Le juge administratif et l'état d'urgence
Dissertation : Le juge administratif et l'état d'urgence. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar stella75 • 29 Juin 2017 • Dissertation • 2 387 Mots (10 Pages) • 3 280 Vues
SECTION 1) UN CONTROLE JURIDICTIONNEL AMNISTRATIF ASSOUPLI
L’assouplissement jurisprudentiel des décisions du Conseil d’Etat en matière de recours contre les mesures attentatoires de libertés prises sous le régime de l’état d’urgence (§1) ne font pas taire les critiques de son intervention a posteriori et de la manière dont il est saisi. Ainsi, malgré de nombreuses suspensions d’arrêtés préfectoraux prononcées par le Conseil d’Etat, la question demeure : l’intervention du juge administratif a posteriori est-elle effective au regard des garanties que protègent la Constitution ? (§2)
§1) Le contrôle juridictionnel administratif des mesures de police administrative
Les mesures de police administratives prises sous le régime de l’état d’urgence relèvent des juridictions administratives, lesquelles se montraient quelque peu frileuses dans leurs décisions au regard, notamment, des attentats terroristes répétés en France et dans le monde (A). Depuis peu, le Conseil d’Etat se montre plus souple à l’égard des recours relatifs aux mesures attentatoires des libertés fondamentales (B).
A. Les mesures de police administrative susceptibles de contrôle juridictionnel
L'état d'urgence conduit à un renforcement des pouvoirs de police. Dès la déclaration de l'état d'urgence le préfet se voit ainsi doté de pouvoirs de police plus larges et dont la légalité n’est pas admise en temps ordinaire. Le Ministre de l'Intérieur se voit par ailleurs également confier, par décret simple du Premier ministre, un pouvoir de police spéciale .
Le contrôle juridictionnel du dispositif de police administrative en période d’état d’urgence relève du juge administratif. La loi a d’ailleurs dû rappeler le 20 novembre 2015 , par une nouvelle disposition , la pleine compétence du juge administratif pour connaître des mesures de police administrative prévues par l’Etat d’urgence. La loi du 20 juillet 2016 a ensuite modifié l’office du juge administratif en lui octroyant un pouvoir nouveau d’autorisation d’exploitation des données informatiques découvertes lors des perquisitions administratives.
Le régime de l’Etat d’urgence permet ainsi, à titre exceptionnel, d’affaiblir les libertés et droits fondamentaux de manière temporaire afin de lutter contre un péril imminent résultant d’atteintes graves à l’ordre public. Les mesures susceptibles d’être prises au titre de l’état d’urgence sont les suivantes : restrictions à la liberté d’aller et venir , perquisitions administratives, assignations à résidence , remises d’armes, réquisitions de personnes et de biens, fermetures de lieux de réunions ; interdictions de cortèges ; contrôles d’identité et fouilles de bagages et de véhicules ; blocages de sites internet ; dissolutions d’associations. Ce sont les assignations à résidence qui ont soulevé un débat des plus houleux, notamment, celles prises afin de lutter contre un risque de trouble à l’ordre public lors de la conférence climat de Paris (COP 21).
Outre les mesures susmentionnées, le Ministre de l'Intérieur et le Préfet peuvent prendre des mesures davantage attentatoires aux libertés publiques, à condition que celles-ci soient expressément prévues par le décret ou la loi prorogeant l'état d'urgence. Ces mesures sont au nombre de deux. D'une part, les autorités de police peuvent ordonner des perquisitions à domicile de jour et de nuit, mais uniquement dans les zones définies à l'intérieur des circonscriptions où l'état d'urgence s'applique . D'autre part, elles peuvent exercer un contrôle de la presse et des publications de toute nature, ainsi que des émissions radiophoniques, des projections cinématographiques et des représentations théâtrales dans l'ensemble des circonscriptions soumises à l'état d'urgence .
Les perquisitions administratives sont de loin les mesures de police les plus sujettes à controverse. D’ailleurs, lors de la loi de prorogation de l’état d’urgence en septembre 2016, le gouvernement avait décidé « de ne pas rendre applicable pour cette période l'article 11 de la loi du 3 avril 1955 relative à l’état d’urgence permettant de mettre en œuvre des perquisitions administratives dans des lieux dont il existe des raisons sérieuses de penser qu'ils sont fréquentés par des personnes constituant une menace pour l'ordre et la sécurité publics ». Mais, la loi de prorogation du 10 décembre 2016 a réintroduit les perquisitions administratives permettant aux services spécialisés de vérifier le degré de menace que représentent les individus potentiellement dangereux. La loi du 21 juillet 2016 modifiant la loi du 3 avril 1955 offre néanmoins un cadre juridique nouveau aux garanties nécessaires pour procéder, lors des perquisitions, à la saisie de données informatiques exploitées après autorisation du juge administratif des référés. La loi de juillet 2016 relative aux garanties accordées à la saisie de données informatiques a été prise afin de se conformer à à la décision du Conseil Constitutionnel jugeant anticonstitutionnelle la copie de données réalisées lors des perquisitions, faute d’encadrement suffisant.
B. Vers un assouplissement jurisprudentiel du Conseil d’Etat
De nombreuses assignations à résidence ont fait l’objet de contestations par devant le Conseil d’Etat en raison de leur utilisation à un essaim parfois étranger aux menaces terroristes impulsant le recours au régime de l’état d’urgence.
Malgré la récente censure du Conseil Constitutionnel du régime de prolongation des assignations à résidence sous le régime de l’état d’urgence du 9 juin 2017, il apparaît opportun d’appréhender l’évolution de la jurisprudence administrative en la matière.
Au préalable, il convient de rappeler les conclusions du Commissaire du gouvernement dans l’arrêt Baldy de 1917 afin de s’imprégner de la philosophie juridique des libertés fondamentales : « Pour déterminer l’étendue d’un pouvoir de police dans un cas particulier, il faut tout de suite se rappeler que les pouvoirs de police sont toujours des restrictions aux libertés des particuliers, que le point de départ de notre droit public est dans l’ensemble les libertés des citoyens, que la Déclaration des droits de l’homme est, implicitement ou explicitement, au frontispice des constitutions républicaines et que toute controverse de droit public doit, pour se calquer sur les principes généraux, partir de ce point de vue que la liberté
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