Le temps dépend-il de nous ?
Discours : Le temps dépend-il de nous ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Joséphine Vajda-Morel • 26 Novembre 2017 • Discours • 4 563 Mots (19 Pages) • 1 112 Vues
Le temps dépend- il de nous ?
Si je commence ma dissertation la veille du jour où il faut la rendre, la journée de dimanche me paraîtra sûrement plus courte et il se peut que je sois prise par le temps et incapable de la terminer pour le lendemain. Cependant si je commence une semaine en avance, je n'aurai pas cette impression et je disposerai de tout le temps que je veux. Peut-on alors dire que je maîtrise le temps, qu'il dépend de moi ? Il semblerait que oui mais pourtant, entre le moment où le professeur nous donne le devoir et le moment où il faut le rendre, l'exacte même durée s'est déroulée. Le temps fait office de puissance extérieure sur laquelle nous n'avons aucun contrôle mais il nous semble être quelque chose auquel nous sommes liés subjectivement et qui dépendrait de nos affects. On observe ici un paradoxe. Ces temps ne peuvent être les mêmes. Il nous faudra donc différencier le temps subjectif, le temps vécu, celui de l'existence humaine du temps objectif, celui de la durée réelle et peut constituer un objet d'étude pour la science. Dans quelle mesure ces temps qui semblent presque opposés dépendent-ils tous deux de nous ?
En outre, il conviendra de réfléchir selon plusieurs échelles : celle du sujet ainsi que celle de l'homme et sa culture. Cette réflexion possède donc un enjeu ontologique, philosophique mais aussi scientifique.
Si le temps est par nature insaisissable, infini, uni-directionnel et immuable, dans quelle mesure peut-on considérer qu'un être par essence fini et prisonnier du temps peut parvenir à échapper partiellement à son action en modelant son temps vécu? En outre, on peut ainsi se demander si l'homme peut aussi influer sur le temps objectif et de quelle manière ? Quelle relation unit l'individu, le temps et le monde qui les entoure ? La relation qui lie le temps et le sujet est-elle nécessaire ? En outre, notre soumission au temps et son caractère irrémédiable rend-elle impossible la liberté humaine ?
Dans un premier moment de l'argumentation, il s'agira de se pencher sur le caractère insaisissable du temps, qui encadre nos vies et le réel, sans que l'on puisse contrer ses effets. Puisque le temps en soi est insaisissable et impossible à définir, il faudra alors le considérer dans la perspective du sujet conscient pour s'interroger sur l'influence de l'individu sur son temps vécu. Après avoir constaté que le temps ressenti dépend en partie du sujet, il faudra élargir notre réflexion et examiner comment l'humanité cherche à maitriser et façonner le temps. En outre, il s'agira de se demander si l'on peut construire une réflexion pertinente sur le temps objectif ou si nous ne pouvons envisager d'influence sur le temps que par rapport au sujet.
Dans un premier temps, il est nécessaire de dégager les effets du temps sur l'être humain, afin de montrer son caractère irrémédiable qui en fait le maître de notre existence.
A priori, le temps semble l'ennemi premier de l'être et de sa vie. En effet, alors qu'il passe inexorablement, l'homme se trouve incapable d'y changer quelque chose. Il représente avant tout une action invisible que nous subissons sans pouvoir la contrôler. Il exerce une influence visible et irréversible sur les êtres ainsi que sur tous les éléments du réel. Ce temps subi ne connaît qu'une seule direction et impose de nombreux changements d'états à tous les corps. Comment imaginer une influence de l'être sur le temps alors que sa nature même est immuable ? En outre, le temps se trouve intimement lié à l'épreuve de la finitude, ce qui lui confère un rôle de puissance supérieure et menaçante qui détermine notre existence et sa fin. Il paraît donc certain que nous sommes soumis au temps, qui exerce sur tout objet du réel une action et détermine son évolution. Nous sommes mortels car nous appartenons au temps. Notre corps vieillit et perd peu à peu ses qualités comme n'importe quelle créature ou objet artificiel. Bien que l'on puisse ralentir ou accélérer partiellement ses effets en menant un certain mode de vie, notre vieillissement reste en grande partie hors de notre contrôle.Cet effet du temps ne dépend pas de nous, nous sommes impuissants face à la réalité du temps objectif et au cycle naturel de notre corps. Tel les arbres en fonction des saisons, notre corps suit un rythme de vieillissement naturel dans lequel l'homme joue un rôle minime. Il est inutile de vouloir le changer puisqu'il est par nature régulier et non-modulable. Nous ne pouvons en outre jamais l'appréhender directement et nous en rendons compte par des mesures artificielles, comme les aiguilles d'une montre, mais le temps en soi, nous ne serons jamais capable de le mesurer. Nous ne pouvons que le mesurer à l'aide d'intervalles, de fréquences.
Nous n'avons ainsi aucune influence sur ce qui est passé, nous ne pouvons que le contempler, le temps semble nous dérober une partie de notre vie, ce qui a été et n'est plus qu'un souvenir. Notre existence ne nous appartient qu'au présent. Mais le présent est insaisissable et devient instantanément le passé. Le temps semble nous échapper continuellement et il semble de notre entendement ne puisse le concevoir clairement. Face à cette notion abstraite et difficile à concevoir, il convient de se demander : Qu'est-ce que le temps ?
Comment peut-il exercer une action alors qu'il ne semble être qu'un concept abstrait et insaisissable? La question de l'existence du temps mérite d'être posée. Le temps n'est-il pas simplement notre considération de l'existence des choses ? »
Léopardi écrivait ceci « Le temps n'est pas une chose. C'est un accident des choses et indépendamment de l'existence des choses, ce n'est rien. » Il tente ici de décrire la nature inconcevable du temps, qui semble une idée innée simple, et rien d'autre qu'une idée en nous, un concept dont l'existence réelle n'est éprouvée que par l'intermédiaire de la réalité et de la conscience. Léopardi exprime la souveraineté de l'esprit sur le corps, en faisant abstraction de son expérience personnelle, il parvient à remettre en cause l'existence du temps, alors qu'il en sentait chaque jour les effets plus violemment, dû à une maladie dégénérative qui écourta et compliqua grandement sa vie. Léopardi définit le temps par le terme d'accident voulant exprimer qu'il n'a pas de logique propre et de régularité, son existence dépend de l'existence du monde. Il n'est donc pas un concept réel mais seulement un mode de pensée, une idée. Le temps est donc une sorte d'oxymore, une expérience et une abstraction, qui n'est présent que tant que je le pense. Hors de là, le temps et l'individu sont tous deux réduits au néant puisqu'ils ne sont que des conséquences de la conscience humaine. Il existe ainsi une relation d'interdépendance entre le temps et ce qui existe au monde. Le temps ne peut en aucun cas être traité comme un concept empirique, il est mesure de ce qui est mais n'est rien par lui-même, il est un vide infini qu'il faut remplir par l'existence. On conclura donc qu'on ne peut traiter du temps en soi sans buter sur cette considération. En outre, il faut maintenant traiter du lien entre éternité et temps afin de dégager si cette distinction peut nous aider à définir le temps et son lien avec l'homme.
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