Commentaire de l'article 763 du Code civil
Commentaire de texte : Commentaire de l'article 763 du Code civil. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar mathieu96 • 30 Janvier 2019 • Commentaire de texte • 3 965 Mots (16 Pages) • 1 494 Vues
FOURNIER Mathieu TD Régimes matrimoniaux 24/03/2018
Commentaire de l'article 763 du Code civil :
Comme le disait M. Alain Vidalies[1] « Il s’agit [...] de permettre au conjoint survivant de disposer de temps pour s’organiser afin qu’à la douleur du deuil ne s’ajoute pas celle de devoir quitter rapidement la résidence conjugale ».
La protection du logement de la famille est l’une des questions essentielles en matière de droit patrimonial de la famille puisque ce logement constitue le cadre de vie des époux. Cette protection est assurée durant le mariage par l’article 215 du Code civil, mais se prolonge désormais après la dissolution du mariage causée par le décès de l’un des époux, grâce à l’article 763 du Code civil.
Protéger le logement familial durant le mariage paraît évident afin que la famille ne se retrouve pas sans toit, mais lorsque l’un des époux décède et que le mariage est dissout, il est important de protéger le conjoint survivant de manière à ce qu’il garde les mêmes conditions de vie et qu’il ne soit pas obligé de quitter son logement alors qu’il est en deuil. Cependant, avant la loi du 3 décembre 2001, si les enfants[2] étaient bien protégés, par les règles de dévolution successorale, en cas de décès de l’un de leurs parents, le conjoint survivant, lui, était appelé – non sans raison – le « parent pauvre de la succession ». La loi se préoccupait donc peu de cet enjeu humain : avant la réforme de 2001, c’était l’article 1481 qui permettait en partie au conjoint survivant de maintenir son cadre de vie. Il disposait que : « si la communauté est dissoute, le survivant a droit, pendant les neuf mois qui suivent, à la nourriture et au logement, ainsi qu’aux frais de deuil, le tout à la charge de la communauté ». Cependant, le champ d’application de cet article est réduit aux époux mariés sous le régime légal, et il ne s’intéresse pas au logement qui est pourtant l’enjeu essentiel du maintient de la qualité de vie du conjoint survivant. Il était alors impératif de réformer les droits du conjoint successible.
Lors des débats parlementaires précédant l’adoption de la loi de 2001, M. Alain Vidalies déclarait ainsi, dans son rapport, que « la rigueur des dispositions successorales légales suscite aujourd’hui un sentiment d’incompréhension dans l’opinion ». Cette incompréhension résultait notamment du fait que, en plus de « la douleur du deuil », le conjoint survivant puisse se trouver, dans certaines hypothèses, contraint de quitter le logement qu’il a pu partager, tout au long de sa vie, avec le conjoint prédécédé. La loi du 3 décembre 2001 « tend [ainsi] à remédier au décalage qui existe aujourd’hui entre la place qu’accorde l’opinion au conjoint survivant et celle qu’il occupe effectivement dans le droit successoral français ». Cette loi a donc répondu à ces attentes en rénovant la vocation successorale du conjoint successible. Elle lui a tout d’abord permis de recueillir une partie des biens de son époux défunt et d’avoir ainsi une place plus importante dans la succession, et il est venue par ailleurs améliorer sa vie quotidienne en préservant l’essentiel de ses conditions de vie, notamment grâce aux articles 763 et 764 du Code civil, consacrant un droit au logement.
L’article 764 instaure un droit viager au logement qui permet au conjoint successible d’être prioritaire pour exercer ses droits successoraux sur le logement de la famille qu’il occupait. L’article 763 instaure quant à lui un droit annuel au logement, droit temporaire qui répond aux aspirations du conjoint survivant à des conditions de vie inchangées lors du veuvage. Ainsi, le conjoint survivant a de plein droit pendant un an la jouissance gratuite du logement familial qu’il occupait et du mobilier. C’est donc ce dernier article qui assure la protection du conjoint successible directement après le décès du conjoint, et ce, malgré le caractère temporaire de cette protection.
Le droit annuel au logement, inséré à l’article 763 du Code civil par la loi du 3 décembre 2001, prévoit ainsi que « si, à l’époque du décès, le conjoint successible occupe effectivement, à titre d’habitation principale, un logement appartenant aux époux ou dépendant totalement de la succession, il a de plein droit, pendant une année, la jouissance gratuite de ce logement, ainsi que du mobilier, compris dans la succession, qui le garnit. Si son habitation était assurée au moyen d’un bail à loyer ou d’un logement appartenant pour partie indivise au défunt, les loyers ou l’indemnité d’occupation lui en seront remboursés par la succession pendant l’année, au fur et à mesure de leur acquittement. Les droits prévus au présent article sont réputés effets directs du mariage et non-droits successoraux. Le présent article est d’ordre public ». Le législateur, en édictant cet article, a souhaité que le conjoint survivant puisse maintenir son cadre de vie, au moment où il en a le plus besoin, au moment le plus rude de sa vie, c’est-à-dire au décès de son conjoint.
Dans quelle mesure le législateur améliore-t-il la situation du conjoint survivant en le protégeant par le biais du droit annuel au logement instauré par l'article 763 du Code civil ?
Cette question du droit annuel au logement met en évidence certains enjeux, notamment la question de la gratuité de la jouissance du logement : en effet, il faut se demander si le conjoint successible doit supporter certains frais tels que les taxes d’habitation ou encore les droits successoraux sur le logement. De plus, la question de la nature du logement est importante : il faut se demander si les solutions sont les mêmes selon que le logement appartienne aux deux époux, pour partie indivise au conjoint défunt, ou qu’il soit loué.
Afin de déterminer comment l’article 763 du Code civil protège effectivement le conjoint survivant, il faut tout d’abord s’intéresser aux caractères du droit annuel au logement qu’il consacre (I) puis à la mise en œuvre de ce droit (II).
I° La mise en œuvre du droit annuel au logement du conjoint survivant.
L’article 763 du Code civil pose dans son premier alinéa les conditions relatives à la mise en œuvre du droit annuel au logement du conjoint survivant (A), conditions qui, si elles sont réunies, permettront au conjoint de jouir gratuitement du logement familial pendant un an aux frais de la succession (B).
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