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Dissertation sur le Bien et le Mal

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Par   •  8 Janvier 2014  •  2 174 Mots (9 Pages)  •  1 682 Vues

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« Il n'y a que le méchant qui soit seul », écrit Diderot (Le Fils naturel, 1757).

Vous vous demanderez si la lecture des œuvres au programme justifie cette affirmation.

1) MISE EN PLACE DU SUJET :

- La phrase de Diderot, dont la locution restrictive traduit le caractère péremptoire, prend sa place dans l'idéal de sociabilité propre aux Lumières. Dans la perspective classique, dont le XVIIIème siècle est l'héritier, l'honnête homme est le modèle accompli de cet idéal : poli, cultivé, il joint à la qualité de l'éducation les vertus de mesure nécessaires à l'harmonie de la vie sociale. Molière avait déjà proposé avec le personnage d'Alceste une figure inapte à ces valeurs-là par son excès de franchise et son humeur bourrue devant les grâces salonnières. "L'ami du genre humain n'est point du tout mon fait", avoue-t-il fièrement à Philinte dont les minauderies polies le consternent. La solitude farouche qu'il choisit à la fin du Misanthrope paraît donc aux philosophes des Lumières le signe flagrant d'une malhonnêteté : on ne peut fuir les hommes que pour leur faire du mal (ce que recouvre à l'époque l'adjectif "méchant") ou pour expier quelque faute.

- On sait que Rousseau se sentait proche d'Alceste et considérait pour cela la comédie de Molière comme une apologie du mensonge. La phrase sur laquelle on se propose de disserter lui parut ainsi une allusion malveillante à son endroit du fait qu'il vivait en effet solitaire. Voici ce qu'il nous en dit dans ses Confessions : "Depuis mon établissement à l'Hermitage, Diderot n'avait cessé de m'y harceler, soit par lui-même, soit par Deleyre, et je vis bientôt, aux plaisanteries de celui-ci sur mes courses boscaresques, avec quel plaisir ils avaient travesti l'hermite en galant berger. Mais il n'était pas question de cela dans mes prises avec Diderot; elles avaient des causes plus graves. Après la publication du Fils naturel, il m'en avait envoyé un exemplaire, que j'avais lu avec l'intérêt et l'attention qu'on donne aux ouvrages d'un ami. En lisant l'espèce de poétique en dialogue qu'il y a jointe, je fus surpris, et même un peu contristé, d'y trouver, parmi plusieurs choses désobligeantes, mais tolérables, contre les solitaires, cette âpre et dure sentence, sans aucun adoucissement : Il n'y a que le méchant qui soit seul. Cette sentence est équivoque, et présente deux sens, ce me semble : l'un très vrai, l'autre très faux; puisqu'il est même impossible qu'un homme qui est et veut être seul puisse et veuille nuire à personne, et par conséquent qu'il soit un méchant. La sentence en elle-même exigeait donc une interprétation; elle l'exigeait bien plus encore de la part d'un auteur qui, lorsqu'il imprimait cette sentence, avait un ami retiré dans une solitude. Il me paraissait choquant et malhonnête, ou d'avoir oublié, en la publiant, cet ami solitaire, ou, s'il s'en était souvenu, de n'avoir pas fait, du moins en maxime générale, l'honorable et juste exception qu'il devait non seulement à cet ami, mais à tant de sages respectés, qui dans tous les temps ont cherché le calme et la paix dans la retraite, et dont, pour la première fois depuis que le monde existe, un écrivain s'avise, avec un seul trait de plume, de faire indistinctement autant de scélérats." (Confessions, livre IX.)

- Ces phrases de Rousseau nous aident à problématiser notre sujet. Le jugement de Diderot, dit-il, est équivoque : un homme seul peut-il faire le mal, du fait même que, seul, il est privé de ses éventuelles victimes ? Mais Diderot n'a-t-il pas voulu aussi signifier que la solitude constitue le châtiment de ceux qui sont inaptes à la vie sociale ? Sa sentence exige donc, comme le dit Rousseau, une interprétation.

► PROBLÉMATIQUE : Qu'elle en soit l'origine ou le châtiment, la solitude est-elle nécessairement liée au mal ?

2) PLAN :

I - Thèse : la solitude enfante ou punit le méchant...

Le méchant se situe souvent à l’écart du groupe social ou en est rejeté par sa méchanceté.

1. Une solitude physique :

Les lieux où s'exerce le mal sont toujours des endroits retirés. On pense à l'ouverture de Macbeth, sur cette lande noyée de brouillard où Banquo et Macbeth rencontrent les sorcières qui vont insuffler à ce dernier le vertige du pouvoir. La Thérèse de Giono vit, elle, dans sa « cage à lapins» à l'entrée de Châtillon, puis dans le village isolé de Clostre. C'est à chaque fois dans ces lieux reculés qu'elle mûrit ses plans machiavéliques. Dans ces deux œuvres, une véritable géographie du mal le lie nettement à la solitude.

2. Une monstrueuse pathologie :

Le criminel s'isole en outre par la monstruosité de ses plans et l'accablement moral qui en résulte. Barricadé dans son château de Dunsinane, Macbeth vit dans un univers étrange où le monde a perdu toute sa cohérence : sorcières, fantômes, forêt en mouvement, tout cela est le signe d'une déhumanisation progressive du criminel. Thérèse, elle aussi, se barricade dans son récit et dans ses plans secrets. Mais, loin de souffrir de cet isolement, le criminel en jouit pour mieux accomplir ses forfaits.

3. Marginalité de la malfaisance :

Le méchant est solitaire parce qu'il est exclu. La solitude est ici la sanction du mal. Dans Les Âmes fortes, Thérèse et Firmin sont des marginaux, une domestique et un forgeron sans emploi, mariés dans la clandestinité. Thérèse finira dans un désert affectif. Les assassins embauchés par Macbeth sont également des hommes qui vivent dans la misère : « Je suis un homme que les coups bas et les avanies de ce monde ont enragé au point que je suis prêt à tout », avoue l'un d'eux (III, 1). Complices du meurtre de Duncan, Macbeth et sa femme évoluent autrement, dans une indifférence mutuelle qui les mure dans la solitude.

Transition : si la solitude est à la source du mal, celui-ci peut se nourrir aussi de la jungle

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