Le modèle français doit-il s'inspirer du régime présidentiel américain?
Dissertation : Le modèle français doit-il s'inspirer du régime présidentiel américain?. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar ktp23 • 16 Mars 2017 • Dissertation • 3 080 Mots (13 Pages) • 710 Vues
Le modèle français doit-il s'inspirer du régime présidentiel américain ?
Introduction
Selon le constitutionnaliste Maurice Duverger : «La séparation des pouvoirs revêt deux formes principales dans les démocraties occidentales, suivant les modes de relations entre le Parlement et le gouvernement: le régime parlementaire et le régime présidentiel ». Pour lui, le régime présidentiel américain se définit comme « un mariage sans divorce dont les époux font chambre à part ».
Cette expression traduit la séparation stricte des pouvoirs que connaissent les États-Unis, c'est-à-dire un régime dans lequel les trois pouvoirs (législatif, exécutif et judiciaire) sont indépendants les uns des autres et spécialisés, le Président ne pouvant dissoudre la Chambre des Représentants (équivalent de l'Assemblée nationale) et celle-ci ne pouvant renverser le Président. Bien que la séparation des pouvoirs soit rigide, le constitutionnalistes américains, craignant les blocages institutionnels, ont mis en place un régime présidentiel original en instaurant les « checks and balances », c'est-à-dire un système d'influence réciproque permettant une certaine collaboration entre les pouvoirs (droit de veto et accord du Sénat sur le vote du budget). A l’inverse la Ve République a opté, à l’image des deux précédentes, pour un régime parlementaire. Il s’agit d’un régime politique fondé sur une séparation souple des pouvoirs, c’est-à-dire qu’il admet une forme de collaboration entre le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif notamment. Cette collaboration se traduit juridiquement par la responsabilité politique du gouvernement face au parlement et par des outils juridiques permettant la révocation mutuelle des organes. De ce fait il se définit par opposition au régime présidentiel.
Afin de mesurer la pertinence qu’offrent ces deux formes de régimes politiques, il est important de les comparer en faisant ressortir les avantages et les limites que manifestent chacun d’eux en pratique. Il s’agit donc ici de faire du Droit Constitutionnel comparé. La comparaison avec le modèle américain peut ainsi permettre de faire émerger les inconvénients du modèle français ainsi que la manière dont il peut être amélioré. Il est de même nécessaire de considérer les progrès constitutionnels qui ont été réalisés depuis la IIIe et la IVe Républiques pour comprendre la Constitution du 4 octobre 1958 et ses enjeux.
Le modèle français doit-il emprunter certains éléments à la séparation stricte des pouvoirs alors même qu’il est historiquement attaché à une collaboration entre les organes de l’Etat ?
Il convient de s’interroger sur les limites que présentent le modèle français et sur les façons dont il peut être retravaillé en s’inspirant du régime présidentiel américain (I). Toutefois il est essentiel de relativiser cette comparaison en rappelant que le modèle étatsunien présente également des inconvénients et que le régime parlementaire est sans doute le mieux adapté au cas de la Ve République (II).
I – La séparation souple des pouvoirs comme source de déséquilibre et d’instabilité politique
Le système de collaboration entre les pouvoirs permet-il un meilleur fonctionnement juridique de l’Etat alors même qu’il peut être source de déséquilibre ?
Etant un régime parlementaire, le modèle français présente certaines limites du point de vue de la collaboration entre les pouvoirs exécutif et législatif. En effet, le pouvoir exécutif intervient de façon considérable dans le processus d’élaboration des lois (A). De plus les moyens de révocation réciproque menace l’équilibre de ce modèle en risquant d’empêcher l’établissement d’une véritable stabilité politique (B).
A/ Une intervention démesurée du pouvoir exécutif dans le champ législatif
Dans les régimes parlementaires comme celui de la France, il existe une collaboration entre les pouvoirs. Il est donc normal que le pouvoir exécutif puisse intervenir dans le processus d’élaboration des lois, et que réciproquement, le pouvoir législatif puisse exercer un contrôle sur le chef d’Etat et le gouvernement. Sous la IIIe et la IVe République l’essentiel du pouvoir normatif appartenait au Parlement qui votait seul la loi, malgré des pratiques politiques qui permettaient à l’exécutif d’établir des décrets-lois pour accélérer la procédure législative. Seulement suite aux limites de ce parlementarisme absolu, notamment du point de vue de l’instabilité politique, les constitutionnalistes de la Ve République et le Général de Gaulle ont voulu faire de l’exécutif un organe prépondérant. Ainsi l’article 37 de la Constitution du 4 octobre 1958 dispose que « les matières autres que celles qui sont du domaine de la loi ont un caractère réglementaire », c’est-à-dire qu’elles peuvent faire l’objet d’un décret ou d’une ordonnance. Ce système permet notamment d’accélérer la procédure législative qui est souvent longue et complexe lorsqu’elle passe par le parlement. Cependant cette pratique constitutionnelle remet fortement en cause le principe de séparation des pouvoirs même si celui-ci admet une séparation souple comme c’est le cas dans le régime parlementaire français. En effet, le fait que la Constitution permet au gouvernement et au chef d’Etat d’exercer un pouvoir normatif via les ordonnances a considérablement fait reculer le rôle du parlement. Ainsi depuis 1958, 90% des lois votées proviennent du pouvoir exécutif que ce soient directement à travers les ordonnances (prévues à l’article 38) ou indirectement, car le gouvernement a également un pouvoir très important quant à l’initiative des projets de lois. De plus il existe d’autres mécanismes juridico-politiques permettant cette prépondérance du pouvoir exécutif. C’est par exemple ce dernier qui fixe, deux semaines sur quatre depuis 2008, l’ordre du jour de l’Assemblée Nationale. La Ve République étant un régime parlementaire, le gouvernement peut également engager sa responsabilité sur un texte via l’article 49 alinéa 3 de la Constitution, ce qui lui permet d’interférer d’autant plus dans le domaine initialement prévu pour la loi. Tous ces moyens d’actions favorables au pouvoir exécutif, qui ont une valeur constitutionnelle, remettent clairement en question le principe de séparation des pouvoirs et nous invitent à considérer le système de séparation stricte des régimes présidentiel.
Aux Etats-Unis, qui sont souvent cités comme le régime présidentiel
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