Liste et intrigue, ordre et rythme - de la méthode cartésienne à l'éthique
Analyse sectorielle : Liste et intrigue, ordre et rythme - de la méthode cartésienne à l'éthique. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar sophie92 • 19 Mai 2015 • Analyse sectorielle • 994 Mots (4 Pages) • 588 Vues
Peut-on dire qu'une grande partie de la civilisation « occidentale » est fondée par la liste première, les 10 commandements de Moïse ? On compte plusieurs versions légèrement différentes des fameuses dix « paroles » bibliques appelées couramment « dix commandements ». Spécificité du judaïsme, ces paroles relèvent aussi d’un écrit, nommément des Ecritures. Il en va de même des listes en général : elles n’ont d’utilité que d’être écrites, notées, consignées (les premiers écrits furent probablement des listes… de marchandises) après quoi elles peuvent bien être mémorisées et récitées « par cœur » (comme le catéchisme à l’ancienne). Pourtant il y a une grande différence entre réciter et lister. Prières, paroles incantatoires, et peut-être poésies (en tant que suites de vers) se prêtent initialement à la récitation orale, tandis que des listes de choses, de tâches ou de règles réclament le concours de l’écrit. Avec les listes écrites, il s’agit précisément de pallier les insuffisances de la mémoire naturelle. Paradoxe, l’avantage mnémotechnique des listes et leur efficacité au plan oral apparaît bien comme un privilège et une conséquence de l’écrit.
Pour revenir à la religion, ce qui s’énonce comme Loi depuis les Hébreux passe par l’écrit, et ceci est capital. Mais les sources de ce texte sont sujettes à caution et, comme on l'a dit, son contenu est variable. Or dans toutes les versions connues – c’est le plus remarquable – cette liste des 10 commandements commence par affirmer l’existence de Dieu et son unicité. Tout le reste en découle. Ce n’est pas l’effet de liste qui compte, c’est son point de départ. Par suite, tout ce qui compose le fait religieux avec ses motifs symboliques, ses codes rituels ou ses règles, se formule et se transmet volontiers sous forme de listes. Mais à oublier le fondement – Dieu comme Être Unique, et surtout « au-delà », comme Autre – l’usage des listes parait de plus en plus arbitraire et vire facilement au fanatisme, à la manie, à l’intolérance.
Ces dix commandements sont peut-être fondateurs d’une civilisation, mais non de la culture en général, bien entendu. Remarquons qu’une règle tout à fait fondatrice fait défaut dans l’énoncé des 10 commandements ; non qu’elle y soit absente, plutôt elle s’y niche et s’y dissimule comme l’implicite et la possibilité même de toutes les autres. Ce texte – cette liste – tient pour acquis l’Interdit de l’inceste, qui est la condition de tout échange socialement viable, y compris et surtout l’échange symbolique, donc de toute parole, de tout énoncé juridique ou religieux. Faut-il en déduire que toute liste partant d’un premier (Un) jusqu’à un dernier terme ne tire sa consistance que d’un élément (Zéro, ensemble vide) lui-même absent de la structure ou de la liste ?
2) Liste et suite, ordre et rigueur – De la méthode à l’éthique cartésiennes
Procéder par ordre et avec mesure, tel était la consigne de Descartes dont le nom désigne une doctrine souvent incomprise, notamment par ceux qui brandissent les vertus libératoires de la fantaisie et de l’imagination face à une supposée « sécheresse » de la raison. Ce qui importe pour un philosophe comme Descartes, ce n’est pas l’ordre en
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