi les clochards, il y a des gens issus de « toutes catégories sociales ». Si l’on s’en tenait qu’à la dimension socio-économique, il suffiratit que les personnes demandent des aides et pourrait ainsi retrouver un « fonctionnement plus normal » (p286). Or, il n’en est rien  (Declerck 2001 : 286). La clochardisation est un processus multifactoriel des effets économiques, sociaux, familiaux et culturelles ainsi que des facteurs de pathologies individuelles le plus souvent psychiatriques dont l’alcoolisme, la psychose majorés par la vie à la rue (p288). Une approche clinique est nécessaire pour mieux comprendre la clochardisation. Dans les constantes de la clinique il explique que l’on retrouve 3 constantes dans la clochardisation : La première serait le dysfonctionnement précoce de l’enfant, la seconde l’accumulation de traumatismes physiques et / ou psychiques et la troisième, l’alcoolo-tabagisme. L’enfance a souvent été marquée par des traumatismes souvent traumatisée par la violence, le viol, la mort d’un parent, l’alcoolisme d’un parent. Cette fragilité acquise dans l’enfance les suit toute leur vie et même si à une certaine période ils paraissent insérés socialement, il suffit d’un divorce, d’une perte d’emploi ou de logement pour qu’il bascule en quelques jours dans la rue et la désocialisation p304

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