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Les conditions du cumul de sanctions en matière de manquement/délit d'initié

Dissertation : Les conditions du cumul de sanctions en matière de manquement/délit d'initié. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  2 Janvier 2016  •  Dissertation  •  5 253 Mots (22 Pages)  •  1 026 Vues

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Sujet : Les conditions du cumul de sanctions en matière de manquement/délit d'initié

La contentieux financier français se caractérise par la coexistence de trois procédures distinctes pour les mêmes faits : des procédures administrative, pénale et civile. Certains comportements sont susceptibles à la fois de sanctions pénales prononcées par le juge pénal et de sanctions administratives infligées par une autorité administrative. Il en va ainsi du délit d’initié et du manquement d’initié sanctionnant le comportement d’une personne physique ou morale qui, à l’occasion de l’exercice de ses fonctions, et avant toute information du public, a connaissance d’informations privilégiées sur la situation et/ou les titres d’une société et les communique et/ou réalise sciemment des opérations.  Une information est privilégiée si elle est précise, c’est-à-dire que l’information relative à un projet de prise d’une participation au capital d’une société est une information suffisamment précise et non connue du public. L’information devient publique lorsqu’elle est donnée dans un communiqué de la société ou dans une revue financière à large diffusion par exemple. Une information communiquée uniquement aux membres présents à une réunion d’information, le président de la société et des professionnels, ne peut en revanche être considérée comme publique (AMF, 26 juin 2008) de même qu’une information seulement connue « en interne » (AMF, 1er mars 2007). L’existence de rumeurs ne suffit pas, à elle seule, à donner à l’information un caractère public (AMF, 23 décembre 2008). Enfin, cette information doit être susceptible d’être utilisée par un investisseur raisonnable comme l’un des fondements de ses décisions d’investissement.

Le délit d’initiés est une infraction pénale relevant de la procédure (procès, instruction) et des juridictions pénales. Il est punissable d’amendes ou de peines de prison. La condamnation suppose que l’intention de celui qui a commis le délit soit établie.

Le manquement aux règles édictées par l’Autorité des Marchés Financiers (manquement d’initié, de manipulation de cours, manquement à l’information du public et manquement aux obligations professionnelles) relève de l’appréciation de la Commission des sanctions. La Commission des sanctions ne peut infliger que des sanctions pécuniaires et/ou des sanctions disciplinaires. Le manquement a un caractère objectif et est donc caractérisé indépendamment de l’intention de son auteur de le commettre (articles L. 465-1 et L. 621-15 du Code monétaire et financier).

Si, aujourd’hui l'activité des autorités administratives indépendantes, telle que l’Autorité des Marchés Financiers, est en conformité avec les principes constitutionnels d’indépendance et d’impartialité, il reste néanmoins de nombreux principes dont l’application est débattue, parmi lesquels la règle non bis in idem.

La possibilité de cumul des sanctions pour un même fait, s’agissant l’Autorité des Marchés Financiers et des tribunaux pénaux, serait-il inconciliable avec le regard du principe non bis in idem ?

La validité du cumul de sanctions pénale et administrative au regard de la règle non bis in idem (I) a longtemps prédominée, avant que l'arrêt "Grande Stevens » de la CEDH, étant devenu définitif depuis le 8 juillet 2014, ne relance le débat sur la dualité des poursuites et le cumul des sanctions administrative et pénale (II).

A cet égard, la chambre criminelle de la Cour de Cassation a réaffirmé l’inapplication du principe non bis in idem aux sanctions de l’Autorité des marchés financiers (AMF) dans un arrêt du 22 janvier 2014. Cette position, réitérée de manière constante par les juridictions nationales, a été remise en cause par la Cour européenne des droits de l’homme et la Cour constitutionnelle a été amené à prendre position en 2015.

  1. Validité du cumul de sanctions pénale et administrative au regard de la règle non bis in idem 

Il convient dans un premier temps d’analyser le pouvoir de sanction de l’Autorité des Marchés Financiers puis de distinguer le principe non bis in idem du principe  de non cumul des sanctions.

  1. La nature ambiguë des sanctions de l’Autorité des Marchés Financiers justifiant cette validité

Le droit français s’attache traditionnellement à un critère organique pour déterminer la nature d’une sanction: est administrative la sanction prononcée par une autorité administrative, et inversement une sanction prononcée par un tribunal pénal est elle-même de nature pénale.

Les missions de l’Autorité des Marchés Financiers sont définis par l’article L. 621-1 du Code monétaire et financier, qui dispose notamment que : « L’Autorité des marchés financiers, autorité publique indépendante dotée de la personnalité morale, veille à la protection de l’épargne investie dans les instruments financiers donnant lieu à une offre au public ou à une admission aux négociations sur un marché réglementé et dans tous autres placements offerts au public. Elle veille également, à l’information des investisseurs et au bon fonctionnement des marchés d’instruments financiers. Elle apporte son concours à la régulation de ces marchés aux échelons européen et international.» Les autorités administratives indépendantes sont de nature administrative, elles agissent au nom de l’Etat et engagent sa responsabilité, leurs sanctions sont donc logiquement administratives.

Le domaine du pouvoir de sanction disciplinaire de l’Autorité des Marchés Financiers est défini rationae personae par les articles L. 621-15-II a) et b) du Code monétaire et financier. Selon l’article 621-15-II a) et b) du Code monétaire et financier, l’Autorité des Marchés  Financiers  peut prononcer des sanctions à l’encontre des « personnes mentionnées aux 1° à 8° et 11° à 15° du II de l’article L. 621-9, au titre de tout manquement à leurs obligations professionnelles définies par les lois, règlements et règles professionnelles approuvées par l’Autorité des marchés financiers en vigueur, sous réserve des dispositions de l’article L. 613-21».

Les sanctions prononcées par l’Autorité des Marchés Financiers  sont soumises au principe de proportionnalité. En effet, selon l’article L. 621-15 du Code monétaire et financier « Le montant de la sanction doit être fixé en fonction de la gravité des manquements commis et en relation avec les avantages ou les profits éventuellement tirés de ces manquements ».

La Cour de cassation et le Conseil d’Etat estime que la Commission des sanctions de l’Autorité des Marchés Financiers, autorité administrative indépendante, statue en matière pénale au sens de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme (ci-après CESDH). Toutefois, cette commission n’est pas un Tribunal, au sens de la réserve fait par la France en marge du protocole additionnel n°7 article 4 de la CESDH – selon laquelle le principe non bis in idem ne trouve à s’appliquer que pour les infractions relevant en droit français de la compétence des tribunaux statuant en matière pénale, et n’interdit pas le prononcé de sanctions disciplinaires parallèlement aux sanctions infligées par le juge répressif. Ainsi, les sanctions de l'Autorité des Marchés Financiers, de nature administratives selon un critére organique, ne sont pas susceptibles d'empiéter sur le droit des justiciables de ne pas être jugé ou puni deux fois.

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