Croissance démographique et économique en côte d'Ivoire
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Cah. O.R.S.T.O.M.. sér. Sci. hum., vol. VIII, no 1 - 1971.
CROISSANCE DÉMOGRAPHIQUE ET CROISSANCE
ÉCONOMIQUE EN COTE D'IVOIRE*
J. L. BOUTILLIER
Les trois principales caractéristiques de la croissance démographique en Côte d’ivoire sont : un
taux d’accroissement naturel élevé, une immigration massive en provenance des états voisins, une augmentation
de la population différenciée suivant les régions et suivant le milieu rural ou urbain. Tandis que les
deux dernières sont spécifiques de la Côte d’ivoire, puisque principalement liées à sa croissance économique,
la première de ces caractéristiques est valable pour la plupart des pays de l’ouest africain, et en
est une donnée constante depuis le début du XX’ siècle : les structures socio-économiques impliquent
principalement le non malthusianisme des sociétés ouest africaines ; la paix coloniale et les progrès de
la situation sanitaire liée à une certaine médecine de masse (éradication de la maladie du sommeil notamment
à partir de 1930) ont créé les conditions pour que ce non malthusianisme se traduise par des taux
d’accroissement naturel élevés (1) de l’ordre de 1 % autour de 1920, de 1,5 % autour de 1940 et de 2,l %
pour Ia période 1950-1965 : la population d’origine passant ainsi d’environ 1 600 000 habitants en 1920
à environ 2 000 000 en 1945 et à environ 3 000 000 en 1965 (2).
L’immigration est un phénomène historiquement ancien pour la Côte d’ivoire : depuis longtemps
par exemple, les Dioula originaires du Mandé, région appartenant aujourd’hui à la République du Mali,
tiennent dans leurs mains une partie du commerce de détail et la presque totalité du commerce de la viande
et du poisson séché. Pourtant cette population étrangère n’était encore que de quelques milliers dans les
années 1920, originaires principalement du Mali et de la Guinée : les migrations n’ont pris de véritable
importance qu’à partir du développement des cultures de cacao, de café et de banane dans les années qui
ont suivi la deuxieme guerre mondiale. L’emploi par les planteurs ivoiriens de manoeuvres agricoles, pour
la plupart d’origine voltaïque, s’est répandu très rapidement surtout dans le Sud-Est et le Sud de la Côte
d’ivoire. La création et l’extension de grandes exploitations agricoles gérées selon des normes modernes
et produisant la banane, l’huile de palme et l’hévéa ont été rendues possibles aussi grâce au recrutement
de main-d’oeuvre d’origine non ivoirienne dans une proportion qui dépasse souvent 90 % (39. Parallèlement
à cette migration proprement rurale, les migrations en milieu urbain se sont développées à un rythme
rapide, entraîné par la croissance exceptionnelle qu’ont connue la plupart des villes de Côte d’ivoire
depuis 25 ans. Une analyse plus détaillée à la fois qualitative et quantitative de ces migrations tant en
* Point 3b : 3/COTE D’IVOIRE.
(1) INSEE Coop&ation : Etude de synthèse des enquêtes démographiques en Afrique francophone. Paris 1963.
(2) L. ROUSSEL : Côte d’ivoire 1965. Population Ministère du Plan pp. 2.5-27.
(3) Exemples de la SODEPALM et de la Société Africaine de Plantations d’Hév6as.
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milieu rural qu’en milieu urbain sera faite dans les paragraphes suivants : au total, la population africaine
d’origine non ivoirienne qui était d’environ 100 000 personnes en 1950, c’est-à-dire 4,5 % de la
population totale est passée en 15 ans, c’est-à-dire en 1965 à’ environ 1 000 000 personnes soit environ
25 % de la population totale (1).
L’autre caractéristique de la croissance démographique de la Côte d’ivoire, étroitement liée avec
sa croissance économique, est son aspect différentiel : loin d’être homogene, la croissance demographique
se révele tres variable : selon deux principaux critères : le milieu écologique et l’urbanisation ; critères
qui d’ailleurs comme on le verra plus loin ne sont pas indépendants.
URBANISATION, DÉVELOPPEMENT RURAL ET CROISSANCE É~ONOMCQUE
Le développement exceptionnel des villes de Côte-d’Ivoire au cours des trois dernières décennies
est un phénomène maintenant bien connu (2).
Des années 1920-1930 où la population globale des villes ne dépasse pas 50 000 personnes soit 3 %
de la population totale, la population urbaine passe à 950 000 soit 23,2 % en 1965.
~ROISSMWE DE LA POPLTLATION URBAINE (3)
Année . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . . 1921
Population urbaine . . . . . . . . . . . .
‘X par rapport à la population
totale . . . . . . . . . . . . . . . , . . . . . .
.-
32 000
2.1
Population totale . . . . . . . . . . . . . 1 532 000
1931 194s 1954 19.58
50 000 186 000 331000 447 000
239
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