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Le tas : négation du corps ?

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Par   •  2 Janvier 2018  •  Dissertation  •  2 363 Mots (10 Pages)  •  795 Vues

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Dissertation de Philosophie n°2

Sujet 2 : Le tas : une négation du corps ?

        Le corps brut peut dans un premier temps se définir d’après Bergson dans son œuvre l’Evolution créative, comme un corps que la perception découpe suivant les lignes de l’action, et qui dès lors ne se différencie pas du simple tas, agglomérat ne devant son unité qu’à sa finalité. Cependant, si cette définition peut s’appliquer aux corps bruts, son application aux corps vivants semble soumise à certaines conditions. Ainsi, le tas présuppose une idée d’indépendance entre les parties, qui même si faisant corps, ne se confondent pas et restent susceptibles de faire sécession à tout moment. Cette indépendance se retrouve également dans les propriétés de l’agglomérat, qui n’est que la parathèse des propriétés de ses parties et non véritable synthèse. Dès lors, on peut se demander dans quelle mesure un agglomérat de corps bruts peut être considéré comme similaire au corps vivant ? Nous verrons donc un premier temps la notion d’agglomérat comme réalité matérielle du corps. Nous nous pencherons ensuite sur  l’idée de tas comme opposition au corps organique. Enfin, nous étudierons le lien entre corps et agglomérat et jusqu’à quel point l’un peut donner l’illusion de l’autre, et inversement.

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        Ainsi, dans une conception purement matérielle du corps, le tas ne se présente pas comme antithétique à ce dernier. Cette idée de corps comme assemblement d’éléments minuscules et indivisibles est donc tout d’abord mise en avant par le biais de la philosophie atomiste. Celle-ci est ensuite approfondie mais néanmoins nuancée par la conception cartésienne d’un corps comme substance étendue. Enfin, on peut rapprocher le corps et le tas par rapport à la capacité d’adaptation du second dont l’étendue est en perpétuelle évolution.

        Ainsi, pour exister le tas, en tant qu’assemblage d’éléments, doit présupposer l’existence de ces derniers. Or dans le domaine corporel, l’hypothèse de l’existence de cet infiniment petit débute dès l’antiquité avec Démocrite qui pose les bases de la philosophie atomiste. Celle-ci, reprise en partie par d’autres philosophes atomistes tels que Epicure ou Lucrèce, tout en divergent sur certains points, considère donc les corps comme combinaisons d’atomes, éléments compacts est indivisibles définis par leurs tailles, leurs formes et leurs poids. Ceux-ci, s’assemblent donc de manière non-arbitraire et selon un principe d’économie, afin de former des organes puis des corps. On parle en ce sens de corps céleste dans le domaine astronomique, corps pouvant par ailleurs s’apparenter à de simples tas, à l’image d’un astéroïde agglomérant des particules par sa force gravitationnelle. Or les qualités corporelles, tout comme celle du tas, naissent de cet assemblage d’atomes, dépourvus individuellement de quelconque qualité. Cette physique qualitative, s’opposant à la physique moderne quantitative, prend donc le parti d’un corps comme agglomération d’une quantité d’atomes, gage de la création d’un tout pourvu de qualités. On pourrait néanmoins ici objecter que le corps se différencie du tas par sa capacité de synthèse, et que les atomes, voir les organes, séparés du corps, perde toute qualité individuelle, contrairement à l’agglomérat dont les éléments peuvent être séparés tout en conservant des qualités propres. Démocrite sera d’ailleurs sur ce point plus modéré que ces successeurs, ne considérant les qualités que comme des apparences, et s’attachant avant tout à une connaissance plus abstraite et intellectuelle des corps.

        Sur ce point la philosophie cartésienne permet donc encore de rapprocher corps et tas par la notion de substance étendue. Ainsi, Descartes dans Méditations Métaphysique, définit tout d’abord le corps comme une substance située dans l’espace, occupant un volume, habitée par un mouvement et susceptible d’être divisée. Cette première conception du corps, fondement de tout théorie mécaniste, se rapproche donc de celle du tas, lui aussi situé dans l’espace et disposé à être diviser. Par ailleurs, après avoir effectué son cogito et s’être définit en premier lieu comme substance pensante, Descartes entend reconstruire sa connaissance du monde et remet en doute ses sens. Après l’expérience du morceau de cire, il en arrive donc à la conclusion qu’il ne saisit les corps que par l’entendement, entendement qui lui permet de saisir la continuité de l’être d’un corps qui pourtant ne conserve aucune constance du point de vue sensoriel. On retrouve donc là encore cette idée d’un corps comme agglomérat de matière mouvante, et susceptible à tout moment de changer d’aspect et de forme, voire de retourner à la poussière comme le rappel la condition humaine.

        Le corps se rapproche donc du tas par sa capacité à évoluer tout en conservant son essence. Ainsi, le corps, du latin corpus, le cadavre, peut être considérer comme simple enveloppe charnelle, comme le rappel Platon dans Le Timée. Celle-ci, agglomérat de matière, est donc susceptible de se voir modifiée, qu’elle se retrouve agrandie par le biais de prothèses scientifiques par exemple, ou au contraire diminuée dans le cas d’une amputation. Le corps est donc ici retranché à son utilité, simple outil, et tout comme le tas, n’existe aux yeux de l’homme que par le biais d’une relation d’usage, qui ne lui attribue pas de volonté propre, mais le considère juste du point de vue matériel.

        Cependant, une telle conception du corps, qui le place tout entier sous le control d’une finalité extérieure, ne prend pas en considération la possibilité d’une quelconque finalité interne au corps, qui n’existe pas chez le tas. Dès lors, on peut considérer que le corps, mu par cette finalité interne propre à ses organes, s’organise et s’unit, ce qui le différencie du simple assemblage matériel.

        L’étude de l’anatomie du vivant, telle qu’elle est mise en place par Cuvier, permet donc une première distinction entre corps et tas en dotant les organes de fonctions propres. De plus, cette différence sera par la suite approfondie par Kant, qui distinguera clairement entre le tas matériel inerte et l’organisme vivant. Enfin, il est également possible d’illustrer l’idée de tas comme négation du corps en considérant la métaphore du corps social.

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