DUBOIS Vincent, « Les deux corps du guichetier. Le poste et le rôle de guichetier »

Fiche de lecture  :

DUBOIS Vincent, « Les deux corps du guichetier. Le poste et le rôle de guichetier », La vie au
guichet. Administrer la misère, Paris, Le Seuil, 2015, pp. 155-173. 

        Vincent Dubois est un sociologue et politiste français, professeur à l’institut d’étude politique de l’Université de Strasbourg et membre du laboratoire SAGE. Ses recherches portent essentiellement sur les politiques publiques et notamment l’action publique. Ainsi, il s’est intéressé à l’action publique au prisme du guichetier qui est la personnification de l’État. Son analyse est qualitative avec majoritairement des entretiens avec le personnel de l’accueil administratif et complétée par des documents d’archive. Dubois tente de répondre à la question suivante : en quoi la duplicité du métier de guichetier pris en tenaille entre l’incarnation de l’État et l’individu s’exprime-t-elle au sein de l’action publique ?

        L’auteur revient liminairement sur la notion de « street level bureaucrats », qui sont les « petis bureaucrates » ou généralement les main de l’État. Il explique que les guichetiers qui sont des « petis bureaucrates » sont confrontés à de nombreux facteurs dans l’exercice de leur fonction telle que l’ambivalence entre incarnation de l’État et l’expression de l’individu, ou encore le défoulement des citoyens. Dans un premier temps, Dubois définit le poste et le rôle de guichetier ce qui ne s’avère pas chose facile car le rôle semble flou. En effet, le poste de guichetier est mis à part, isolé à la frontière entre les affaires internes et externes, il n’a pas besoin de réel spécialisation ou de technicité particulière si ce n’est la capacité d’être « un homme à tout faire ». Le poste est tellement flou qu’il ne figure pas dans les métiers de la CNAF. Bien que le rôle du guichetier porte les trace de la direction politique il n’en est pas moins un rôle à définir par le guichetier lui même. Dubois montre ainsi cette duplicité du guichetier entre la demande de l’État de liquider des dossier, « d’être rentable » et la volonté de l’individu de prendre du temps pour faire les choses comme il faut. Un choix s’opère alors entre un travail de manière quantitative ou un travail de manière qualitative. Dans un deuxième temps, l’auteur se penche sur le parcours des agents d’accueil et remarque que la plupart sont entrés en tant que guichetier de manière fortuite, soit pour se sortir d’échec scolaire , professionnel ou encore à cause d’une rupture de parcours. L’apprentissage du rôle du guichetier est par conséquent « sur le tas » étant donné la fonction flou de l’agent d’accueil si ce n’est celle de liquider les dossiers.

Dubois explique que l’ambivalence est au cœur du rôle de guichetier qui est à la fois incarnation de l’État présent pour faire passer les dossiers mais également un individu spécifique qui est le définiteur de l’action publique.

Le texte « L’asile au guichet » de Alexis Spire montre expressément que l’agent d’accueil définit lui même son rôle et par conséquent l’action publique elle même au sein d’une préfecture chargée d’octroyer des droits de séjour aux demandeurs d’asile. Comme dit précédemment le guichetier peut faire le choix de faire écouler les dossiers au maximum sans prendre le temps de respecter les demandes des étrangers ou de faire un travail qualitatif plus rigoureux mais moins quantitatif. C’est ainsi que des guichetiers par volonté de soi font un travail long d’échange avec les demandeurs d’asile quitte à être plus long, tandis que d’autres souhaitent liquider les dossiers, quitte à faire sauter les dossiers compliqués ou être tentés par de la corruption.

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