Tous les matins du monde, Pascal Quignard, 1991
Commentaire de texte : Tous les matins du monde, Pascal Quignard, 1991. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar sarah21o4 • 29 Septembre 2011 • Commentaire de texte • 1 276 Mots (6 Pages) • 2 975 Vues
Tous les matins du monde de Pascal Quignard, écrit en 1991, esquisse des paysages nombreux, des lieux divers, parfois même opposés. Une certainedualité s'impose au fil du texte, dualité opposant les fastes de la cour du roy et la simplicité de la cabane du maître de viole.Aussi, en quoi une dualité des espaces et des lieux est-elle au cœur de Tous les matins du monde ? Les deux lieux principaux sont la cabane de la Bièvre et le palais du roy, l'un représentant le lieu de méditation et de création, l'autre la grandeur royale et les fastes de la cour. Justement, ces deux lieux sont, dans l'espace, bien distincts l'un de l'autre, symboliquement, afin de marquer l'opposition entre la cour et ce lieu de retraite. Enfin, le sort réservé à la maison de Sainte Colombe est tragique : elle est vouée au silence comme le fut Port-Royal en 1710.
I] De la cabane de la Bièvre au palais du roi
Dès les premières lignes il est fait mention du retrait champêtre de Sainte Colombe dans sa cabane, entouré d'une nature dense : « il avait fait bâtir une cabane dans le jardin, dans les branches d'un grand mûrier qui datait de Monsieur de Sully. Quatre marches suffisaient à y grimper» (p. 12). Ce lieu représente l'acharnement du violiste dans sa tâche, puisqu'il « restait des heures sur son tabouret, sur un vieux morceau de velours de Gênes vert que ses fesses avaient râpé, enfermé dans sa cabane » (p. 20). Le lecteur distingue formellement l'espace clos et habité que constitue la maison (b), et l'espace de solitude et de silence qu'est le jardin (a).
a) La cabane et le jardin
Dans ce jardin se trouve justement la cabane de Sainte Colombe, qui est un lieu paisible et d'abandon. Aux alentours de la cabane se trouvent ainsi le jardin et la rivière qui sont vus comme les lieux favoris de l'enfance. C'est dans la cabane en outre où apparait aux yeux de son mari Madame de Sainte Colombe (p. 36). Les bords de la rivière et le bois prennent à faire rêver : en effet, c'est là où a lieu le rendez-vous nocturne entre le violiste et sa femme défunte, c'est là où ce fantôme retrouve son amour d'antan dans son carrosse, le suit dans la maison, puis enfin dans la barque à bord de la Bièvre avant de s'évader (chap. XV). C'est toujours dans ce cadre que Marin Marais s'offre à Madeleine (p. 54), qu'ils se rencontrent la nuit par la suite (p. 71). Enfin, Marais s'offre à Toinette dans « les buissons, à la limite du bois » (p. 82-83).
b) La maison
Dans la maison résident Madeleine et Toinette : elles voient peu leur père, trop souvent occupé à jouer des heures durant à la viole dans sa cabane, et elles profitent de ce lieu pour y parler, pour rire avec les domestiques et notamment avec Guignotte, la cuisinière (p. 19). Sainte Colombe, lorsqu'il s'y trouve, est « sujet à des colères sans raison » face auxquelles se dresse Toinette (p. 19).
Ainsi, cette flore sauvage qui environne les deux lieux de vie de Sainte Colombe, la cabane et la maison, fait de ces lieux des espaces d'inspiration, de création. Seulement cet espace de retraite s'oppose de façon distincte à la cour.
II] La cour et la retraite
Les différents espaces où se déroule la fiction sont montrés par couples antagonistes, décrits avec tempérance, renforçant de fait la symbolique de chacun d'eux. Cette constante opposition des espaces met en lumière le clivage social d'une société d'ordres, le clivage moral de ce Grand siècle. D'ailleurs, Sainte Colombe et Marin Marais en sont les représentants. Ces clivages sont mis en exergue par les déplacements et les implantations des personnages.
a) Distance géographique et distance symbolique
Par exemple, trois lieux clés, la cabane, le jardin et la maison de Sainte Colombe opposent de facto la campagne et la retraite – dans la vallée de la Bièvre – à deux autres espaces représentant le pouvoir et la vie en société que sont la ville et la cour. Justement, Pascal
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