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L’euro est-il devenu une monnaie forte

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Par   •  6 Mai 2015  •  Analyse sectorielle  •  2 957 Mots (12 Pages)  •  1 047 Vues

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L’euro est-il devenu une monnaie forte?

En Septembre 2007 un des plus grands économistes américains de nos jours a exprimé son admiration pour le projet de la monnaie commune en Europe. Alan Greenspan est allé jusqu’à dire que « c’est absolument concevable que l’euro puisse un jour remplacer le dollar en tant que devise de réserve ou soit utilisé en tant que devise tout aussi importante ».1 Malgré ce compliment éminent, le statut de l’euro reste controversé dix ans après son introduction. La crise économique actuelle renforce les arguments en faveur d’un euro en tant que « monnaie forte », c’est à dire une monnaie qui est utilisée en tant que moyen de paiement dans le commerce international et en tant que valeur stable pour les grandes réserves de devises. Dans ce contexte il s’agit d’analyser la situation actuelle l’euro et les conséquences qu’auraient une importance plus grande dans un monde toujours centré sur le dollar. Ceci permettra d’en déduire les enjeux futurs concernant les devises clés et le rôle que joueront l’euro et le dollar dans les années à venir.

Cette analyse commencera par une caractérisation d’une « monnaie forte » pour en déduire les principaux enjeux pour l’Europe et l’euro (I). Cette information permettra d’évaluer de façon détaillée la status quo de la monnaie européenne, son potentiel de monnaie forte et ses limites (II).

Les caractéristiques d’une monnaie forte et les enjeux consécutifs

1) Qu’est ce qui fait d’une monnaie une « monnaie forte » ?

Depuis le début de l’industrialisation, le monde a connu de nombreuses monnaies fortes qui coïncidaient toujours avec la puissance politique et économique correspondante de l’état duquel elles provenaient. Historiquement c’est donc peu surprenant que les monnaies fortes des derniers siècles aient été surtout européennes avant que le dollar prenne le relai et devienne la première véritable monnaie mondiale. Toutes les monnaies fortes, que ce soit la livre britannique pendant l’empire, le dollar après la seconde guerre mondiale et potentiellement l’euro dans les années à venir, ont cependant satisfait un nombre de critères qui leur a permit de devenir une monnaie clé.

Premièrement, une monnaie forte nécessite un contexte de politique économique saine et stable. Pour cela un il faut une continuité politique dans le pays ou la zone. Les Etats-Unis et l’Union Européenne offrent donc tout deux un environnement stable pour leur monnaie.

Dans un tel contexte, une banque centrale forte et indépendante est indispensable pour assurer une monnaie forte : par une politique monétaire et fiscale exempt d’intervention, elle dirige les paramètres cruciaux qui sont l’inflation et le taux d’intérêt directeur. Concrètement elle dirige la masse monétaire en fonction de la demande et du niveau d’inflation qu’elle désire et détermine le taux d’intérêt qui affecte la liquidité et l’investissement dans la zone donnée. Elle a donc les moyens pour contrôler le niveau des prix domestiques et le taux de change en employant des deux mécanismes. Afin de garantir la stabilité d’une devise, les banques centrales détiennent en plus des réserves importantes de métaux précieux – ce qui a spécialement été vrai dans le système de Bretton Woods et la période du « gold standard » (1946-1971).

Ensuite, une monnaie forte sert de référence sur les marchés mondiaux, notamment des matières premières et des marchés financiers. La capacité de résistance à une augmentation du volume des échanges et une demande soutenue de la monnaie au monde entier déterminent si une monnaie se prête à être une monnaie forte. Le dollar est sans aucun doute dans ce cas, puisqu’il résiste depuis plusieurs années aux théories économiques : avec un double déficit – budgétaire ($163 milliards en 2007) et de la balance courante ($738 milliards en 2007) il devrait y avoir un effet sur l’inflation et le taux de change.2 Une augmentation de la masse monétaire par la Fed cause un effet d’inflation beaucoup moins élevé que pour d’autres monnaies à cause de la demande apparemment infinie. De tels constats ne peuvent pas encore être faits pour l’euro, qui se trouve clairement encore sur la voie ascendante, comme le montre sa position de plus en plus puissante à côté le dollar.

Finalement, la monnaie forte se caractérise par le montant des réserves détenues par les banques centrales et les grands acteurs économiques. Le dollar a connu une part de marché au-delà de 70% jusqu’en 2000 avec le deutschemark en deuxième, loin derrière, avec 13-15%.3 L’euro a pu profiter de la position forte de la devise allemande et de son augmentation de volume pour atteindre une part relative de 26.5% en 2008.4

Cette première analyse montre que l’euro a toutes les conditions institutionnelles pour être une monnaie forte : un contexte politique favorable, une banque centrale indépendante, une activité économique importante dans l’UE et une part croissante dans les réserves mondiales. L’émergence très récente de l’euro, qui jusqu’en 2007 n’avait pas eu de véritable crise à surmonter rend un jugement difficile en ce moment. Afin de mieux pouvoir estimer la position de l’euro, il faut regarder les enjeux actuels et futurs qui se présenteraient si l’euro devenait effectivement une monnaie forte et une des monnaies directrices du monde.

2) Les enjeux économiques d’un euro fort pour l’Europe

Au niveau macroéconomique, l’Union Européenne est en train de subir, entre autres, les conséquences de sa monnaie « forte ». Depuis décembre 2005, l’euro n’a cessé de s’apprécier dû à une demande très forte qui a menée à une entrée de beaucoup de capital.5 La suite logique en est un désavantage compétitif pour l’économie européenne qui voit ses exportations devenir trop chères et la balance courante se détériorer à cause de l’augmentation des importations. La conséquence en est un ralentissement de la demande intérieur qui se traduit par un ralentissement de la croissance. Les Etats-Unis ont subi un phénomène similaire dans les années passées.

Dans ce contexte précaire, l’Europe a en plus subi trois grands chocs macroéconomiques : « les prix de l’énergie et des produits alimentaires ont fortement augmenté, le cycle mondial du crédit s’est retourné, ce qui s’est traduit par de graves turbulences prolongées sur les marchés internationaux de capitaux, et le cycle de l’immobilier a atteint son point haut dans plusieurs pays ».6 Il est donc peu surprenant, que

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