Qui la question « qui suis-je » admet-elle une réponse exacte ?
Commentaires Composés : Qui la question « qui suis-je » admet-elle une réponse exacte ?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar szophelia • 25 Janvier 2014 • 3 877 Mots (16 Pages) • 956 Vues
Chapitre 3 : la question « qui suis-je » admet-elle une réponse exacte ?
Introduction
Lorsque l’on pose la question « qui suis-je ? », on espère, à travers la réponse, obtenir des informations qui vont me permettre de me connaître. Me connaître, connaître quelqu’un en général, c’est d’abord être bien informé sur la personne : connaître ses pensées, ses sentiments, mais aussi son histoire, son passé, au point, d’ailleurs, que cette connaissance, si elle est bonne, devrait même nous permettre de prévoir les réactions et actions de la personne en question. Alors, n’est-il pas possible de répondre de manière exacte à cette question ? Dans la mesure, en effet, où je suis moi et où, par conséquent, je ne connais pas, en ce qui me concerne, l’obstacle de l’extériorité qui m’empêche de bien connaître les autres, et même, d’une manière générale, les objets de toute nature qui m’entourent et me sont extérieurs. Dès lors ne puis-je pas répondre exactement et même facilement à la question « qui suis-je ? » par une simple introspection ? Mais une réponse exacte ce n’est pas seulement une réponse informée. C’est aussi une réponse adéquate à la réalité, qui décrive la personne telle qu’elle est réellement. Or, ne suis-je pas incapable de me voir de la sorte ? La réponse que j’apporterai à la question « qui suis-je ? » ne risque-t-elle pas d’être trop subjective pour être exacte ? En dehors de moi, existe-t-il qui que ce soit qui puisse me décrire de manière neutre et impartiale ? Les autres ne risquent-ils pas d’être aussi subjectifs que moi ? Il semble donc qu’on puisse en conclure qu’il n’existe pas de réponse exacte à la question « qui suis-je ». Cela signifie alors que, dans le fond, il n’existerait rien de telle que mon identité. La question « qui suis-je ? » pose en effet aussi la question de mon identité : quels sont les traits qui me définissent et me caractérisent ? Admettre que cette question n’admet aucune réponse exacte, c’est donc admettre que je n’ai pas d’identité précise. Cela ne signifie-t-il pas alors que je n’ai aucune consistance et qu’au contraire mon identité change au gré des circonstances ? N’ai-je pas besoin de penser que la question « qui suis-je ? » admet une réponse exacte pour que mon existence ait une cohérence et que j’en sois véritablement maître ?
Nous voyons donc qu’il est difficile de dire si la question « qui suis-je ? » admet ou pas une réponse exacte. En effet, puis-je me connaître de manière à la fois complète et objective ou dois-je accepter le fait que mon identité ne peut être définie de manière exacte et définitive ?
Nous verrons dans un premier temps que je peux me connaître immédiatement et parfaitement par la simple introspection. Mais, si cela me fournit des informations complètes sur ma personne, est-ce que ça ne m’empêche pas aussi de me connaître objectivement ? Faut-il alors en conclure que mon identité est impossible à connaître ?
Conscience et pensée
Identité et subjectivité
Comme nous l’avons rapidement évoqué en introduction, la question « qui suis-je ? » sollicite, en guise de réponse, la connaissance de la personne. Pouvoir répondre à cette question, c’est pouvoir dire qui est la personne, et cela suppose donc qu’on la connaisse. Connaître quelqu’un, au-delà de la simple connaissance extérieure qui permet d’identifier une personne (connaître son nom et pouvoir donc la reconnaître), cela signifie donc disposer d’informations la concernant. Ces informations sont de différentes natures. On dira que l’on connaît bien quelqu’un lorsqu’on connaît cette personne depuis longtemps. On connaît donc son histoire, son vécu, son passé et ainsi les différents événements qui ont pu avoir une influence sur sa personnalité actuelle. Bien connaître quelqu’un, cela suppose aussi que je connaisse ses pensées, sa manière d’être, de sentir et de percevoir le monde. Plus j’aurai accès aux pensées intimes de l’autre, plus je serai en mesure de bien le connaître. Ainsi, on estime même que bien connaître quelqu’un doit normalement nous permettre de deviner ou de prévoir ses pensées. Or, en ce qui concerne les autres, aussi proches soient-ils de moi, il m’est impossible d’accéder à toutes ces informations complètement. Puisqu’ils me sont extérieurs, l’accès que j’ai à l’intimité des autres reste toujours imparfait. Même s’ils me communiquent leurs pensées et leurs sentiments, il faudrait vivre avec autrui en permanence pour pouvoir connaître parfaitement son intimité. Et quand bien même, savoir ce que pense l’autre, ce n’est pas pareil que le vivre et le ressentir, et la connaissance que je peux avoir de l’autre reste donc incomplète. Or, précisément, en ce qui me concerne, cette barrière de l’extériorité tombe. J’ai un accès immédiat et total à tous les éléments permettant de me connaître : mes pensées, mes sentiments, mon histoire. Alors, il semble que je puisse répondre de manière exacte à la question « qui suis-je ? » simplement par l’introspection.
Dans la Phénoménologie de la perception, Merleau-Ponty décrit ainsi le mystère insondable que constitue l’autre pour moi. Chaque personne est dotée d’une identité qui est essentiellement constituée par sa manière particulière et subjective de voir le monde, par son point de vue unique sur le monde. Ce point de vue est déterminé par la sensibilité propre à chacun. Dès lors, tout ce que l’autre pourra manifester ou dire ne me permettra jamais de franchir le seuil de sa subjectivité et d’accéder directement à son intimité. Il y a ainsi bien une barrière entre moi et les autres, qui fait qu’ils constituent pour moi un mystère, voire une menace, c'est-à-dire que la connaissance que j’en ai reste nécessaire limitée, leur identité, ce qui les caractérise et les distingue des autres, se trouvant dans leur subjectivité. Mais s’il m’est alors difficile de dire qui sont les autres, je peux facilement, sur cette même base, dire qui je suis moi.
Ainsi, si je peux avoir des doutes sur l’identité des autres, j’ai, en ce qui me concerne, une connaissance immédiate et certaine de moi-même. Je sais, immédiatement, qu’il y a une réponse exacte à la question « qui suis-je ? », une réponse à laquelle j’adhère totalement et qu’il n’est pas permis d’interroger : c’est moi. Cette réponse pourra, sans doute, ne pas satisfaire mes interlocuteurs, mais, en ce qui me concerne, elle est la
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