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Tout Le Monde Peut être Artiste

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Par   •  6 Janvier 2015  •  Étude de cas  •  1 800 Mots (8 Pages)  •  1 084 Vues

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Introduction

« C'est dans l'art que se révèle la grandeur humaine », affirmait Hegel. Si nous entendons le terme d'art en son sens moderne et restreint, celui de beaux-arts, alors cela signifie sans doute que la vraie grandeur de l'homme se révèle dans l'artiste : le poète, le peintre, le musicien nous révèleraient ce dont l'homme est effectivement capable. Mais cela veut-il dire que les artistes sont des êtres supérieurs doués d'un talent particulier et à chaque fois unique, ou que l'humanité ne sera pleinement accomplie, comme le pensait Lautréamont, que lorsque nous serons tous poètes, peintres ou musiciens ? Car enfin, nous ne sommes pas tous artistes et pouvons-nous tous l'être, c'est-à-dire le devenir ? Ou bien le talent artistique est-il de l'ordre du don accordé à la naissance, en sorte qu'il faudrait reconnaître à l'artiste un génie particulier auquel le reste des hommes n'aurait pas accès ? En d'autres termes, avons-nous tous la capacité de créer des œuvres d'art, cette capacité ne fût-elle pleinement accomplie que chez certains, ou la création artistique réclame-t-elle un talent particulier dont tous les hommes ne sont pas doués, quelques efforts qu'ils puissent déployer pour tenter de l'acquérir ? Il s'agit de déterminer si la disposition à créer des œuvres d'art est également répartie parmi les hommes ; si elle l'est, il faudra se demander pourquoi elle devient effective chez certains et pas chez d'autres ; si elle ne l'est pas, il faudra se demander si le talent suffit, s'il n'a pas besoin d'être travaillé.

I. Le génie artistique est un talent inné

1. L'invention de la règle

Le terme d'art a longtemps servi à désigner aussi bien l'activité de l'artisan que celle de l'artiste : la signification que nous lui donnons (celle de « beaux-arts ») est en fait récente et ne date que du XVIIIesiècle. D'Alembert, dans l'Encyclopédie, est un des premiers à faire la distinction : il affirme en effet que « la pratique des beaux-arts consiste partiellement dans une invention, qui ne prend guère ses lois que du génie », en sorte que « les règles qu'on a écrites sur ces arts n'en sont que la partie mécanique ». Les beaux-arts en effet, et comme toute technique, obéissent à un certain nombre de règles fixes et enseignables ; mais ces règles communes (les lois de la perspective en peinture par exemple) n'en sont que la partie la moins digne, et voilà ce qui fonde la distinction de l'artiste et de l'artisan. Un bon artisan, c'est un artisan qui maîtrise parfaitement les règles de son art, alors qu'on n'attend pas d'un artiste qu'il se contente d'y obéir : on n'attend pas simplement d'un tableau qu'il soit bien peint, si tant est qu'une œuvre d'art doit aussi nous surprendre, et qu'il soit simplement le produit d'une habileté technique.

Il faut donc comprendre que la règle n'a pas le même statut chez l'artiste et chez l'artisan : alors que la maîtrise des règles constitue la limite supérieure de l'artisanat, elle n'est que la limite inférieure des beaux-arts. Si, comme le rappelait saint Augustin, le menuisier a bien en tête une idée du coffre avant même de le fabriquer, en sorte que le produire est toujours guidé par une forme qui lui préexiste, l'artiste quant à lui invente ses règles à mesure qu'il crée, en sorte que si l'œuvre peut nous surprendre, c'est parce qu'elle surprend d'abord l'artiste lui-même. Cela ne signifie pas que la création artistique est dénuée de règles et soumise seulement au caprice de l'artiste, cela signifie que si la règle préexiste au travail de l'artisan qu'elle guide, au contraire elle vient à l'artiste « à mesure qu'il fait », comme le disait Alain, « en sorte qu'il est spectateur aussi de son œuvre en train de naître ».

2. Le génie comme capacité à inventer des règles

C'est pourquoi, selon Kant, la première propriété d'une œuvre « doit être l'originalité » : l'artiste n'a pas à se conformer à une règle qui lui préexiste, il doit au contraire inventer sa façon de faire, et c'est parce que les règles qu'il suit sont à chaque fois originales et singulières que l'œuvre peut et doit nous surprendre. Ainsi, l'artiste, à la différence de l'artisan, est doué d'un talent particulier et inné : l'artiste se caractérise par son génie, « talent qui consiste à produire ce pour quoi on ne saurait donner de règle déterminée : il n'est pas une aptitude à quoi que ce soit, qui pourrait être apprise d'après une règle quelconque » (Critique de la faculté de juger, § 46). Le génie est une disposition innée : alors que l'artisan a besoin de connaître les règles de son art et de les maîtriser à force d'expérience, il est illusoire de croire que même en s'exerçant beaucoup, on pourra devenir artiste. La faculté d'inventer des règles nouvelles n'est pas donnée à tous, et tous ne sont pas originalement disposés (entendons par là que tous les hommes ne sont pas capables d'être originaux, c'est-à-dire de créer une œuvre absolument neuve).

3. Un talent à cultiver

Contrairement à l'artisanat, les arts ne sont pas dotés de règles certaines et universelles. Plus exactement, s'il y a bien des règles certaines en art (par exemple les lois de la perspective en peinture), ce n'est pas leur respect qui décide du caractère réussi ou raté de l'œuvre.

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