Commentaire d’arrêt : SARRAN, CE, Ass., 30 octobre 1998
Commentaire d'arrêt : Commentaire d’arrêt : SARRAN, CE, Ass., 30 octobre 1998. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar luvalette2 • 20 Novembre 2017 • Commentaire d'arrêt • 2 314 Mots (10 Pages) • 1 965 Vues
Commentaire d’arrêt : SARRAN, CE, Ass., 30 octobre 1998
La tâche du juge devient de plus en plus difficile car les « parties de cartes » qu’il a à jouer, au sens de l’expression de Max Weber, multiplient les partenaires et compliquent les règles du jeu.
En effet, alors que le juge administratif trouve initialement sa légitimité dans le gardiennage de son propre système juridique, ce dernier s’est vu imposé par la Vème République la mission d’imposer l’applicabilité des traités et accords internationaux valablement adoptés au sens de l’article 55 de notre Constitution, et ce, dans le respect de la hiérarchie des normes imaginée par KELSEN.
Seulement, il apparaît évident que cet ajout incessant de nouvelles normes venant d’ailleurs n’est pas simple à concilier avec le droit interne français. Cette difficulté de conciliation se ressent alors dans un arrêt d’assemblée rendu par le Conseil d’Etat, le 30 octobre 1998.
A l’occasion d’une consultation appelant la population de la Nouvelle-Calédonie à se prononcer sur l’accord signé à Nouméa le 5 mai 1998, relatif au transfert de certaines compétences de la métropole au territoire d’Outre-mer, un décret adopté le 20 août de la même année appelait à la participation de la population à cette consultation, précisant que les mesures d’organisations seraient prises par un décret en Conseil d’Etat délibéré en Conseil des ministres et exposant les conditions nécessaires d’accessibilité au vote, restrictives à une domiciliation de plus de 10 ans sur l’île selon la loi de 1988.
Ainsi, de nombreux citoyens, mécontents des conditions de participation à cette consultation demandèrent l’annulation du décret ainsi qu’un sursis d’exécution, une injonction assortie d’astreinte de procéder à la rectification de la liste électorale et le versement d’une somme au titre des frais exposés, devant le Conseil d’Etat. La Haute juridiction, dans cet arrêt SARRAN, s’attarda à considérer la demande d’annulation de laquelle découlaient les autres requêtes. Dès lors, les demandeurs invoquèrent deux motifs, le premier portant sur la légalité externe avec un défaut de consultation du Conseil Constitutionnel afin de vérifier la régularité des opérations de référendum, mais également un défaut de consultation du Congrès du territoire, normalement nécessaire dès lors qu’il est question du statut et des modalités d’organisation particulières de ce territoire. Le second portait alors sur la légalité interne avec des dispositions émanant des articles 3, 8 et 12 du décret, perçues comme contraires à plusieurs dispositions législatives, mais surtout constitutionnelles, méconnaissant en outre les engagements internationaux pris par la France.
Le Conseil d’Etat a alors dû se positionner sur l’interprétation de plusieurs dispositions constitutionnelles, mais surtout sur l’application d’une loi constitutionnelle ou non, au motif qu’elle serait incompatible avec un traité.
Dans cet arrêt, la Haute juridiction rejette alors tous les griefs faits au décret du 20 août 1998, exposant que ce dernier n’est en fait que le produit de dispositions constitutionnelles qu’il a scrupuleusement appliqué et de ce fait, ne peut alors se voir opposé ni des normes issues de la Constitution ou de son préambule, ni des traités ou accords internationaux, affirmant dans son raisonnement la suprématie de la norme constitutionnelle empêchant toute opposabilité par les engagements internationaux.
Dans cet arrêt de principe, le Conseil d’Etat a ainsi pu clarifier un certain nombre
d’éléments relatif à la Constitution, notamment concernant le procédé de consultation des
populations ainsi que la valeur supra législative reconnue à la loi référendaire de 1988 via
l’article 76 de la Constitution (I). De plus, la Haute juridiction affirme très clairement la
suprématie constitutionnelle sur les traités et accords internationaux en droit interne, la
légitimant alors par une expression de souveraineté populaire primant sur les engagements
extérieurs pris avec d’autres pays. (II)
I. La valeur constitutionnelle de la loi référendaire de 1988 et la consultation des
populations.
Le Conseil d’Etat expose par cet arrêt une certaine volonté pédagogique en clarifiant
tout d’abord le procédé de consultation des populations contenu dans le décret attaqué, qui
n’est alors pas un référendum soumis au contrôle du Conseil Constitutionnel au sens de
l’article 60 de la Constitution, et qui n’entre pas non plus dans l’exigence exposée à l’article
74 de la Constitution relatif à la consultation de l’assemblé territoriale intéressée (A). La
Haute juridiction se prononce alors également sur la loi référendaire de 1988, rappelée dans le
décret, fixant les conditions d’accessibilité au vote, en lui accordant une valeur
constitutionnelle au regard de l’article 76 de la Constitution (B).
A. Une consultation des populations aux caractères spécifiques.
La consultation est un procédé électoral voire référendaire, par lequel les habitants
d’un territoire déterminé, local vont être amené à se prononcer sur une question qui leur ai
posé.
En l’espèce, le décret du 20 août 1998 amenait les populations de Nouvelles Calédonie à se
prononcer et se déterminer sur une question relative aux accords de Nouméa transférant
certaines compétences de la métropole à l’île. Les requérants appelaient alors à l’annulation
de ce décret, au motif que l’article 60 prévoyant la vigilance du Conseil Constitutionnel quant
à la régularité des opérations du référendum et la proclamation des résultats n’avait pas été
respecté.
Mais
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