La Loi Du Plus Fort

LA JUSTICE DE LA LOI DU PLUS FORT COMME ENNEMIE DE LA PHILOSOPHIE : ENTRE

RHÉTORIQUE ET PARADIS FISCAUX

Par Martin Marier

Introduction : qu’est-ce que la Justice?

Longtemps, la Justice (Dikê) désigna l’activité de Zeus lui-même, dieu de la foudre et père

d’Héraclès, qui, du haut de l’Olympe, descend avec la lumière du Soleil (Hélios) pour intervenir

et agir à l’aide de « paroles ailées » (ptenôn logon) sur la psychè des êtres humains1

. L’âme injuste et

aveuglée doit quant à elle rendre son tribut à la Justice en sacrifiant à Zeus et au Soleil2

. Dans la

mythologie grecque, le dieu de la Justice « voit et entend tout », intervient de façon souvent

arbitraire et donne des châtiments qui paraissent souvent confus, contingents et, même — tel le

Dieu des religions monothéistes —, parfois, paradoxalement injustes.

Cet exercice arbitraire du pouvoir tel que l’exerçait Zeus nous semble aujourd’hui

absurde : pourtant « l’injuste justice » et « pouvoir » font toujours bon ménage. C’est d’ailleurs le

discours officiel : est juste celui qui exerce le pouvoir. Cette propagande atteint dans le monde

contemporain des proportions médiatiques gigantesques, mais elle était déjà présente dans

l’Antiquité. Les orateurs et adversaires de Socrate et de la philosophie la nommait rhétorique,

c’est-à-dire l’art de persuader par le discours. Selon eux, la justice n’est qu’un artifice et la loi de la

nature exige que le plus fort s’en serve contre le plus faible. Mais peut-on définir ainsi le concept

philosophique de justice? La justice est-elle d’abord l’inégalité en faveur du plus fort? Le débat est

lancé et Socrate sera celui qui, à l’intérieur de deux dialogues platoniciens — le Gorgias et la

République — défendra envers et contre tous que l’idée rationnelle de justice mérite que l’on s’y

attarde et qu’elle possède même un lien direct avec le concept d’équité. Cet affrontement nous

concerne directement et nous verrons dans les pages suivantes comment il peut nous aider à

repenser aujourd’hui l’inégalité pour ensuite mieux comprendre rationnellement la justice comme

équité.

1. Selon Thr

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