Débat historiographique sur le sport
Analyse sectorielle : Débat historiographique sur le sport. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar raspaz8 • 1 Mai 2015 • Analyse sectorielle • 1 598 Mots (7 Pages) • 808 Vues
Débat historiographique[modifier | modifier le code]
La question de l'histoire du sport bute sur un débat qui oppose deux thèses.
Pour un courant de pensée, le sport est un phénomène universel, qui a toujours existé et partout sous des formes très diverses. Ce serait un « invariant culturel » (selon les termes de Frédéric Baillette, enseignant et directeur de la revue Quasimodo). Cette thèse est notamment soutenue en 1991 par le médecin français Jean-Paul Escande (Les avatars du sport moderne, in Ardoino, Brohm, Anthropologie du sport, Perspectives critiques, 1991)6. Cette thèse est implicitement soutenue par ceux qui parlent de « sport antique », de « sport médiéval », etc. Le médiéviste américain Charles Homer Haskins est le premier historien à utiliser le terme de « sport » dans le cadre d'une étude portant sur le Moyen Âge dans son livre The Latin Litterature of Sport (1927). Au début du xxie siècle, Wolfgang Decker (Institut d'Histoire du Sport de l'École Supérieure du Sport de Cologne) et Jean-Paul Thuillier (directeur du Département des Sciences de l'Antiquité à l'École normale supérieure) estiment que : « contrairement à ce que l'on estime souvent, le sport n'est pas né à Olympie, pas plus qu'il ne s'est éteint dans l'Attique ou le Péloponnèse. L'Égypte nous offre de nombreuses scènes sportives, entre autres de lutte, dès le 3e millénaire avant notre ère, et les Romains, héritiers des Étrusques sur bien des points et en particulier dans ce domaine, ont peut-être créé le sport moderne, avec ses spectacles de masse, ses clubs puissants et ses enjeux financiers colossaux7. »
Pour un autre courant de pensée, le sport est un phénomène apparu à un moment précis de l'histoire et dans un contexte particulier : au sein de l'élite sociale de l'Angleterre industrielle du xixe siècle. Cette thèse est notamment développée en 1921 par l'écrivain allemand Heinz Risse (Soziologie des Sports, Berlin, 1921 et Sociologie du sport, Presses universitaires de Rennes, 1991) qui estime qu'« il est erroné de regarder le passé avec nos modes de pensée actuels et d'imaginer que les pratiques qui ressemblent à celles que nous connaissons peuvent se rapporter à cette appellation "sport" »6. Cette thèse est notamment soutenue par l'historien français Roger Chartier et par les sociologues Norbert Elias8,6 et Pierre Bourdieu9,10. En 2000, l'historien du sport Philippe Lyotard (université de Montpellier) juge qu'« il y a une coupure très nette entre le sport moderne et le sport antique : c’est la notion de record (et donc de performance). Le record et la performance expriment une vision du monde qui est profondément différente entre les Grecs et les modernes. La culture du corps est différente. Pour les Grecs, cette culture est rituelle, culturelle, d’inspiration religieuse, pour les modernes, le corps est une machine de rendement11. »
À travers l'exemple des joutes au xve siècle en France et en Espagne, Sébastien Nadot avance dans sa thèse intitulée Joutes emprises et pas d'armes en Castille, Bourgogne et France, 1428-1470 (soutenue à l'EHESS en 2009) que l'on peut effectivement parler de sport au Moyen Âge et que la plupart des historiens confondent la notion de naissance avec celle de démocratisation du sport quand ils évoquent son apparition seulement à partir du xviiie siècle12. Mais une autre façon de résoudre la question est de forger la notion de « sport moderne » pour distinguer ce phénomène d'autres pratiques historiquement attestées. Dans une étude, une équipe de l'UFR-Stap de l'université de Bourgogne estime ainsi en 2004 que « Le sport moderne, (..) renvoie à l’idéologie de Coubertin, caractérisée par la compétition, la performance, l’entraînement dans des structures institutionnelles (fédérales et scolaires) afin de lutter contre l’oisiveté et les risques de dégénérescence psychologique et physiologique de l’homme »13. Cette notion de « sport moderne » est exposée par l'historien américain Allen Guttmann dans From Ritual To Record, The Nature of Modern Sports (1978). Auteur notamment de Sports: The First Five Millennia, Guttmann ne renonce pas à l'emploi du mot « sport » de l'Antiquité à nos jours.
Histoire[modifier | modifier le code]
Selon l'interprétation large de la notion, le sport est un phénomène universel dans le temps et dans l'espace humain, et, pour reprendre une maxime byzantine, « les peuples sans sport sont des peuples tristes »14. Nombre de phénomènes qui paraissent récents, accompagnent en fait l'histoire du sport depuis l'origine : du professionnalisme au dopage, des supporters aux problèmes d'arbitrage.
La Grèce, Rome, Byzance, l'Occident médiéval puis moderne, mais aussi l'Amérique précolombienne ou l'Asie, sont tous marqués par l'importance du sport. Certaines périodes sont surtout marquées par des interdits concernant le sport, comme c'est le cas en Grande-Bretagne du Moyen Âge à l'époque Moderne. Interrogée sur la question, la Justice anglaise tranche ainsi en 1748 que le cricket n’est pas un jeu illégal15. Ce sport, comme tous les autres, figurait en effet sur des édits royaux d'interdiction régulièrement publiés par les monarques britanniques du XIe au xve siècle. En 1477, la pratique d'un « jeu interdit » est ainsi passible de trois ans de prison16. Malgré l'interdit, la pratique perdure, nécessitant un rappel quasi permanent à la règle.
Le sport est l'une des pierres d'angle de l'éducation humaniste du xvie siècle. Les Anciens mettaient déjà sur le même plan éducation physique et intellectuelle. Pythagore était un brillant philosophe qui fut également champion de lutte puis entraîneur du grand champion Milon de Crotone. La Renaissance redécouvre les vertus éducatives du sport et, de Montaigne à Rabelais en passant par Girolamo Mercuriale, tous les auteurs à la base du mouvement humaniste intègrent le sport dans l'éducation (relire par exemple Gargantua).
Chaque époque a eu son « sport-roi ». L'Antiquité fut ainsi l'âge d'or de la course de chars. Pendant plus d'un millénaire, les auriges, cochers des chars de course, étaient des « stars » adulées par les foules dans tout l'Empire romain. Le tournoi, qui consiste à livrer une véritable bataille de chevaliers, mais « sans haine », fut l'activité à la mode en Occident entre le xie et le xiiie siècle (il
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