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Le partage du pouvoir exécutif

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Par   •  30 Mai 2013  •  Fiche  •  3 287 Mots (14 Pages)  •  1 214 Vues

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MICHEL JOBERT

Le partage du pouvoir exécutif

Les Français sont souvent comme le Poète : les pieds à peine

sur terre et la tête dans les étoiles. Spécialement dès qu'ils évoquent

la Constitution, dont ils ont si souvent changé : ils rêvent toujours

de la prochaine, tout en se référant à la défunte qu'ils ont fini par

comprendre, tandis qu'ils vivent présentement avec un autre texte.

On doit les excuser puisqu'ils n'ont pas, comme le citoyen américain,

la même et seule Constitution depuis 1787, ou comme le citoyen

britannique, la tradition d'une monarchie constitutionnelle.

Le commentaire des analystes politiques contribue à les égarer :

on l'a bien vu pour les Institutions de la Ve République qui n'ont

cessé d'être appréciées inconsciemment, pièce à pièce, par rapport

aux procédures, aux habitudes ou aux altérations de la IVe Répu¬

blique. Ainsi en est-il de la loi électorale, qui n'appartient pas aux

Institutions, mais qui est un incomparable instrument pour leur

utilisation leur interprétation, pourrait-on dire. Chacun connaît les

effets du scrutin uninominal à deux tours, sur une longue période.

Comme au théâtre, il « force les effets » : le puissant est plus puissant,

et le faible écrasé. Certains veulent donc changer de loi électorale

et évoquent plusieurs formules de scrutin à la proportionnelle. On en a

mesuré les effets néfastes sous la IVe République. Aussi s'en souvienton

en oubliant que, depuis, la France a changé de République, que la

légitimité populaire s'inscrit d'abord dans l'élection du Président de

la République au suffrage universel direct, avant de se diversifier au

gré des élections législatives. Les inconvénients de la proportionnelle

multiplicité des tendances, majorités d'occasion faisant échec au

monolithisme des partis, encouragement à l'instabilité deviennent

mineurs s'ils sont rapportés à la primauté du Président de la Répu-

Pouvoirs 4, 1982

8 Michel Jobert

blique sur toutes les autres Institutions, si la légitimité proprement

populaire de son mandat n'est ni contestée, ni entamée par des

dispositions obliques mettant son élection sous le contrôle du Parle¬

ment, ainsi qu'on en décèle trop aujourd'hui la tendance.

Ces quelques remarques sur des débats de circonstances nous

amènent à affirmer d'abord la force du pouvoir exécutif avant de

discerner les éléments de son partage. Ce n'est pas par hasard que la

Constitution du 4 octobre 1958 traite d'abord « de la souveraineté » et

immédiatement après du « Président de la République ». On dit que

le général de Gaulle y veilla spécialement, et la loi du 6 novembre 1962,

qui substitua l'élection du Président par le suffrage universel direct

à sa désignation par le collège électoral savamment dosé du texte

de 1958, éclaire singulièrement les intentions initiales. Traiter du

partage du pouvoir exécutif sans accepter ou admettre d'abord que le

pouvoir exécutif est un en la personne du Président de la République,

dont l'élection pour sept ans au suffrage universel direct transcende

toutes les autres, condamne à de vains débats sur le « devoir être »

par rapport à 1' « être » et à des interprétations erronées sur l'attitude

des hommes politiques les uns vis-à-vis des autres, quand ils ont eu

précisément ce pouvoir en partage.

L INSURRECTION DE J. CHIRAC

CONTRE LE POUVOIR PRÉSIDENTIEL

Partons d'un incident récent, qui est encore très présent dans les

mémoires. Depuis plusieurs mois, le torchon brûlait entre M. Giscard

d'Estaing et son Premier ministre, M. Jacques Chirac, qui avait

tout fait pourtant pour assurer son élection en se dressant contre

l'attitude de son propre groupe, I'udr, dès avant le premier tour de

l'élection présidentielle. On a parlé de « trahison », d' « opportunisme

personnel ». Mais peu importe. Unis pour gagner l'élection, puis

pour gouverner, le couple du pouvoir exécutif Président et

Premier ministre allait se dissoudre de la façon la plus insolite.

Constitué le 10 juin 1974 et remanié deux fois, la dernière étant le

12 janvier 1976, le « Gouvernement » Chirac prenait fin en août 1976.

On vit, à la télévision, son chef, les mâchoires serrées, dire d'un ton

sifflant un texte véhément, affirmant qu'il partait faute d'avoir reçu

les

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