Commentaire d'arrêt Civ. 3e, 7 juillet 2015
Commentaire d'arrêt : Commentaire d'arrêt Civ. 3e, 7 juillet 2015. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Léa Brahmi • 18 Novembre 2017 • Commentaire d'arrêt • 2 093 Mots (9 Pages) • 1 960 Vues
TD 2 – Contrats spéciaux
Le prix de vente
Commentaire d’arrêt rédigé : Civ. 3e, 7 juillet 2015
La troisième chambre civile de la cour de cassation a rendu un jugement le 7 juillet 2015 relatif au prix de vente.
En l’espèce un couple de vendeurs a conclu un contrat de vente avec un parent acquéreur, concernant la nue-propriété de leur bien immeuble, moyennant le versement annuel d’une rente viagère et une obligation nature pour l’acquéreur portant sur une visite régulière du vendeur et de s’assurer de son état de santé.
En première instance, les demandeurs, les vendeurs, au pourvoi ont formulé la demande d’annulation de la vente et le versement dommages-intérêts.
Les demandeurs argumentent leur demande en soutenant que leur bien aurait été sous-évalué et que le montant de la rente viagère serait inférieur aux revenus que ce bien était susceptible de leur rapporter.
En deuxième instance, dans une décision rendue le 5 décembre 2013 la Cour d’appel de Nîmes considère que le prix convenu entre les parties était réel et sérieux.
Elle appui sa décision en se référant au fait que les vendeurs conservaient le droit d’usufruit sur le bien, et que les arrérages perçus par la rente étaient assortis d’une obligation en nature, évaluée par eux à hauteur de 60 000€. De plus, elle rappelle que l’acquéreur paye également les impôts et les taxes relatives au bien.
Les vendeurs ont alors formé un pourvoi en cassation faisant grief à l’arrêt rendu par la Cour d’appel.
La Cour de cassation rejette le pourvoi dans une décision rendue le 7 juillet 2015.
Les magistrats s’interrogent sur le point de savoir si la rente viagère versée par l’acquéreur aux vendeurs est inférieure au revenu que le bien immeuble aurait pu leur procurer. Ils doivent également se demander si cela constitue un vil prix.
La Cour de cassation a statué en rejet. Elle confirme donc la position de la CA qui a statué « souverainement » au motif que le prix convenu entre les parties était réel et sérieux, au regard des revenus procurés par un capital équivalent à la nue-propriété du bien immeuble.
On peut s’interroger sur le point de savoir si le contrat de vente moyennant rente viagère s’attache plus au prix réel et sérieux qu’à son caractère aléatoire.
Il sera question d’identifier dans un premier temps en quoi le prix est déterminant de la qualification d’un contrat de vente (I), puis d’appliquer ces conditions au contrat de vente moyennant rente viagères (B).
- L’existence d’un prix pour qualifier le contrat de vente
Le prix est une somme d’argent que l’acquéreur doit payer au vendeur en contrepartie de l’aliénation de la chose transmise. Il constitue un élément essentiel à la vente, et permet de qualifier le contrat de vente. Le prix a deux principes fondamentaux, il doit être déterminé (A), mais également réel et sérieux (B).
- Un prix déterminé par les parties
Il doit y avoir un accord des parties sur le prix. Ce prix consiste en une somme d’argent, sinon le contrat serait un échange ou un contrat innomé. Un désaccord sur ce prix ou sur des modalités de paiement si les parties en ont fait un élément essentiel, empêche la conclusion de la vente, au contraire d’une volonté obscure ou ambiguë, qui appelle seulement l’interprétation.
Le montant du prix doit être déterminé par accord des parties au moment de la formation du contrat et indiqué dans l’acte sinon la vente est nulle, voire inexistante (art. 1591).
La vente est formée par le seul échange des consentements du vendeur et de l’acquéreur, le consentement produit en principe un effet instantané et définitif.
En l’espèce, le contrat de vente conclu entre les cédants et le cessionnaire constitue un prix qui a visiblement été approuvé par les deux parties. En effet, en contrepartie du transfert de la nue-propriété d’un immeuble habitable, l’acquéreur doit verser un prix estimé à 60 000€ sous forme d’une rente viagère, en plus d’obligations. De plus, il n’est pas question ici d’un défaut du consentement mais plutôt un défaut de prix en rapport avec une mauvaise évaluation de celui-ci au moment de la conclusion du contrat.
- Présence d’un prix réel et sérieux
Le prix doit être réel et sérieux pour que la vente soit valable. L’article 1169 du Code civil dispose que « un contrat à titre onéreux est nul lorsque, au moment de sa formation, la contrepartie convenue au profit de celui qui s’engage est illusoire ou dérisoire. Il ne suffit pas que la vente ait été voulue, c’est-à-dire qu’il y ait eu un consentement des parties, il faut aussi que l’obligation du vendeur ait une contrepartie, le prix.
Ce qui s’oppose au prix réel c’est le prix fictif, dont il a été convenu entre les parties, dès la conclusion du contrat, qu’il ne serait jamais payé. Il a un caractère subjectif en ce qu’il s’attache à l’intention des parties.
Un prix est sérieux lorsqu’il n’est pas dérisoire. Il est dérisoire lorsqu’il est inexistant ou ridiculement bas, ce qui est un caractère objectif en ce qu’il s’attache à l’existence matérielle du prix. Le prix dérisoire est différent du prix insuffisant, c’est le problème de la lésion.
L’utilité de la théorie du prix sérieux apparaît surtout lorsqu’une vente n’est pas rescindable pour cause de lésion où dans la vente moyennant rente viagère il n’y a pas de prix sérieux lorsque cette vente manque d’aléa.
En l’espèce, en statuant en rejet le 7 juillet 2015, la Cour de cassation a approuvé la position prise de la Cour d’appel de Nîmes le 5 décembre 2013. En effet, la Cour d’appel considère qu’en l’espèce que le prix convenu entre les parties était réel et sérieux.
Pour justifier sa décision, sur le point de savoir si le montant de la rente viagère était inférieur aux revenus que le bien vendu était susceptible de rapporter, la Cour d’appel s’est « référée aux revenus procurés par un capital équivalent à la valeur de la nue-propriété de l’immeuble ». Cela veut dire que la Cour d’appel a recherché si la valeur bien démembrée en nue-propriété, avait une valeur équivalente à celle de l’usufruit. On en déduit qu'un nu-propriétaire ne peut pas jouir du bien et par conséquent ne reçoit pas les fruits que produit sa propriété.
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