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Droit Administratif - Commentaire : CE, 25 novembre 2009

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Par   •  8 Avril 2015  •  1 900 Mots (8 Pages)  •  2 119 Vues

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Commentaire : CE, 25 novembre 2009, Commune de Mer c/ Pépin et Raoul

Dans la décision de 1986, le Conseil constitutionnel affirme que «les dispositions de la Déclaration des droits de l'homme de 1789 relatives au droit de propriété et à la protection qui lui est due... ne concernent pas seulement la propriété privée des particuliers mais aussi, à un titre égal, la propriété de l'État et des autres personnes publiques». Il découle de cette affirmation que les propriétés publiques font l’objet d’une protection constitutionnelle. On peut même dire que cette protection est, en effet, très poussé, car elle implique que ces biens ne soit pas susceptible de cession au rabais. Cependant, ce principe d’incessibilité n’est pas absolu. Le réunion de certaines conditions peut amener le juge à reconnaître la possibilité pour une personne publique de céder à vil prix un bien de son domaine privé. C’est dans ce cadre que s’inscrit la jurisprendence qui nous est soumise en commentaire.

Il s’agit d’un arrêt rendu par le Conseil d’Etat le 25 novembre 2009 dénommé “Commune de Mer c/ Pépin et Raoul.

En l’espèce, tout a commencé lorsque, par une délibération du 15 décembre 2003, le conseil municipal de Mer (Loir-et-Cher) a décidé la cession, à l'association culturelle franco-turque de Mer et à l'association socio-culturelle, éducative et sportive des jeunes Turcs de Mer, de deux terrains cadastrés AS 497 et 499, d'une maison implantée sur la parcelle cadastrée AS 224 et du « hangar tribune » situé sur la parcelle cadastrée AS 500. Le conseil municipal de la commune de Mer a arrêté le prix de la cession de cet ensemble immobilier pour un prix global de 35 065 €. Cependant, le prix de cession de l'ensemble de ces biens est inférieur à l'estimation en date du 28 mai 2003 du service des domaines arrêtée à 137 500 € ; ce qui constituait, dès lors, une vente au rabais.

A cet effet, M. Pierre Pépin et de M. Jean-Claude Raoul ont saisi le tribunal administratif d'Orléans et par un jugement du 1er juin 2006 par lequel le tribunal a annulé la délibération du 15 décembre 2003 par laquelle le conseil municipal de Mer (Loir-et-Cher) a décidé la cession de l’ensemble immobilier aux association. Ainsi, la Commune interjette appel auprès de la Cour de Nantes aux fins d’annuler ce jugement. Mais la juridiction d’appel rejette sa requête. C’est ainsi que par un pourvoi l’affaire a été présentée au Conseil d’Etat.

De ce fait, le juge de la haute juridiction administrative devait répondre à la question de savoir : une personne publique peut-elle céder un bien de son domaine privé pour un prix inférieur à sa valeur vénale ?

A cette interrogation, le juge a répondu par l’affirmative en estimant que la cession par une commune d'un terrain à une association locale pour un prix inférieur à sa valeur ne saurait être regardée comme méconnaissant le principe selon lequel une collectivité publique ne peut pas céder un élément de son patrimoine à un prix inférieur à sa valeur à une personne poursuivant des fins d'intérêt privé lorsque la cession est justifiée par des motifs d'intérêt général, et comporte des contreparties suffisantes.

Cet arrêt conduit à analyser, dans une première partie, la satisfaction des conditions de cession au rabais (I) ; et dans une seconde partie, la singularité de la décision (II).

I. La satisfaction des condition de cession au rabais

Le juge administratif estime qu’une cession à vil prix peut être justifiée lorsque deux conditions sont réunies : la cession doit comporter un objectif d’intérêt général (A) et des contreparties suffisantes au bénéfice de la collectivité publique (B)

A. L’existence d’un intérêt général

Le principe de l’incessibilité des biens publics à vil prix, qui limite la liberté contractuelle des personnes publiques et leur libre disposition de leur patrimoine, n’interdit pas la cession de ces biens à un prix modique. Il la tolère à condition qu’elle soit justifiée par des motifs d’intérêt général, en relation avec les compétences de la personne publique cédante. Aussi le juge a-t-il admis la cession, par une Commune, d’un stade au quart de sa valeur à une association au motif que celle-ci concourait à l’intégration d’une communauté réputée en avoir besoin et au renforcement de la sécurité publique notamment pour la circulation dans la ville « CE, 25 Novembre 2009, Commune de Mer / Pépin et Raoul ».

L’affaire « Commune de Mer » pose des problèmes différents et plus délicats. La cession à « vil prix » du terrain et de la maison ne favorisait pas une entreprise mais deux associations : l’association culturelle franco-turque de Mer et l’association socio-culturelle, éducative et sportive des jeunes Turcs de Mer. Et il ne s’agissait pas de développement économique et de création d’emplois mais d’un double motif d’intérêt général : meilleure intégration d’habitants d’origine étrangère dans la Commune et renforcement de la sécurité publique.

Il est vrai que la formule « motifs d’intérêt général » permet de larges extensions qui influencent la gestion des biens publics mais les controverses subsistent : ainsi des baux emphytéotiques « culturels » et de certaines redevances symboliques pour baux : cf. CAA Versailles, 3 Juillet 2008, «Commune de Montreuil-sous-Bois » et le CE, 25 septembre 2009, «Commune de Courtenay ».

La jurisprudence devra donc tracer des lignes de conduite plus fermes s’agissant surtout de la seconde condition : les contreparties suffisantes.

II. La singularité de la décision

La décision du Conseil d’Etat dans cette affaire présente une double singularité. D’abord, il y a l’aménagement du principe d’incessibilité au rabais des biens d’une personne publique (A) ; puis, la reconnaissance de la cession au rabais au profit des associations (B).

A. L’aménagement du principe d’incessibilité au rabais

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