CE, ass., 27 octobre 1995, commune de Morsang-sur-Orge
TD : CE, ass., 27 octobre 1995, commune de Morsang-sur-Orge. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Mathilde Izard • 26 Mars 2019 • TD • 1 072 Mots (5 Pages) • 1 329 Vues
L’extension des objectifs pouvant justifier une mesure de police est toujours source d’incertitudes, comme en témoigne l’arrêt CE, Ass, 27 octobre 1995, Commune de Morsang-sur-Orge.
Dans la commune de Morsang-sur-Orge, un maire a pris un arrêté visant à interdire la pratique de « lancer de nains » qui devait avoir lieu dans le cadre d’un spectacle dans une discothèque sur le territoire de la commune. Le maire a pris cet arrêté en se basant sur l’atteinte à la dignité humaine que ce spectacle pouvait provoquer. La société de production du spectacle et M. X saisissent le tribunal administratif de Versailles afin de faire annuler cet arrêté.
En prenant cette décision, le maire s’appuie sur son pouvoir de police administrative générale, qui vise au maintien de l’ordre public général. Ce dernier n’est pas précisément défini par la loi, mais on admet qu’il est composé de la préservation de la sécurité, la tranquillité, la salubrité, la moralité et la dignité humaine. L’article L-2212 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) précise que la police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publique. Une mesure de police administrative n’est pas régulière si elle ne tend pas à préserver l’ordre public. Au niveau national, l’autorité de police administrative générale est le Premier Ministre, au niveau local c’est le préfet, et au niveau de la commune c’est le maire.
En première instance, l’arrêté municipal sera annulé, le maire va alors saisir le Conseil d’Etat. Le Conseil d’Etat va avoir une position opposée à celle du tribunal administratif de Versailles, qui avait considéré que le maire ne pouvait faire interdire le spectacle en se basant sur l’atteinte à la dignité de la personne humaine en l’absence de circonstances particulières.
Dans cet arrêt, le Conseil d’Etat érige donc pour la première fois la dignité de la personne au rang des composantes de l’ordre public. Ce principe doit donc être respecté en vue de la préservation de l’ordre public, même en l’absence de circonstances locales particulières.
Cet arrêt du Conseil d’Etat permet d’observer l’extension morale de la notion d’ordre public (I), ainsi que l’extension matérielle des pouvoirs de police administrative (II).
L’extension morale de la notion d’ordre public
La notion d’ordre public s’étend à des questions morales : le Conseil d’Etat affirme la primauté de la dignité de la personne humaine (A), les libertés individuelles s’ajustent en fonction de l’ordre public (B).
A. Primauté de la dignité de la personne humaine
Cet arrêt est en accord avec la tendance de la Jurisprudence qui s’inscrit dans une évolution extensive de la notion d’ordre public. En effet, il fait suite à un arrêt de section rendu par le Conseil d’Etat en 1959 (société les Films Lutétia) : le caractère immoral du film et les circonstances locales ont été jugées préjudiciables à l’ordre public. Le juge prend en compte le contexte local (critère matériel), le contenu du film ne suffit pas. Le respect de la dignité de la personne humaine fait partie des composantes de l’ordre public. Ce principe fait référence à l’article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH) : « Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ». Dans le cas de la situation de l’affaire de la commune de Morsang-sur-Orge, la notion de respect de la dignité de la personne humaine prime
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