Le déclin De La Loi à L'époque Contemporaine

Le déclin de la loi à l’époque contemporaine

Pendant longtemps, la loi fut considérée comme un acte incontestable, censé représenter la «volonté populaire». Le principe de la souveraineté nationale implique la primauté de la loi, et cette prééminence est affirmée dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen. La loi seule garantit l’exercice des libertés, le pouvoir règlementaire est incompétent pour y procéder. Cette primauté consiste en un acte de foi dans l’oeuvre du Parlement: la loi ne peut se tromper, comme dans l’ancien régime où le Roi ne pouvait mal faire. La prééminence de la loi reflète la conception d'un Etat souverain dominé par les politiques œuvrant au niveau de l'exécutif et dans le Parlement. Telle était la situation au 19e siècle et jusque dans les années 1950. Mais si cette construction devient dépassée lorsque c'est l'Europe qui définit les politiques et arrête les règles communes, elle devient réellement compliquée lorsque l'Etat de droit progresse et que les juges constitutionnels exercent désormais un contrôle sur la loi. Le déclin de la loi est apparu avant 1958. Le Parlement a délégué dès la IIIe République son pouvoir législatif au gouvernement pour des raisons techniques ou politiques, et cette évolution a accentué le déclin de la loi. Ce déclin ne vise pas seulement la place de la loi dans la hiérarchie des normes: il est aussi qualitatif. On pouvait auparavant graver les lois sur des tables de marbre, la qualité littéraire des articles du code civil de 1804 était remarquable (Stendhal déclarait y puiser son inspiration). C'est une époque définitivement révolue. La multiplication des lois, d'une qualité juridique contestable, le fait qu’elles soient sans cesse remaniées et parfois à portée rétroactive est un facteur d'insécurité juridique permanent. Aussi le déclin de la loi est-il une évidence dans notre système juridique et politique. Toutefois, le jugement doit être nuancé, ce déclin de la loi demeure limité.

On peut alors se demander: pour quelles raisons peut-on affirmer que la loi ne serait plus la norme de référence après la Constitution? Pourquoi la législation française est-elle dite en déclin à l’époque contemporaine?

Nous verrons dans un premier temps que la loi est diminuée par sa complexité mais que la jurisprudence tente de la clarifier (I), puis nous étudierons plus précisément l’interventionnisme croissant des juges ordinaires face aux normes législatives (II).

I- La loi, une norme diminuée par sa complexité mais quelque peu renforcée par la tentative de clarification de la jurisprudence

Nous analyserons dans cette partie l’accroissement législatif et la multiplicité des formes de lois qui forment un système complexe et lacunaire (A), puis nous étudierons le rôle et l’essor de la jurisprudence depuis la fin du XIXe siècle, une tentative judiciaire d’établissement de normes stables et constantes (B).

A / Inflation législative et multiplicité de l’initiative et des formes de lois, un système complexe et lacunaire

Système constitutionnel de 1958:

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