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CE 2000 Mlle marteaux

Dissertation : CE 2000 Mlle marteaux. Recherche parmi 300 000+ dissertations

Par   •  3 Avril 2016  •  Dissertation  •  3 496 Mots (14 Pages)  •  3 008 Vues

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CE, Avis, 2000, Mlle Marteaux

Faits : Mademoiselle Julie Marteaux, surveillante d'externat intérimaire à temps complet, a été révoquée de ses fonctions, par arrêté en date du 24 février 1999 du recteur de l’académie de Reims, en raison du fait qu'elle portait un signe d'appartenance religieuse pendant son service.  

Procédure : Mademoiselle Julie Marteaux a dès lors saisi le Tribunal administratif de Châlons-enChampagne d’une requête tendant à l’annulation de l’arrêté du 24 février 1999. Par application des dispositions de l’article 12 de la loi n°87-1127 du 31 décembre 1987 portant réforme du contentieux administratif en vigueur à l’époque, le Tribunal administratif de Châlons-en-Champagne sursoit à statuer et saisit le Conseil d’Etat d’une demande d’avis sur trois questions : « 1. les exigences tenant au principe de laïcité de l’Etat et de la neutralité des services publics qui fondent l’obligation de réserve incombant à un agent public doivent-elles être appréciées en fonction de la nature des services publics concernés ?,  2. Dans le cas du service public de l’enseignement, convientil de distinguer suivant que l’agent assure ou non des fonctions éducatives et, dans cette éventualité, suivant qu’il exerce ou non des fonctions d’enseignement ? »  Et enfin «3. Convient-il, dans certains cas, d’opérer une distinction entre les signes religieux selon leur nature ou le degré de leur caractère ostentatoire ? ».  

Problème de droit : Le fait pour un agent du service public de porter un signe destiné à marquer son appartenance religieuse constitue-t-il un manquement au respect du principe de neutralité du service public ?  

Solution : Dans son avis en date du 3 mai 2000, le Conseil d’Etat énonce que « le fait pour un agent du service de l’enseignement public de manifester dans l’exercice de ses fonctions ses croyances religieuses, notamment en portant un signe destiné à marquer son appartenance à une religion, constitue un manquement à ses obligations ». Etant dans le cadre d’une procédure d’avis, le Conseil d’Etat ne tranche pas l’affaire au fond et laisse le soin à l’Administration, sous le contrôle du juge, d’apprécier la sanction disciplinaire adéquate.  

Portée : Ainsi, l'apport substantiel de cet avis est de donner une consistance fonctionnelle au principe de neutralité du service public et de permettre d'en tirer toutes les conséquences sur le plan des obligations des agents publics à l'occasion de toute activité de service public.

 

        I-         Une liberté de conscience des agents du service public réaffirmée  

Si dans cet avis du 3 mai 2000, le Conseil d’Etat réaffirme la liberté de conscience des agents publics, il énonce sa nécessaire combinaison avec le principe de laïcité (A) pour ensuite rappeler la protection qu’elle leur apporte (B).  

 

A- La nécessaire combinaison entre libertés de conscience des agents publics et principe de laïcité  

« Il résulte des textes constitutionnels et législatifs que le principe de liberté de conscience ainsi que celui de la laïcité

de l'Etat et de neutralité des services publics s'appliquent à l'ensemble de ceux-ci ».

Explication : C’est ce que le Conseil d’Etat a répondu à la première question du tribunal administratif. La rédaction retenue est riche de sens. Tout en affirmant que laïcité et neutralité s'imposaient à tous les services publics le Conseil d'Etat a pris soin de rappeler que tel était également le cas du principe de liberté de conscience, invitant par là même l'administration, sous le contrôle du juge, à combiner entre eux ces différents principes. La liberté de conscience, PFRLR (CC, n° 77-87 DC, 1977,  liberté de l'enseignement) est proclamée de manière générale et absolue à l'article 10 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l'ordre établi par la loi », et rappelée dans le Préambule de la Constitution du 27 octobre 1946 : « Nul ne peut être lésé, dans son travail ou son emploi, en raison de ses origines, de ses opinions ou de ses croyances », tandis que, en ce qui concerne la fonction publique, l'article 6 de la loi du 13 juillet 1983 prohibe les discriminations entre les fonctionnaires « en raison de leurs opinions politiques, syndicales, philosophiques ou religieuses, de leur sexe, de leur état de santé, de leur handicap ou de leur appartenance ethnique ». Quant au principe de laïcité, il a d'abord été consacré, à propos de l'enseignement, par le Préambule de la Constitution de 1946, puis, de manière plus générale, par l'article 1er de la Constitution du 4 octobre 1958 aux termes duquel « la France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale. Elle assure l'égalité devant la loi de tous les citoyens sans distinction d'origine, de race ou de religion. Elle respecte toutes les croyances ».

 

Analyse critique : Le Conseil d’Etat ne s'est pas borné à fonder sa réponse à la première question sur le principe de laïcité (comme l'y invitait en soit le tribunal administratif), il s'est également appuyé sur le principe de neutralité. La laïcité de l'Etat, principe fondamental de l'organisation républicaine, se traduit en effet par la nécessaire neutralité religieuse des services publics. A la différence de la liberté de conscience et de la laïcité la neutralité est un principe d'origine jurisprudentielle. Comme l'écrit Bernard Stirn, « la neutralité et l'indépendance du service public s'imposent sans texte [...] ; elles revêtent par elles-mêmes une importance qui conduit à les regarder comme des impératifs de valeur constitutionnelle ». La liberté de conscience dont jouit chaque agent public, d'abord en sa qualité de citoyen, doit donc se combiner avec les exigences qu'impose, dans le cadre du service, le respect de la laïcité. On voit bien que ces deux principes sont indissociables. Ainsi, la loi du 9 décembre 1905 procède à la séparation des Eglises et de l'Etat et prévoie, dans son article 2, que « la République ne reconnaît aucun culte », mais dans le même temps affirme, dans son article 1er, que « la République assure la liberté de conscience ». En affirmant que les principes de laïcité et de neutralité s'appliquent à l'ensemble des services publics, l'avis du 3 mai 2000 réaffirme qu'il n'existe pas d'exception à cette exigence d'impartialité de l'Etat à l'égard des croyances de tous les membres de la société et n'entre pas, à ce stade, dans la logique suggérée par la question du tribunal qui aurait conduit à une appréciation des exigences en fonction de la nature du service public concerné. Par cette affirmation, qui rejoint le point de vue de Rolland, le CE, dans sa formation contentieuse, fait sienne la position qu'il avait dégagée dans un avis du 21 septembre 1972 de la section de l'intérieur sur la laïcité du corps enseignant : « Les dispositions constitutionnelles qui ont établi la laïcité de l'Etat et celle de l'enseignement imposent la neutralité de l'ensemble des services publics ».

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