Cass., Com. 5 juillet 2016, n°14-28879
Commentaire d'arrêt : Cass., Com. 5 juillet 2016, n°14-28879. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar dev52012 • 23 Octobre 2017 • Commentaire d'arrêt • 2 016 Mots (9 Pages) • 1 148 Vues
Document 2 : Cass., Com. 5 juillet 2016, n°14-28879
En l'espèce, un fonds de commerce de boulangerie est vendu par un couple à une société. Le prix de ce fonds de commerce est calculé selon un pourcentage résultant du chiffre d'affaire de cette dernière. L'acte de vente comporte une clause selon laquelle la société du couple vendeur s'engageait à se fournir auprès de l'acheteur, et une autre clause permettant de mettre fin à cet approvisionnement s'il n'était pas fait de manière régulière. Néanmoins, la société après avoir pris possession du fonds de commerce a augmenté ses prix, et les vendeurs ont peu à peu cessé de se fournir auprès de cette dernière.
La société acheteur assigne les vendeur en réparation de son préjudice. La Cour d'appel leur donne raison et condamne la société à payer solidairement au demandeur une somme de 300.000 euros au titre de dommages et intérêts.
Les époux se pourvoient en cassation. Premièrement, le couple reproche à la Cour d'appel de ne pas avoir fait rentrer dans la clause lui permettant de faire cesser l'approvisionnement si "celui-ci n'était pas assuré de manière régulière", l'augmentation tarifaire de la société Boulangerie dans la mesure où ceci l'empêcherait de pratiquer des prix de revente concurrentiels. Deuxièmement, le couple reproche à la Cour d'appel d'avoir qualifié l'augmentation de prix de "tout à fait conformes à ceux du marché" alors qu'elle était obligée de revendre à perte.
L'augmentation unilatérale du prix peut-elle constituer un abus dans la fixation du prix peut-il fonder une société à faire cesser le contrat?
La chambre commerciale de la Cour de cassation dans l'arrêt du 5 juillet 2016 répond par la négative, et casse et annule l'arrêt rendu par la Cour d'appel qui avait alloué à la société acheteur des dommages et intérêts d'un montant de 300.000 euros en réparation son préjudice. Elle considère tout d'abord que les prix consentis aux vendeurs étaient anormalement bas quand le fonds était exploité par les vendeurs car intérêts a sous facturer les livraisons faites à eux-mêmes, que la hausse des prix étaient conformes à ceux du marché, qu'il n'y avait pas de revente à perte et enfin que cette augmentation unilatérale ne les a pas empêchés de pratiquer des prix concurrentiels.
Il conviendra d'étudier dans un premier temps le caractère non abusif dans la fixation unilatérale du prix (I), et dans un second temps les conséquences de la résolution du contrat (II).
I- Le caractère non abusif dans la fixation unilatérale du prix
La Cour de cassation, en refusant de qualifier la hausse des prix d'abusive soulève l'étude en premier lieu de la possibilité d'augmenter unilatéralement des prix d'approvisionnement (A), et en second lieu la conformité des nouveaux tarifs vis-à-vis du marché (B).
A- L'augmentation unilatérale des prix d'approvisionnement
En l'espèce, il s'agissait de la vente d'un fonds de commerce, et le prix de ce fonds de commerce était déterminé par le chiffre d'affaires. Ce chiffre d'affaires dépendant de l'approvisionnement, le fournisseur, qui a acquis le fonds de commerce s'est mis à augmenter ses prix unilatéralement, ce qui a conduit à la réduction, pour finalement totalement aboutir à la cessation de l'approvisionnement des distributeurs auprès de ce dernier.
Il faut rappeler qu'en droit positif, les arrêts rendus le 1er décembre 1995 par l'assemblée plénière de la Cour de cassation, codifiés aux articles 1164 et 1165 du Code civil permettent la fixation unilatérale du prix. Ainsi, dans l'arrêt étudié, il faudra se pencher sur l'article 1164. L'alinéa 1er dispose qu'il est possible dans un contrat cadre que l'une des parties puisse fixer unilatéralement le prix plus tard. L'alinéa 2 dispose que si cette partie abuse de son pouvoir de fixation unilatérale, l'autre partie peut demander la résolution du contrat ou des dommages et intérêts.
L'augmentation des prix par le fournisseur se justifiait par ces derniers du fait que "les vendeurs s'appliquaient à vider de sa substance" le chiffre d'affaires, qui constituait pourtant en l'espèce l'essence même du contrat formé.
Désormais, il faut soulever qu'en droit de la vente, l'article 1223 du Code civil qui dispose que "le créancier peut obtenir une réduction proportionnelle du prix donc quand le prix est excessif ou abusif", permet au débiteur du prix, celui qui doit payer en cas de prix abusif, de le réduire lui-même, sans passer par le juge, de sorte que dans de nombreux contrats conclus depuis le 1er octobre 2016, on aura le fournisseur qui fixe unilatéralement le prix d'une part, et d'autre part, l'approvisionné qui, s'il estime le prix excessif ou abusif va réduire proportionnellement le contrat. Donc on a deux déterminations unilatérale du prix celle du fournisseur et celle de l'approvisionné.
Le pourvoi soulève que cette hausse des prix unilatérale constitue une cause légitime rentrant dans la clause prévue leur permettant de faire cesser la convention si celle-ci "n'était pas assurée de manière régulière", ne lui permettant pas de pratiquer des prix de revente concurrentiels, et relève que cela constitue un abus de la part de la société acheteur. Il sera donc étudié en deuxième partie cette "pratique des prix de revente concurrentiels", en somme, la conformité des nouveaux prix vis-à-vis du marché.
B-La conformité des nouveaux tarifs au marché
Le pourvoi considère que la hausse brutale et unilatérale des prix de la société acheteur obligeait les acheteurs à pratiquer des reventes à perte. Or, la Cour d'appel dans son jugement considère que les prix sont conformes au marché et cette augmentation ne constitue dès lors pas un abus. Ainsi, la définition d'un abus est la présence du caractère disproportionné entre le prix appliqué et celui du marché.
En l'espèce, le juge a donc apprécié le caractère non abusif de cette hausse des prix, considérant que les prix pratiqués étaient "tout à fait conformes à ceux du marché". Et ici, la Cour de cassation et les juges du fonds s'entendent pour relever plusieurs faits allant dans le sens d'un respect des prix pratiqués vis-à-vis de ceux du marché. En premier lieu, elles relèvent qu'à l'époque où les vendeurs se fournissaient à eux-mêmes, les prix étaient "anormalement bas", et ce dans leur intérêt. De ce fait, une multiplications d'indices appréciés par la Cour d'appel puis par la Cour de cassation permettent d'affirmer la conformité des nouveaux prix par rapport au marché.
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