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Commentaire d’arrêt 22 mars 2016

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Par   •  6 Décembre 2022  •  Commentaire d'arrêt  •  2 768 Mots (12 Pages)  •  380 Vues

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Devoir : commentaire d’arrêt 22 mars 2016

        Dans son arrêt du 22 mars 2016, la chambre commerciale de la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence en affirmant que le régime de l’action en nullité d’un acte de cession de parts conclu pour un prix indéterminé ou vil tendant à la protection des intérêts privés du cédant relève de celui des actions en nullité relative dont la prescription est fixé à cinq sur le fondement de l’article 1304 du Code civil.

        En l’espèce, trois associés fondateurs d’une société ont conclu un « accord-cadre » le 5 mars 2003 avec un tiers cessionnaire. Trois actes de cession de part découlant de cet accord entrainaient d’une part pour chacun des associés l’obligation de s’engager à céder 5 % du capital de la société au tiers cessionnaire pour le «  prix forfaitaire et symbolique de 500 euros », d’autre part pour le tiers l’obligation de s’engager, pendant une durée minimum de cinq ans, à fournir à la dite société sa connaissance du marché et de l’industrie en qualité de directeur commercial. Sept ans après, le 17 mars 2010, les cédants ont assigné le tiers cessionnaire, à titre principal, en nullité des cessions de parts pour indétermination du prix, à défaut, pour vileté du prix au motif que le tiers précité avait défailli dans l’exécution de ses obligations. Le tiers cessionnaire a quant à lui soulevé la prescription de l’action en nullité tout en réclamant le paiement de dommages et intérêts.

        Après un premier jugement rendu par les juridictions du fond déboutant la demande d’action en nullité absolue du contrat par les cédants, et suite à l’arrêt infirmatif de la Cour d’appel de Versailles au motif que l’action introduite par les cédants en ce qu’elle tendait à la protection de leur intérêts privés relevait du régime des actions en nullité relative dont la prescription est fixé à cinq ans, les cédants se pourvoient en cassation. En l’espèce, les cédants font grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé l’article 1591 et 2261 de Code civil en appliquant à l’action en nullité de l’ « accord-cadre » entre ces derniers et le tiers cessionnaire le régime de la nullité relative alors que, selon eux, en l’absence d’un élément essentiel du contrat, la nullité est absolue de sorte à se voir soumise à la prescription de droit commun relavant de trente ans.

        La Cour de cassation est ainsi amenée à se prononcer sur le régime d’action en nullité applicable à un acte de cession de parts conclu pour un prix indéterminé ou vil tendant à la protection des intérêts privés du cédant en ce que le régime est déterminé au regard de la nature de l’intérêt privé ou général par la règle transgressée et non plus au regard de l’existence ou absence d’un élément essentiel du contrat au moment de sa formation. En ce sens, il convient en l’espèce de s’interroger si un acte de cession de parts conclu pour un prix indéterminé ou vil tendant à la protection des intérêts privés du cédant relève du régime de l’action en nullité relative à la prescription quinquennal au sens de l’article 1304 du Code civil.  

        Dans un premier temps, la Cour de cassation réaffirme qu’un acte de cession consenti à vil prix relève effectivement du régime de la nullité absolue dont la prescription est de trente ans au sens des articles 1591 et 2261 du Code civil en s’appuyant sur les arrêts de la première chambre civil du 4 mars 1993 puis de la chambre commerciale du 23 octobre 2007. Toutefois, dans un second temps, elle rappelle l’abandon de cette solution en ce qu’il ne convient plus de de statuer en fonction de l’existence ou de l’absence d’un élément essentiel du contrat au jour de sa formation mais désormais au regard de l’intérêt privé ou général protégé par la règle transgressée aux fin d’en déterminer le régime de l’action en nullité applicable. Ainsi, elle rejette le pourvoi formé par les cédants en ce que l’action en nullité de l’acte de cession de parts sur le motif qu’il était conclu pour un prix indéterminé ou vil visant ainsi à protéger les intérêts privés des cédant relevait du régime de l’action en nullité relative à la prescription quinquennal au sens de l’article 1304 du Code civil.

        La chambre commerciale de la Cour de cassation opère un revirement de jurisprudence en s’alignant au jugement rendu par la juridiction du fond puis de l’arrêt infirmatif de la Cour d’appel aux fins de poser le principe selon lequel désormais, il convient de déterminer le régime de nullité applicable non plus au regard l'existence ou de l'absence d'un élément essentiel du contrat au jour de sa formation (I) mais à celui de la nature de l'intérêt, privé ou général, protégé par la règle transgressée (II).

I. Un contexte jurisprudentiel favorable quant à la détermination du régime de nullité applicable au regard de l'existence ou de l'absence d'un élément essentiel du contrat au jour de sa formation

La chambre commerciale de la Cour de cassation opère l’exposé des précédents arrêts se prononçant sur le régime applicable à une action en nullité (A) au titre desquels la Cour de cassation jugeait « depuis longtemps que la vente consentie à vil prix était nulle de nullité absolue » de sorte à placer l’arrêt dans un contexte jurisprudentiel a priori favorable à la détermination du régime de nullité applicable au regard de l'existence ou de l'absence d'un élément essentiel du contrat au jour de sa formation (B).

A. Un contexte jurisprudentielle favorable au maintient du régime de droit commun de l’action en nullité à la prescription trentenaire avant l’arrêt attaqué

        La chambre commerciale de la Cour de cassation expose les différents arrêts rendus par la Cour précitée au sujet du régime applicable à une action en nullité.

        Ladite chambre expose en effet en premier lieu l’arrêt du 24 mars 1993, dans lequel la première chambre civil de la Cour de cassation jugeait que la « vente consentie à vil prix était nulle de nullité absolue ».

      Ladite chambre expose en second lieu l’arrêt du 23 octobre 2007 dans lequel la chambre commerciale de la Cour de cassation décidait que « la vente consentie sans prix sérieux est affectée d'une nullité qui, étant fondée sur l'absence d'un élément essentiel de ce contrat, est une nullité absolue soumise à la prescription trentenaire de droit commun ».

        En conséquence, que ce soit la première chambre civil ou la chambre commerciale de la Cour de cassation, les deux chambres jugeaient que le prix était un élément essentiel du contrat de sorte à déterminer que la nullité de l’action était absolue. La position de la Cour de cassation dans ces deux arrêts faisait par voie de conséquence de l’action en nullité un régime de droit commun à la prescription trentenaire.

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