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Commentaire de l'article 61-5 du Code civil

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Par   •  9 Novembre 2020  •  Commentaire de texte  •  1 975 Mots (8 Pages)  •  1 340 Vues

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Commentaire de l’article 61-5 du Code civil

        L’égalité des sexes dans le droit français est établie depuis la Constitution de 1946. Pourtant, le sexe est aujourd’hui encore au centre de débats juridiques et montre qu’il n’a pas fini de mettre le droit à l’épreuve du temps. En droit français il existe deux sexes ; homme et femme, qui sont inscrits dans l’état civil des individus à leur naissance. Si il était jusqu’à présent très difficile voir impossible pour un justiciable français de faire modifier la mention de son sexe à l’état civil, une disposition dans la loi française apporte désormais la possibilité de le faire.

        Le texte de cette disposition est inscrit à l’article 61-5 du Code civil. Il a été créé avec la loi n°2016-1547 du 18 novembre 2016 et reste à ce jour en vigueur tel qu’il a été promulgué. Voté par la XIVe législature de la Ve République, cet article voit le jour dans un climat assez sceptique quant à son contenu, la modification de la mention du sexe des individu à l’état civil porterait atteinte pour certain à l’indisponibilité de l’état des personnes et provoquerait ainsi de l’insécurité juridique. Il vient entériner une jurisprudence nouvelle, qui a connu des évolutions au cours des dernières décennies, et permet aux personnes qui le souhaitent de faire modifier la mention de leur sexe à l’état civil, selon certaines conditions.

Situé au titre II du livre I du Code civil, relatif aux personnes, cet article concerne donc directement les justiciables. Il est au début du Code civil, accolé aux articles traitant des actes d’état civil, preuve de son importance et de sa portée particulière ; il peut en effet influer sur des données à la base de la personnalité juridique des personnes.

Il est cependant récent, et nécessiterait un retour d’expérience complet avant d’envisager de le modifier. Il pose cependant déjà quelques questions, notamment par rapport à son interprétation et à son application.

        Dans quelle mesure l’article 61-5 du Code civil encadre-t-il légalement la modification de la mention du sexe à l’état civil ?

        Si cet article entérine la possibilité de faire modifier la mention du sexe à l’état civil (I), les conditions de ce changement restent encore floues malgré les dispositions énoncées par le texte de loi (II).

I - La possibilité légale de modifier la mention du sexe à l’état civil

        L’article 61-5 du Code civil consacre un nouveau droit qui a été contesté (a) et l’encadre juridiquement (b).

        a. Un nouveau droit contesté

        L’article 61-5 du Code civil dispose dans son alinéa premier que « [t]oute personne majeure ou mineure émancipée qui démontre par une réunion suffisante de faits que la mention relative à son sexe dans les actes de l'état civil ne correspond pas à celui dans lequel elle se présente et dans lequel elle est connue peut en obtenir la modification ». Il consacre ainsi le droit de faire modifier la mention de son sexe à l’état civil si on ne se sent pas appartenir au sexe auquel on a été identifié à la naissance.

Ce droit a été réclamé notamment par les personnes transsexuelles. En effet, ces dernières ne se sentent pas appartenir à leur sexe physique, biologique de naissance et souhaitent que leur état civil corresponde au sexe auquel elle s’associe psychologiquement. Cependant, le droit français a été réticent à cette modification de la mention du sexe dans l’état civil, en témoignent les arrêts rendus par la première chambre civile de la Cour de cassation les 31 mars 1987 et 21 mai 1990, et il faut attendre que la France soit condamnée par un arrêt de la CEDH du 23 mars 1992 pour que l’Assemblée plénière de la Cour de cassation autorise la modification de la mention du sexe à l’état civil dans son arrêt du 11 décembre 1992. Elle impose cependant que l’individu souhaitant changer de sexe à l’état civil produise la preuve de son changement définitif, cette preuve consistant le plus souvent en une opération médico-chirurgicale de changement de sexe physique.

Après la loi du 18 novembre 2016, la première application de l’article 61-5, accompagné d’un des trois articles reliés au changement de sexe à l’état civil promulgués avec lui, l’article 61-6, est faite par la cour d’appel de Montpellier dans son arrêt du 15 mars 2017. L’article 61-6 du Code civil entérine, lui, le fait qu’un tribunal ne peut plus refuser la modification de la mention du sexe à l’état civil sous prétexte de l’absence de modification médico-chirurgicale, comme ça a pu être le cas avec les arrêts de la première chambre civile de la Cour de cassation des 7 juin 2012 et 13 février 2013.

        b. Un droit encadré juridiquement

        En plus de l’article 61-5, la loi du 18 novembre 2016 a promulgué les articles 61-6, 61-7 et 61-8, respectivement relatifs au droit de ne pas se faire opérer afin de changer de sexe à l’état civil, à la mention de ce changement sur les actes de naissance et au fait que ce changement n’impacte en aucun cas les obligations et filiations des individus.

L’article pose les conditions de ce changement de sexe à l’état civil. En effet le texte énumère les différentes conditions requises ; « Les principaux de ces faits [nécessaires à démontrer la volonté de changement de sexe], dont la preuve peut être rapportée par tous moyens, peuvent être : 1° Qu'elle se présente publiquement comme appartenant au sexe revendiqué ; 2° Qu'elle est connue sous le sexe revendiqué de son entourage familial, amical ou professionnel ; 3° Qu'elle a obtenu le changement de son prénom afin qu'il corresponde au sexe revendiqué ; ». On a ainsi trois conditions qui permettent de justifier la volonté de faire modifier la mention de sexe à l’état civil.

L’article est construit de telle sorte qu’il ressemble à une démonstration. Il montre ce qu’il attend des justiciables qui souhaitent changer de sexe à l’état civil. En effet il aborde en premier lieu les individus concernés, « [t]oute personne majeure ou mineure émancipée », un mineur émancipé étant un mineur à qui un juge des tutelle à accordé le droit d’être juridiquement majeur. Si un individu appartient à cette catégorie et souhaite faire modifier la mention de son sexe à l’état civil, il lui suffit de suivre le déroulé de l’article. Vient ensuite la démonstration nécéssaire à produire afin de changer de sexe civilement ; il faut « une réunion suffisante de faits » qui « démontre » la non-correspondance de son sexe civil. En effet, cet individu doit se « présente[r] et [être connu] » comme appartenant au sexe opposé afin de prouver sa bonne volonté et la véracité de sa demande. Une fois cela fait seulement, le juge peut accéder à sa demande. L’article nous donne ensuite trois « principaux […] faits » permettant d’appuyer la demande.

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