Le mariage entre alliés
Commentaire d'arrêt : Le mariage entre alliés. Recherche parmi 300 000+ dissertationsPar Marina Crespo • 8 Mars 2016 • Commentaire d'arrêt • 1 576 Mots (7 Pages) • 2 060 Vues
« Le législateur doit concilier [les] valeurs fondamentales de notre société, avec le bien commun, conciliation qui ne manque pas de frustrer les désirs des uns (…) et des autres.» F.Chénedé. Par cette citation se pose d'emblée l'intérêt de l'arrêt porté à l'étude aujourd'hui.
En effet, il concerne l'action en nullité d'un fils pour une union contractée entre son père et son ex-femme (entre un beau père et son ex bru donc). Lorsque Raymond Y, mari actuel de Mme.X et père de Claude Y (ex-mari de Mme.X) décède, il institue Mme.X légataire universelle (après plus de 20ans d'une union non prohibée), portant ainsi atteinte aux droits d'héritier réservataire qu'est Claude Y. Ce dernier intente donc une action en justice, et obtient l'annulation du mariage entre feu Raymond Y et Mme.X, ainsi qu'une compensation pécuniaire.
Cependant, Mme.X étant insatisfaite de la décision rendue par la Cour d'Appel, elle se pourvoit en Cassation et obtient gain de cause, puisque la Cour de Cassation casse et annule la décision de la Cour précédente, préservant ainsi l'union entre alliés, normalement prohibée par l'article 161 du Code Civil.
Ainsi, il est légitime de se demander : Le principe de la prohibition du mariage entre alliés peut-il connaître des exceptions ? Bien que l'arrêt réponde par l'affirmative à cette question puisqu'il refuse la dissolution du mariage, cette solution doit être vue avec recul.
En effet, l'arrêt pose une exception au principe de prohibition, mais est tout de même limité dans sa portée puisque d'une part ce n'est pas un arrêt de principe, et puisqu'il s'appuie d'autre part sur des fondements particuliers.
Ainsi, il convient de voir dans une première partie une dérogation au principe du mariage entre alliés (I), et dans une seconde partie une remise en question à nuancer (II).
I. Une dérogation au principe du mariage entre alliés.
Bien que l'existence de liens d'alliance entre les futurs époux soit une condition conduisant à l'interdit matrimonial (A), l'arrêt de la Cour de Cassation semble n'en avoir pas tenu compte puisqu'il a amené, en l'espèce, une dérogation à l'interdit (B).
A. L'existence de liens d'alliance comme interdit matrimonial.
Les alliés sont les personnes agrégées à la famille à partir d'un mariage. Leur union avec un membre de la famille est théoriquement prohibé pour des raisons morales.
→ Article 161 (Code Civil) : « En ligne direct, le mariage est prohibé entre tous les ascendants et les descendants et les alliés dans la même ligne ». Les alliés sont les personnes agregées à la famille à partir d'un mariage. Cet article pose en principe un empêchement absolu pour les alliés en ligne directe. Cependant, l'empêchement n'est en réalité absolu que lorsque le mariage qui a créé l'alliance précédente a été dissout par le divorce. L'empêchement est relatif si le conjoint qui a créé l'alliance est décédé, et la nouvelle union peut donc faire l'objet d'une dispense.
→ Article 184 (Code Civil) : « Tout mariage contracté en contravention aux dispositions contenues aux articles (…) 161 (…) peut être attaqué, dans un délai de trente ans à compter de sa célébration, soit par les époux eux-mêmes, soit par tous ceux qui y ont intérêt, soit par le ministère public ».
→ Droit au mariage est un droit fondamental, reconnu et protégé par plusieurs textes (ex : Constitution française via l'article 4 de la DDHC de 1789) comme par les articles 12 et 8 de la CEDH. : « A partir de l'âge nubile, l'homme et la femme ont le droit de se marier et de fonder une famille, selon les lois nationales régissant l'exercice de ce droit » (référence à l'article 161 du Code Civil). De plus, « toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale ».
B. Une dérogation à l'interdit en l'espèce.
Bien que consciente des motifs légitimes invoqués par la Cour d'Appel, la Cour de Cassation passe outre en invoquant d'autres arguments pour annuler l'annulation du mariage :
→ La Cour d'Appel s'appuie sur plusieurs arguments :
- L'union avec la personne qui a créé l'alliance a été dissoute par divorce (empêchement absolu),
- L'union n'a pas fait l'objet d'une dispense du Président de la République comme prévu à l'article 164 du Code Civil.
- La fille de Mme.X a été fortement affectée par les liens unissant sa mère et son grand-père, avec lequel son esprit a fait « une regrettable confusion » avec son père : la prétention de nullité avancée par M.Claude Y suit des finalités légitimes de sauvegarde de l’homogénéité de la famille.
- Article 187 (C.Civil) : l'action en nullité peut être intentée par tous ceux qui y ont un intérêt né et actuel → l'unique héritier réservataire qu'est Claude Y subira forcément des conséquences préjudiciables quant à
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