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Commentaire d’arrêt 30 mars 2004

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Par   •  25 Septembre 2020  •  Commentaire d'arrêt  •  1 831 Mots (8 Pages)  •  824 Vues

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Commentaire d’arrêt 30 mars 2004

L’arrêt soumis à notre étude a été rendu par la 1e chambre de la Cour de cassation le 30 mars 2004 et porte sur la reconnaissance de la qualité d’associé à l’apporteur en industrie.

En l’espèce, un huissier de justice et un clerc ont constitué une société civile professionnelle, dans laquelle l’huissier détient l’intégralité du capital social. Le clerc est quant à lui exclusivement apporteur des parts en industrie. Il s’est par ailleurs engagé à racheter la moitié des parts sociales de l’huissier de justice dans un délai d’un an. Au bout d’un an, l’huissier de justice assigne le clerc en dissolution de la société civile professionnelle.

La cour d’appel accueille la demande de l’huissier de justice et déboute le clerc au motif qu’une société d’huissier de justice peut être dissoute s’il ne reste qu’un associé unique.

Le clerc forme alors un pourvoi en cassation.

Il est demandé à la Cour de cassation de répondre à la question suivante : peut-on dissoudre une société civile professionnelle d’huissier de justice lorsqu’il existe deux associés dont l’un est exclusivement apporteur en industrie ?

Dans son arrêt du 30 mars 2004, la 1e chambre de la Cour de cassation répond par la négative. Elle casse donc le pourvoi, sur le fondement des articles 1844-5 du Code civil et 85 du décret du 31 décembre 1969, au motif qu’un associé même s’il n’est titulaire que de parts en industrie reste un associé.

Une telle solution avait déjà été entrevue en 1998, en effet la 1e chambre civile de la Cour de cassation avait affirmé qu’ « en cas d’augmentation de capital par incorporation de réserves, l’apporteur en industrie bénéficiait de droits sociaux ordinaire en raison de sa vocation aux bénéfices ».

Malgré les particularités attachées à la notion d’apport en industrie, l’apporteur en industrie peut-il être envisagé comme un véritable associé ?

Nous verrons tout d’abord les particularités attachées à la notion d’apport en industrie qui ont induit en erreur les juges du fond (I) avant de nous intéresser à la volonté du juge du droit d’unifier la notion d’apport en industrie aux autres types d’apport (II).

  1. Un apport bien particulier

L’apport en industrie est un apport personnel à bien différencié des autres types d’apport (A) et qui bénéficie également d’un régime singulier (B).

  1. Un apport distinct et personnel

Dans son ouvrage, Alexis Constantin souligne le fait que le mot apport a un double sens puisqu’il désigne à la fois l’opération par laquelle un associé met un bien ou une activité à disposition de la société et également l’objet de cette mise à disposition, bien ou activité.  Par ailleurs, en contrepartie de son apport, l’apporteur se voit attribuer des parts ou actions en plus de la qualité d’associé. D’autre part, en vertu de l’article 1832 du Code civil l’apport est une des conditions essentielles de formation de la société. La doctrine utilise fréquemment la formule « pas d’apport, pas de sociétés » pour résumé l’article 1844-3 du Code civil.  

Le Code civil distingue trois types d’apport : apport en nature, apport en numéraire et apport en industrie. Un apport en nature est la mise à disposition d’un bien autre qu’une somme d’argent. Un apport en capital est l’apport d’une somme. L’apport en industrie revêt quant à lui une caractéristique bien particulière puisqu’il est personnel. En effet l’apport en industrie est l’apport de qualités personnelles, de capacités techniques, d’une notoriété, d’une réputation, d’un savoir-faire autrement dit de son travail dans le domaine spécifié qui rend l’apporteur comptable envers la société de tous les gains qu'ils réalisent par son activité. En l’espèce, l’huissier de justice a fait un apport en nature et en industrie tandis que le clerc a exclusivement fait un apport en industrie. Il est intéressant de noter que le domaine de l’apport en industrie est plus restreint que le domaine des autres types d’apports. En effet, l’apport en industrie est interdit dans les sociétés par actions, à l’exception de la SAS depuis 2008 et de la SARL depuis 1982. Néanmoins, c’est une forme apport particulièrement utilisée et appréciée dans les structures où l’activité des associés est prépondérante. C’est le cas chez les professions libérales ou chez les agriculteurs.

  1. Un régime singulier ayant servi d’appui à l’argumentation de la Cour d’appel

L’apport en industrie bénéficie d’un statut très spécifique par rapport aux autres types d’apport et s’organise principalement autour de plusieurs caractères particuliers. Tout d’abord, l’apport en industrie ne participe pas à la formation du capital social. Cette spécificité existait déjà au XVIIe et XVIIIe siècles, en effet, on distinguait déjà nettement les apports concourant à la formation du capital social et les apports en industrie. Cette caractéristique du régime de l’apport en industrie a ensuite été consacrée en droit contemporain dans les dispositions générales relatives à la société et plus spécifiquement à l’article 1843-2 al 2 du Code civil. Cette exclusion peut s’expliquer par le fait que l’apport en industrie ne peut servir de gage aux créanciers de la société et par conséquent il ne participe pas à la solvabilité de la société. Plus précisément, l’apport en industrie n’est pas pris en compte pour la détermination du capital social du fait de sa libération successive au fur et à mesure des services rendus, mais également du fait qu’il ne peut être saisis par les créanciers sociaux, ni faire l'objet d'une exécution forcée en nature, à la demande de la société, en raison du caractère intuitu personae de l’apport.

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