L'abrogation des actes administratifs unilatéraux et le principe de sécurité juridique
Dissertation : L'abrogation des actes administratifs unilatéraux et le principe de sécurité juridique. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar lolita2303 • 16 Octobre 2019 • Dissertation • 1 685 Mots (7 Pages) • 1 589 Vues
L'abrogation des actes administratifs unilatéraux et le principe de sécurité juridique
Les conditions d'abrogation des actes administratifs unilatéraux contribuent à assurer la sécurité juridique tout en tenant compte des exigences de la légalité administrative.
L'abrogation, par opposition au retrait, consiste à évacuer de l'ordre juridique un acte administratif pour l'avenir. Elle n'a donc pas d'effet rétroactif.
Un acte administratif unilatéral (à définir)
Le principe de sécurité juridique est qualifié par le Conseil d'Etat, d'un concept de “clandestin” (CE, Rapport public 1991, De la sécurité juridique, La documentation française 1991) car il n'est pas explicitement défini par le droit en vigueur. Pour autant, il constitue “une référence implicite majeure” (O.Dutheillet de Lamothe, “La sécurité juridique : le point de vue du juge constitutionnel” in CE, Rapport public 2006, Sécurité juridique et complexité du droit, La documentation française 2006) tant en droit administratif qu'en droit constitutionnel. Son avènement en droit administratif, est marqué par la jurisprudence “Société du journal 'L'Aurore'” ( CE, 25 juin 1948, Lebon, p. 289).
Il est qualifié comme principe général du droit par le juge administratif en 2006 (CE, 24 mars 2006, Société KPMG, Lebon, p. 154). Selon O.Dutheillet de Lamothe, le principe de sécurité juridique peut être identifié à travers les dispositions des articles 2 et 16 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789 (O.Dutheillet de Lamothe, “La sécurité juridique : le point de vue du juge constitutionnel”, précité, p. 369). Dans ce cadre, il fait référence à la “sûreté” et à la “garantie des droits”. Le principe de la sécurité juridique, appréhendé sous l'angle des règles de l'abrogation des actes administratifs unilatéraux, implique à ce que les administrés puissent bénéficier de la stabilité des relations juridiques établies. En vertu de ce principe, le respect des droits acquis doit être assuré.
Pour délimiter le sujet, il convient de centrer l'étude sur les actes administratifs unilatéraux décisoires, réglementaires et non réglementaires, car ce sont des actes susceptibles de faire grief. En revanche, les actes administratifs unilatéraux non décisoires, n'ayant pas de portée impérative, ne sont pas pris en compte dans le cadre du régime de l'abrogation. En outre, ce n'est qu'à titre accessoire que les règles relatives au retrait, seront évoquées, afin d'apporter les éléments de comparaison susceptibles d'être utiles pour l'analyse du principe de la sécurité juridique à travers les conditions de l'abrogation des actes administratifs unilatéraux.
Il convient de se demander comment se concrétise le respect du principe de la sécurité juridique par les conditions d'abrogation des actes administratifs unilatéraux ?
Afin d'étudier cette problématique, il est nécessaire d'examiner la garantie de la sécurité juridique à la fois dans l'hypothèse des actes administratifs unilatéraux créateurs de droits (I) et à travers le cas des actes administratifs unilatéraux non créateurs de droits (II).
I-La garantie de la sécurité juridique par les règles d'abrogation des actes administratifs unilatéraux créateurs de droits
Un acte administratif unilatéral créateur de droit est celui qui accorde aux administrés une situation sur laquelle il n'est pas possible en principe à l'Administration de revenir. Toutefois, il apparaît parfois nécessaire de supprimer certains actes afin de garantir le respect de la hiérarchie des normes tout en tenant compte du principe de la sécurité juridique. A cette fin, la mise en place de la condition du délai d'abrogation apparaît utile (A). Certaines situations juridiques ne nécessitent cependant pas de l'établissement d'un tel délai car elles ne peuvent pas être considérées comme portant une atteinte aux droits acquis. Pour cette raison, il est possible, dans ces situations, de procéder à une abrogation d'un acte administratif unilatéral sans délai (B).
A) La conciliation de la légalité administrative avec la sécurité juridique par la mise en place de la condition du délai d'abrogation
La possibilité d'abroger un acte administratif unilatéral illégal est limitée dans le temps ainsi qu'en témoigne l'arrêt Coulibaly (CE Sect., 6 mars 2009, M. Coulibaly, n° 306084). Cette jurisprudence aligne le délai d'abrogation sur celui posé par l'arrêt Ternon pour le retrait (CE Ass., 26 octobre 2001, Ternon, n° 197018), qui est de 4 mois suivant la prise de la décision. Ce délai est repris par l'article L.242-1 du Code des relations entre le public et l'administration. Il donne la possibilité à l'Administration de supprimer de l'ordre juridique un acte administratif unilatéral créateur de droits non conforme à la hiérarchie des normes. La mise en place d'un tel délai permet aussi aux administrés d'apporter une sécurité juridique par rapport à leur situation. Ceci dans la mesure où, une fois les 4 mois passés à compter de l'édiction de la décision, l'acte ne peut plus être remis en cause. Ainsi, l'encadrement de l'abrogation des actes administratifs unilatéraux illégaux par un délai, constitue une solution efficace afin de concilier les exigences de la légalité administrative et du principe de la sécurité juridique. Par exception, lorsque l'abrogation ne constitue pas une atteinte aux droits acquis, il est possible de supprimer pour l'avenir un acte administratif unilatéral sans délai.
B)L'absence d'atteinte aux droits acquis dans le cadre de l'abrogation sans délai
En vertu de l'article L.242-2.4 du Code des relations entre le public et l'Administration, l'administration peut procéder à l'abrogation d'une décision légale créatrice de droit sans condition de délai si elle ne porte pas atteinte aux droits des tiers et uniquement si c'est le bénéficiaire de cette décision qui en fait la demande. Une telle décision abrogée doit être remplacée par une décision plus favorable au bénéficiaire. Sur ce point, la règle est similaire pour le retrait. Une telle solution peut être considérée comme ne portant pas atteinte au principe de la sécurité juridique dans la mesure où c'est le bénéficiaire qui doit être à l'origine de la demande d'abrogation. En outre, une telle abrogation ne peut pas intervenir si elle constitue une atteinte aux droits des tiers. De la sorte, l'abrogation sans délai étant fortement encadrée, elle ne remet pas en cause les droits acquis. L'acte abrogé ne peut qu'être remplacé par une décision qui constitue un avantage pour son bénéficiaire.
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