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La connaissance de soi est-elle nécessairement subjective ?

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Par   •  31 Octobre 2020  •  Dissertation  •  1 918 Mots (8 Pages)  •  1 503 Vues

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La connaissance de soi est-elle nécessairement subjective ?

Introduction : (Amorce) Lorsque Socrate reprend à son compte la formule du temple de Delphes « connais-toi toi-même » comme résumé de toute sagesse humaine, il entendait cela comme une invitation à connaître sa nature d’être mortel, évitant toute forme de démesure dans la pratique humaine. Or, cette formule ne résonne-t-elle pas aujourd’hui comme une invitation plus intimiste sous la forme de « développement personnel » et autres succédanés de psychologie centrés sur l’individu et son épanouissement potentiel ? Dans l’esprit des sages de l’Antiquité, il ne s’agissait point en tout cas de mettre en avant l’individu et tout son cortège de vécus et d’expériences particulières et subjectives mais l’Homme en tant que sujet de raison, capable de s’émanciper de lui-même par la voie de la dialectique et de la philosophie, loin des vacarmes de la foule ou des discours traditionnels du mythe. En ce sens donc, la connaissance de soi est-elle nécessairement subjective ?

(Problématique) Ce sujet tel qu'il est posé pose alors problème dans la mesure où il met en jeu deux sens que l’on peut donner à la subjectivité. En effet, on peut parler d’une connaissance subjective, en ce sens qu’elle est partiale, arbitraire, qu’elle prend le parti du « je », contre une certaine objectivité plus scientifique. Mais la subjectivité est aussi ce qui qualifie le « je » ou le sujet pensant en tant que sujet conscient, distinct des choses ou des animaux sans raison, capable de juger en retour ou ré-fléchir. Du même coup, notre conscience est-elle nécessairement arbitraire ? Prend-t-elle spontanément parti ou peut-elle exercer ce rôle de juge particulièrement probant notamment dans la conscience dite « morale » ?

(Annonce du plan) Nous allons donc tenter de déterminer et de définir cette conscience en commençant par ce rapport intime de soi avec soi qui la caractérise le mieux. Ensuite, il s’agira de se demander comment cette conscience peut aussi se constituer au fil du temps face ou grâce à ce qui n’est pas elle : autrui ou l’extériorité. Enfin, en s’inspirant du rôle moral de la conscience, on pourra déterminer en quoi elle peut aussi apparaître comme un juge impartial et objectif.

I.La conscience comme intimité de soi avec soi : le parti pris du « je » et l’objectivité compromise

1) La saisie immédiate de notre intimité par le biais de l'introspection

L’introspection, ou la méthode consistant à s’observer soi-même permet d’atteindre mon être en plein cœur, dans son intimité la plus proche et parfois la plus secrète. En prenant conscience de moi, je peux connaître mes émotions, mes pensées, mes goûts, etc.  Montaigne rappelait même dans ses Essais qu’ « il n’y a que vous qui sachiez si vous êtres lâches, cruels ou dévotieux ; les autres ne vous connaissent que par conjectures incertaines. »

2) L'arbitraire d'une conscience traversée par l'affectivité

Du même coup, la connaissance de soi s'avère être un regard qui n'est pas fixe et objectif, mais qui change selon les affects qui nous traversent. Il suffit de constater que l'homme n'a pas qu'un regard contemplatif sur le monde et lui-même, qu'il n'est pas pur esprit, mais que le corps et ses affects le travaillent de l'intérieur et agissent même à son insu quand il croit se connaître : on se connait souvent tel que nous désirons être ou tel que nous craignons d'être ; notre besoin de reconnaissance fausse également le regard que l'on peut porter sur soi-même. Chaque plaisir ou chaque douleur éprouvée favorisent le parti pris pour une chose.

3) Une connaissance qui ne peut être que subjective, c'est-à-dire sans point de vue extérieur

La méthode de l’introspection est alors une méthode qui condamne d'emblée à la pure subjectivité et il revient à Auguste Comte d’avoir clairement perçu cette problématique du sujet s’observant lui-même : de même que l’œil ne peut se percevoir lui-même sans l’aide d’un miroir, de même l’esprit ou l’âme ne peut se percevoir sans l’aide d’un « miroir » extérieur, l' « âme » ou la conscience d'autrui.

Transition : La connaissance de soi est donc nécessairement subjective, c'est-à-dire (1er sens) arbitraire, partiale et partielle, tant que la conscience de soi se limite à une observation sans recul. Mais peut-elle du même coup sortir de cette subjectivité ? Le sujet peut-il se décentrer de son point de vue trop replié sur lui-même ?

II. La conscience comme médiatisée par le rapport à autrui : une connaissance de soi qui en passe par l'alter ego

1) Je prends conscience de moi par le regard de l'autre

Toute saisie de moi-même passe aussi par la reconnaissance des autres. Sans autrui, je ne possède aucune qualité ni détermination, je ne suis rien : il faut se définir par ses actes et non ses potentialités comme le rappelle Sartre dans L’Existentialisme et un humanisme. Seul autrui est alors en mesure de me faire accéder à un jugement adéquat sur moi-même. Sartre prend alors l’exemple dans L’Etre et le Néant d'un homme qui est en train d'épier ce qui se passe dans une chambre par le trou de la serrure, par jalousie (imaginons qu'il ait des doutes sur les relations de sa femme avec l'homme qui est entré avec elle dans cette chambre). Soudain, il entend quelqu’un dans l’escalier et alors, et alors seulement, il prend conscience de sa jalousie. Autrui apparaît comme un jugement de valeur qui impose un regard que je ne peux donner à mon être, étant trop près de moi-même. Avant son apparition je suis tout entier dans ma passion et ma jalousie inconsciente et je n’ai pas le loisir de prendre du recul sur mes actes. C'est donc par l'intervention d'autrui que j'ai accès à ce que je suis, autrui me révèle une dimension essentielle de mon être : le vrai sens de mes actes dépend d'autrui. J'ai besoin de lui pour me connaître (ici, je n'aurais pas eu accès à ma jalousie) : « Autrui est le médiateur entre moi et moi-même ».

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