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Commentaire d'arrêt Ile de la Tentation 3 juin 2009

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Par   •  4 Février 2017  •  Commentaire d'arrêt  •  2 135 Mots (9 Pages)  •  8 045 Vues

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Commentaire d’arrêt

Arrêt « Ile de la tentation » rendu par la chambre sociale de la Cour de Cassation le 3 juin 2009

Dans cet arrêt de Cassation publié au bulletin, des participants à l’émission de téléréalité « l’Ile de la tentation » signent un acte qualifié de « règlement participant », acte d’après lequel ils consentent à participer au tournage de l’émission produite par la société Glem pour TF1 en Thaïlande. A l’issue du tournage, les participants demandent à la juridiction prud’homale la requalification dudit « règlement participant » en contrat de travail à durée indéterminée afin de percevoir le paiement des rappels de salaire, des heures supplémentaires et des indemnités consécutives à la rupture du contrat.

La juridiction prud’homale rend sa décision le 30 novembre 2005 et donne raison aux participants en requalifiant le règlement en contrat de travail, obligeant la société de production à les dédommager à hauteur d’une centaine d’euros par participant. La société de production interjette appel de la décision mais se voit déboutée de sa demande par la Cour d’Appel de Paris dans son arrêt rendu le 12 février 2008, arrêt qui condamne la société à payer une somme beaucoup plus élevée puisqu’elle devra payer le salaire pour heures supplémentaires, l’incidence des congés payés, les dommages et intérêts suite à la rupture abusive du contrat de travail ainsi que pour le licenciement irrégulier et enfin les indemnités concernant le travail dissimulé.

La somme s’élevant en tout à plus de 30 000 euros, la société forme  un pourvoi en Cassation au motif que les éléments permettant la caractérisation d’un contrat de travail n’étaient pas réunis, par exemple elle invoque, articles du règlement participant à l’appui, que la prestation de travail était inexistante ; le « règlement participant » ne pouvant pas s’apparenter à un contrat de travail en ce que l’activité des participants ne constituait pas un travail au sens de l’article L1221-1 et suivants du Code du travail, elle soutient de plus que l’activité en question devait revêtir un caractère professionnel pour être soumise aux dispositions du code du travail et qu’en l’espèce, le règlement participant précisait bien que chacun garantissait sa participation au programme « à des fins personnelles et non professionnelles ». La société avance encore le moyen selon lequel l’activité des participants était spontanée, ils n’avaient pas un rôle d’acteur dans le programme ce qui excluait le caractère professionnel de l’activité. La société affirme aussi qu’aucun lien de subordination ne pouvait être caractérisé du fait que les activités en question n’avaient pas de caractère contraignant et qu’aucune sanction n’était infligée à ceux qui ne souhaitaient pas y participer. Enfin, la société ajoute que le paiement de la somme de 1525 euros aux candidats ne constituait pas une rémunération suite à l’accomplissement d’un travail, mais plutôt une contrepartie à l’utilisation de leur image et de leur pseudonyme ou de leur identité à la télévision.

La question soumise à la Cour de Cassation consistait donc à savoir si la participation à une émission de téléréalité pouvait être considérée comme un travail et si de ce fait, les participants étaient bien liés à la production par un contrat de travail ?

La Cour de Cassation répond affirmativement à la question en utilisant la méthode du faisceau d’indice et en posant le lien de subordination comme critère décisif dans la qualification du contrat de travail.

Cet arrêt est le premier à qualifier de contrat de travail le contrat qui liait une production à des participants dans le cadre du tournage d’une émission de téléréalité, ici et pour la première fois, la Cour de Cassation fait primer le critère du lien de subordination sur le critère de la prestation de travail et sur la rémunération pour requalifier le contrat. Le pouvoir d’interprétation du juge est particulièrement mis en avant dans cet arrêt (I) et l’on assiste à l’élargissement de la notion de travail par celui-ci (II).

  1. La position centrale du juge dans la requalification du règlement en contrat de travail

On sait que le Code du travail ne pose pas de définition claire de ce qu’est un travail en droit français, le rôle d’interprétation du juge dans cet arrêt n’en est que plus important, celui-ci devant faire abstraction de la volonté des parties (A) et procéder méthodiquement à la recherche des différent indices qui caractériseraient une situation régie par le droit du travail (B)

  1. Une situation de fait qui prime sur la volonté des parties

« L'existence d'une relation de travail ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu'elles ont donnée à leur convention mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité des travailleurs. »

Le principe d’indisponibilité des critères du contrat de travail dégagé en 2000 par l’arrêt Labbane est réaffirmé dans cet arrêt en tant qu’attendu de principe par la Cour de Cassation. Ce principe rend la qualification du contrat en contrat de travail indépendante de la volonté des participants et de la production, quand bien même ceux-ci n’auraient pas initialement pensé à conclure un contrat de travail. Les juges du fond sont appelés depuis les années 2000 pour chaque cas d’espèce à se cantonner de manière totalement impartiale aux données objectives des situations, sans prêter attention à ce que souhaitent les parties. Cet arrêt est une nouvelle application du principe d’indisponibilité des critères qui a émergé en droit du travail depuis les années 80 notamment dans l’arrêt Barrat du 4 mars 1983 qui esquissait déjà la règle selon laquelle la volonté des parties était « impuissante à soustraire des travailleurs au statut social découlant nécessairement des conditions d’accomplissement de leur tâche »

En l’espèce, et appréhendant cet argument, la société TF1 production avance dans son sixième moyen que les activités proposées aux candidats participant au tournage « n’avaient aucun caractère contraignant » ; que « ceux-ci étaient libre de refuser d’y participer sans que cela ait d’incidence sur la poursuite de leur participation à l’émission » ; la société de production réfute donc l’argument selon lequel elle détenait un pouvoir de contrôle et de direction sur les candidats et expose ainsi une situation de fait non conforme à une situation de travail.

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