Le droit administratif, un instrument de pouvoir de l'administration vis à vis des administrés
Cours : Le droit administratif, un instrument de pouvoir de l'administration vis à vis des administrés. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar dissertation • 5 Octobre 2013 • Cours • 3 012 Mots (13 Pages) • 1 897 Vues
« Né d’un miracle, le droit administratif ne subsiste au surplus que par un prodige chaque jour renouvelé », telle est une formule qu’utilise Prosper Weil afin d’introduire son ouvrage Le droit administratif. En effet, l’idée selon laquelle l’Etat et son administration se soumettraient à la règle du droit et donc à la sentence d’un juge n’a pas toujours relevait de l’évidence. Le mouvement d’apparition du droit administratif a été relayé progressivement par l’affirmation du pouvoir royal monarchique qui pour assurer sa légitimité a voulu mettre en place une administration complexe et adopter un certain nombre de règles afin notamment que les affaires qui concernent l’Etat ne puissent plus être réglées par les parlements. C’est ce que stipule l’édit de Saint-Germain en 1641. Toutefois, il faut en réalité attendre 1789 et le travail des révolutionnaires pour qu’émerge progressivement une organisation juridique de l’administration et que se mette en place un régime de fonction publique. L’objectif de nombreux textes issus de cette période est d’organiser une véritable séparation des pouvoirs afin de créer d’un point de vue juridictionnel une dualité des ordres de juridictions : autorités administratives d’un côté, autorités judicaires de l’autre. Se met ainsi un place un véritable système juridictionnel, de par la reconnaissance d’une juridiction propre aux affaires publiques. Cela va entrainer une dualité de droit, il y a alors des règles applicables par les autorités judiciaires et des règles applicables par le juge administratif. Ce dernier va être progressivement amené à créer lui-même le droit administratif qui se définit alors comme étant un droit purement jurisprudentiel. L’article 13 de la loi des 16 et 24 août 1790 affirme alors : « les fonctions judiciaires sont distinctes et demeureront toujours séparées des fonctions administratives. Les juges ne pourront, à peine de forfaiture, troubler, de quelque manière que ce soit, les opérations des corps administratifs, ni citer devant eux les administrateurs pour raison de leurs fonctions ». Principe renforcé par le décret du 16 fructidor an III en 1793, les tribunaux judiciaires se retrouvent alors dessaisis de tout le contentieux relevant de l’action administrative, c’est-à-dire de l’ensemble des activités prises en charge directement par les personnes publiques ou assurée par les personnes privées sous le contrôle des personnes publiques ayant pour but notamment la satisfaction de l’intérêt général et le maintien de l’ordre public. En 1799 est créé le conseil d’Etat, afin que l’administration ne soit plus à la fois juge et partie. Les réponses vont être évolutives et progressives tout au long du XIXème puisqu’on va aller vers une reconnaissance explicite de l’autonomie des autorités et de la juridiction administrative vis-à-vis de l’administration. Avec l’arrêt Blanco en 1873, Le Tribunal des conflits révèle deux aspects primordiaux qui vont devenir une constante du droit administratif. D’une part, il déduit qu’il existe une responsabilité de l’Etat, cela sonne la mise à fin du régime de l’irresponsabilité de l’Etat du fait de ses activités de service public. D’autre part, il décide que ce litige doit être tranché par des règles spéciales exorbitantes du droit commun.
Le fait que l’administration ait petit à petit accepté de se soumettre à la règle de droit, c’est un premier pas vers l’Etat de droit. La mise en place de ces systèmes et de ces juridictions ne s’est pas fait de manière évidente et la France fut un des premiers pays à se doter d’un juge autonome. Toutefois, il semble légitime de se demander le rôle que joue le droit administratif dans les rapports entre l’Administration et les personnes privées, et plus largement comment se déroule l’administration des personnes privées. En effet, l’administration peut désigner l’ensemble des activités dont le but est de répondre aux besoins d’intérêt général de la population tels qu’ils sont définis à un moment donné par l’opinion publique et le pouvoir politique, mais le terme peut également désigner l’ensemble des personnes morales et physiques qui accomplissent ces activités. Par personnes privées, on entend juridiquement les personnes physiques ou morales qui sont soumises règles de droit privé, et donc, qui ne font partie du régime juridique auquel est soumise l’administration.
Existe-il une supériorité de l’administration vis-à-vis des personnes privées ? Dans quelle mesure s’exerce-t-elle ? Qu’accorde le droit administratif à l’administration ? La puissance qui lui est octroyée la rendrait-elle intouchable ? Quels sont les privilèges dont elle peut jouir face aux personnes privées et dont ces dernières n’ont pas accès ? Pour autant, les personnes privées n’ont-elles aucun recours face à l’administration ? Le droit administratif leur confère-t-il à elles aussi un pouvoir ? Ou du moins, ne les protège-t-il pas ? Plus généralement, le droit administratif n’est-il pas au service des personnes privées ? Le droit administratif n’a-t-il pas pour vocation la satisfaction de l’intérêt général ? N’existe-t-il pas pour contrôler l’administration ?
Ainsi, si le droit administratif confère un pouvoir non négligeable à l’administration de telle sorte que sa supériorité vis-à-vis des administrés ne puisse être remise en cause, il ne faut pas omettre qu’un objectif du droit administratif consiste en la protection des personnes privées, vocation qui passe par la satisfaction de l’intérêt général, le maintien de l’ordre public ou encore le respect des libertés.
I. LE DROIT ADMINISTRATIF, UN INSTRUMENT DE POUVOIR DE L'ADMINISTRATION VIS À VIS DES ADMINISTRÉS
La puissance publique s’exprime par des pouvoirs propres à l’administration qui n’existe pas en droit privé et qui ne peuvent être utilisés par des personnes privées. Ce sont des prérogatives de puissance publique qui s’imposent aux particuliers. Elles constituent la traduction au plan administratif de la réalité politique qu’est le pouvoir. Autrement dit, les prérogatives de puissance publique, ce sont dans le champ juridique, dans le domaine du droit, la traduction de l’autorité politique.
A. Une administration puissante : les actes administratifs unilatéraux
Cette puissance publique, qui est par ailleurs un critère d’identification de la compétence administrative, renvoie aux pouvoirs de coercitions légitimes détenus par l’Etat et aux moyens d’action dont il dispose pour imposer ses décisions à l’ensemble de la population, notions mises en lumière
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