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Conseil d’Etat Assemblée 30 Octobre 2009, Mme Perreux

Commentaire d'arrêt : Conseil d’Etat Assemblée 30 Octobre 2009, Mme Perreux. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  3 Octobre 2017  •  Commentaire d'arrêt  •  2 695 Mots (11 Pages)  •  1 196 Vues

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Conseil d’Etat Assemblée 30 Octobre 2009, Mme Perreux

« La directive intrigue, dérange, divise. Sa singularité en est la cause » : R.KOVAR « Observations sur l’intensité normative des directives ».

La directive est un acte juridique original, singulier et inédit, la question de son applicabilité sur le territoire des Etats membres est délicate et soulève de nombreuses difficultés, c’est le cas en France notamment. Comme le précise le professeur Pierre Delvolvé « Cohn-Bendit est mort ! » avec l’arrivée de l’arrêt Perreux du Conseil d’Etat 30 octobre 2009.

En l’espèce, Madame PERREUX conteste un arrêté du 29 aout 2006 qui nomme Mme B chargé de formation à l’Ecole nationale de ma magistrature à partir du 1er septembre 2006, poste pour lequel Madame Perreux était candidate. Elle conteste cet arrêté, car Madame Perreux a estimé que le garde des sceaux, ministre de la justice a commis une erreur de droit en l’écartant de ce poste en raison de l’appartenance syndicale de Madame Perreux.

Par une requête en date du 24 octobre 2006, Madame PERREUX demande au Conseil d'Etat l'annulation de cet arrêté, en invoquant le bénéfice des règles relatives au partage de la charge de la preuve fixées par l'article 10 de la directive n°2000/78/CE du Conseil du 27 novembre 2000 relative à l'égalité de traitement dans l'emploi, dont le délai de transposition expirait le 2 décembre 2003, soit antérieurement à l'arrêté litigieux, cette directive n’a été transposée qu’en 2008.

Les particuliers peuvent-ils invoquer à l’encontre d’un acte administratif individuel une directive européenne lorsque celle-ci n’a pas été transposée ?

Le Conseil d'Etat se saisit d'office du moyen portant sur l'absence de transposition de l'article 10 de la directive, et profite de cette occasion pour abandonner la jurisprudence « Cohn-Bendit » (I) en reconnaissant l'effet direct des dispositions inconditionnelles et précises des directives passé le délai de transposition (II).

I La directive : une règle internationale spéciale sujette à des difficultés d’apprivoisement en France

  1. La primauté de la directive européenne

Les choses se sont compliquées depuis 1992, la Constitution française a été révisée et elle contient des dispositions concernant l’Europe, le Droit communautaire, ces dispositions sont concentrées dans le titre 15 de la Constitution qui porte le titre de : « De l’Union Européenne ». Ce titre, ces dispositions bousculent la limite entre ce qui relève de la Constitution et ce qui relève du Droit International car on intègre dans des règles constitutionnelles des références au droit de l’Union Européenne, notamment avec l’article 88-1 de la Constitution contenu dans ce titre, qui oblige l’Etat français à transposer les directives, il s’agit d’une obligation constitutionnelle.

 

  1. La primauté de la directive sur les règlements

Le Conseil d’Etat par cette arrêt du 30 octobre 2009 Madame Perreux, savait à quel point cette décision allait être commentée, à quel point elle devait être bien comprise, c’est ainsi qu’on peut voir à travers de son neuvième considérant un effort pédagogique du juge administratif qui a l’habitude de rendre plus ou moins obscur son raisonnement. Les Etats sont soumis à une double obligation : ils doivent transposer la directive dans l’ordre interne, mais ils doivent également tout faire pour annihiler les actes contraires au droit communautaire. Le juge administratif a donc censuré les actes règlementaires incompatibles avec les objectifs d’une directive.  

En effet ce considérant fait référence à un arrêt du Conseil d’Etat assemblée du 3 février 1989 : Compagnie Alitalia précise « sont tenues d’adapter leur réglementation et leur législation aux directives qui leurs sont destinées » et « ne peuvent légalement, après l’expiration des délais impartis, laisser subsister les dispositions réglementaires qui ne seraient plus compatibles avec les objectifs définis par la directive », cet arrêt est en quelque sorte la continuité de l’arrêt du Conseil d’Etat du 28 septembre 1984, Confédération nationale des sociétés de protection des animaux de France et des pays de l’expression française où le Conseil d’Etat a estimé que le gouvernement ne peut édicter de textes réglementaires incompatibles avec les objectifs d’une directive dont le délai de transposition est expiré.

Ainsi il appert de cet arrêt du 3 février 1989 que les Etats membres ne peuvent légalement après expiration des délais impartis, laisser subsister des dispositions réglementaires qui seraient incompatibles avec le droit communautaire.

Cette référence n’a pas été introduite par hasard, elle précise d’ores et déjà le domaine dans lequel va intervenir le Conseil d’Etat par cet arrêt du 30 octobre 2009, il va intervenir par rapport au règlement, dans ce cas par rapport à un acte administratif individuel, d’ailleurs par ce neuvième considérant, le Conseil d’Etat ne précise pas quel type d’acte administratif, ce qui permet déjà de prédire la fin de la jurisprudence Cohn Bendit (1978).

  1. La primauté de la directive sur les lois

En 1989, le Conseil d’Etat par son arrêt Nicolo rendu en réponse à la décision IVG de 1975 du Conseil Constitutionnel  a accepté de vérifier la compatibilité d’une loi avec un traité internationale. Dès lors, après avoir fait ce pas de géant, le Conseil d’Etat ne pouvait se limiter à vérifier la compatibilité d’une loi à un traité internationale, il a étendu cette jurisprudence Nicolo aux rapports entre la loi nationale et la directive communautaire dans un arrêt Rohtmans du 28 février 1992.

L’incompatibilité d’une loi avec les objectifs d’une directive remet en cause la légalité des actes administratifs, pris en accord avec cette loi. Le Conseil d’Etat depuis l’arrêt Tête de 1998 admet que soit contesté par voie d’exception la compatibilité de « règles nationales » qui recouvrent notamment les règles non écrites avec les objectifs d’une directive. Le conseil constitutionnel a rappelé cette spécificité dans une décision du 14 novembre 2004  décision conseil pour l’Europe : le conseil constitutionnel indique que l’ordre juridique communautaire est intégré à l’ordre juridique interne et est distinct de l’ordre juridique international. Cette idée avait déjà été affirmée par la Cour de justice de l’Union Européenne du 15 juillet 1964 : décision Costa contre Enel.

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