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République de Platon

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Par   •  10 Décembre 2014  •  Analyse sectorielle  •  7 183 Mots (29 Pages)  •  978 Vues

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La République

Platon

Livre VI.

Il s'agit, comme le titre l'indique, d'un ouvrage de philosophie politique, mais pas seulement. Socrate dans ce dialogue rédigé par Platon présente à ses interlocuteurs une Cité idéale, parfaite, où règne la justice. On a reproché à ce projet d'être utopique. Mais cet idéal, s'il est irréalisable sur le plan politique, est réalisable sur le plan individuel. La Constitution de la Cité parfaite, même si elle est utopique, est riche en réflexions sur la politique, et en leçons morales, valables sur le plan individuel. La justice parfaite, qui manque peut-être de réalisme politique, sert au gouvernement de soi-même. En effet, la République commence avec la question de la justice (de la vertu) et s'achève sur un mythe à caractère moral (mythe d'Er le Pamphilien, livre X). De même, le livre VII porte sur la politique, mais aussi beaucoup sur l'éducation. La question se pose de savoir, finalement, ce qui est l'essentiel pour Platon, et s'il prend sa propre théorie politique au sérieux.


I. L'allégorie de la caverne

Elle décrit une initiation. On peut voir là un thème pythagoricien. Cependant, il s'agit d'une initiation à la connaissance rationnelle, qui n'a rien de mystique, et pas de l'introduction à une secte. En revanche, la découverte de la philosophie exige une véritable conversion. Platon illustre la rupture à effectuer pour adopter l'attitude philosophique au moyen d'une fable. C'est donc le sens symbolique de ce récit qui compte.

Situation initiale

Des hommes sont enchaînés au fond d'une caverne, de sorte qu'ils ne peuvent ni bouger, ni même tourner la tête. Ils ont toujours été là, ne sont jamais sortis. Au loin, derrière eux, brûle un feu. Entre eux et le feu, toujours derrière, se trouve une route masquée par un petit mur qui la longe. Des personnages passent sur cette route, portant des objets qui dépassent au-dessus du mur. Les ombres de ces objets sont projetées par le feu sur la paroi, au fond de la grotte. Les prisonniers ne voient de la réalité que ces ombres. Les passants parlent entre eux; mais les prisonniers ne perçoivent de leurs paroles que des échos renvoyés et déformés par la grotte. Voilà un tableau étrange, et dont s'étonne un protagoniste. Socrate lui répond: "ils nous ressemblent". Nous avons affaire à une comparaison. Il faut chercher un sens caché, comprendre ce que représente chacun des éléments du récit, décrypter la fable "point par point" pour découvrir ce qu'elle nous apprend sur nous.

Le mur qui longe la route est comparé explicitement par Platon à l'écran dont se servent les marionnettistes. C'est un écran qui cache la réalité. La paroi du fond peut être comparée aussi à un écran, mais plutôt cette fois à l'écran qui montre, comme l'écran des salles obscures ou de la télévision. En effet, le terme d'écran semble ambigu: l'écran, c'est à la fois ce qui montre une image et ce qui cache (ce qui "fait écran"). En fait, ce que montre un écran, c'est une image. Une image, ce n'est pas la réalité. L'écran de télévision ne montre qu'une image de la réalité, non la réalité elle-même. Les prisonniers prennent cette apparence pour la réalité elle-même. Parce qu'ils n'en ont jamais connu d'autre, ils ne pensent pas qu'il y en a une autre possible. Platon suggère que nous sommes comparables à ces prisonniers. Nous aussi sommes prisonniers de chaînes, celles de la télévision, et pas seulement de TF1. Plus généralement, nous sommes également dupes d'opinions que nous ne songeons pas à mettre en question. Le but de Platon est ici de définir ce qu'il appelle l'opinion (doxa), par opposition au savoir. L'opinion est incertaine, changeante (elle est ce qui s'exprime dans les sondages d'opinion). Elle n'est que le premier degré du savoir. Elle est définie dans le Ménon comme une "conjecture". Ce qui la caractérise, ce n'est pas qu'elle est fausse. Comme le préjugé, elle peut être vraie. Son caractère essentiel, c'est qu'elle est plus ou moins hasardeuse; quand elle est exacte, c'est donc par chance. Elle pourra être vraie une fois, mais par hasard. C'est cette incertitude qui caractérise l'opinion, même vraie, par rapport au savoir véritable. Dans la caverne, la régularité de l'apparition de certains reflets, l'habitude de voir certaines ombres de façon régulière rend les prisonniers capables de prévoir certains phénomènes. Que quelques-unes de ces prévisions se trouvent confirmées, et ces hommes ont l'illusion de posséder un savoir. Nous faisons le plus souvent comme eux. L'opinion représente la façon habituelle de connaître, dont nous nous contentons le plus souvent. L'opinion repose sur une passivité (les prisonniers sont passifs, puisqu'ils sont immobilisés). De même, nous acceptons certaines opinions parce que nous ne soupçonnons pas qu'elles puissent être fausses. Elles sont bien connues; on ne songe pas à les examiner puisque, justement, on les connaît bien. Leur ancienneté leur donne du crédit.

Coup de théâtre

Après le moment de l'opinion, voici l'étape suivante. Platon va maintenant décrire le moment de la conversion. Un philosophe vient arracher l'un des spectateurs à ses chaînes. Ce simple fait est riche de sens. Le passage à la philosophie est un arrachement, une rupture. "On le force à se dresser immédiatement, à tourner le cou, à marcher, à lever les yeux vers la lumière" (p.274). L'attitude philosophique est un changement radical. De lui-même, le prisonnier ne sortirait pas: il ne soupçonne pas qu'il y a quelque chose à connaître. On ne peut pas accomplir cette rupture tout seul, il faut un initiateur. Une fois dehors, l'apprenti philosophe est d'abord ébloui, la lumière lui fait mal et il ne voit d'abord rien. La rupture philosophique est vécue comme une contrainte, elle est douloureuse, elle met fin au confort de l'opinion.

L'allégorie se réfère à la méthode socratique. Socrate oblige, à force de questions insistantes, ses interlocuteurs à dire des différentes choses ce qu'elles sont. Ses interlocuteurs résistent, ils préfèrent leur ignorance à la recherche de la vérité. C'est que la connaissance suppose comme préalable que l'on abandonne ses opinions et que l'on

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