Les Armées Et La Prévention Des Crises
Dissertations Gratuits : Les Armées Et La Prévention Des Crises. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar dissertation • 2 Février 2014 • 6 382 Mots (26 Pages) • 723 Vues
Les armées
et la prévention des crises
La prévention, volet prioritaire de notre stratégie de défense, dont la gamme des modes d’action est étendue : diplomatiques, économiques, politico-militaires, militaires…
(Livre blanc sur la Défense, 1994)
Les buts des Nations Unies sont les suivants : Maintenir la paix et la sécurité internationales, … prendre des mesures efficaces en vue de prévenir les menaces à la paix…
(Charte des Nations Unies, article 1)
INTRODUCTION
La fin de la Guerre froide, et – pour la première fois depuis cent cinquante ans – la disparition d’ennemis à nos frontières, si elles constituent l’une et l’autre des événements que l’histoire retiendra sûrement comme très significatifs, n’ont pas pour autant été accompagnées de la disparition de la violence, y compris dans notre proche environnement. Il n’est que de rappeler à cet égard l’importance et la multiplication des interventions armées auxquelles, depuis dix ans, nos forces ont été amenées à contribuer : non seulement ces interventions sont multiples, mais dans de nombreux cas, et en particulier dans les Balkans, elles se traduisent pas la nécessité de rester sur place pendant des années, avec un coût non négligeable en hommes, en matériels et en argent, et cela non seulement pour les États impliqués, mais également pour les organisations internationales (OSCE …), ainsi que pour ces acteurs importants que sont dorénavant les organisations non gouvernementales (ONG). La question de la prévention, c’est-à-dire de ce qu’il faudrait faire, ou de ce qu’il aurait fallu faire, pour éviter de telles situations se pose donc tout naturellement, et en particulier pour ce qui concerne les forces armées.
En Grande-Bretagne, le ministère de la Défense (MoD) a, à cet égard, introduit le concept de defence diplomacy. La defence diplomacy consiste à utiliser, de façon coordonnée, les ressources militaires du temps de paix de façon à ce qu’elles contribuent efficacement à une politique de prévention des crises . Ce concept a donné naissance à une date relativement récente, dans la Strategic Defence Review (SDR) de 1998 et à l’occasion du White Paper de décembre 1999, à une « nouvelle mission » à part entière des forces armées britanniques.
Ailleurs qu’en Grande-Bretagne, l’idée et la pratique de faire des forces armées un outil privilégié de la prévention des crises, et de leur ouvrir ainsi, en temps de paix, un champ d’action en vue de préserver la paix et la sécurité internationales, ont été adoptées depuis plusieurs années par nombre de puissances. Aux États-Unis la formule employée est « Engagement militaire du temps de paix en vue de la prévention des conflits » (Preventing Conflict : Military Engagement in Peacetime ), ce qui désigne une conception plus large, et en soi plus cohérente, que la defence diplomacy . En Allemagne, sans faire l’objet d’un concept ou d’une mission spécifiques, la prévention des conflits en Europe centrale et à l’est de l’Europe est une culture enracinée chez les militaires, s’appuyant sur les principes de l’Innere Führung (enseignés dans les écoles militaires allemandes), et se manifestant par une grande activité dans la maîtrise des armements et de façon générale dans les organisations internationales œuvrant en faveur de la paix. En Grande-Bretagne même la defence diplomacy peut être considérée comme la généralisation du programme Outreach déjà mis en place en direction des pays de l’Europe centrale et de l’Est.
Toutes ces conceptions se réfèrent explicitement à la recherche de la paix et de la sécurité internationales, à l’établissement de relations de confiance d’un pays à l’autre et à la démocratisation des forces armées dans les pays en transition. Elles sont en harmonie avec l’acception mondialement admise, à la suite de très nombreuses études et de travaux approfondis (États-Unis, Canada, Grande-Bretagne, pays scandinaves, etc.), pour la prévention des crises (ou des conflits), et qui dépasse très largement la notion, plus traditionnelle, de « dispositions militaires à prendre en cas de menace ».
Dans les Armées françaises, si la prévention des crises se traduit par un certain nombre d’activités, elle n’est pas pour autant une mission identifiée, et elle ne fait pas l’objet d’une directive politique générale. Sans doute peut-on remarquer qu’elle fait nommément partie des « fonctions stratégiques » (qui sont : dissuasion, protection, prévention, projection), mais avec un contenu qui ne correspond guère à la définition donnée plus haut pour la defence diplomacy britannique. Selon les textes officiels, il s’agit plutôt de ce qu’on pourrait appeler la « prévention militaire », c’est-à-dire de l’ensemble des « précautions » de nature militaire que l’on prend, non pas pour éviter la crise et éventuellement le conflit qui s’annoncent, mais pour se tenir prêts pour l’opération militaire, défensive ou offensive, que la crise entraînera et dont il convient de diminuer à l’avance les difficultés et l’intensité. Il en est ainsi d’une partie des « pré-positionnements », des « renforcements », de la recherche de renseignements, des opérations des forces spéciales, etc., toutes « précautions » dont certaines peuvent avoir un effet préventif (éviter la crise), mais dont ce n’est pas, en général, le but premier.
En fait, on note une sorte de rétrécissement, voire de dégradation, entre la conception de la prévention du Livre blanc sur la Défense de 1994 et celle qui est utilisée dans les documents destinés à guider l’exécution : concept d’emploi des forces, doctrine interarmées d’emploi des forces en opération .
Dans la pratique, cependant, beaucoup d’activités des Armées françaises participent de la prévention au sens plein du terme, tantôt explicitement (comme les missions de présence de la Marine), tantôt en poursuivant en même temps d’autres objectifs (comme le renseignement ou l’assistance à des armées étrangères). Pour cette raison il paraît légitime de considérer que la « prévention militaire », lorsqu’elle répond à certains critères (par exemple quand elle est
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